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De la guerre chimique à la guerre médiatique

Par Louis Denghien

Les menaces proférées lundi par Barack Obama à l’encontre de Bachar al-Assad et du gouvernement syrien à propos de l’utilisation éventuelle par Damas de gaz sarin dans sa lutte contre les rebelles nous renvoient irrésistiblement au précédent irakien, Bush Jr et Colin Powell ayant en leur temps inquiété la galerie occidentale avec des canons géants et autres armes de destruction massive.

Obama s’est même fait menaçant envers Bachar en des termes qui rappellent que le président américain, pour être noir et démocrate, n’en est pas moins un cow-boy. Sa secrétaire d’État, Hillary Clinton, infatigable belliciste et insoupçonnable sioniste, en a remis une couche sur le même sujet.

Obama nous refait le coup de l’Irak

Un cow-boy et un désinformateur : toute cette nouvelle offensive médiatique reposerait sur de mystérieux renseignement parvenus à Washington et selon lesquels, selon la formulation technique de l’AFP, « Damas serait en train de mélanger les composants nécessaires à la militarisation du gaz sarin » , utilisé dans le conflit irako-iranien des années 80. Qui sont les informateurs de la Maison-Blanche ? Des opposants basés à Doha au Qatar, peut-être ?

Le ministre jordanien des Affaires étrangères, Nasser Judeh, qui se trouvait justement en visite chez le protecteur – ou donneur d’ordres – américain, a rebondi avec servilité sur la déclaration du président américain, estimant que l’usage par Damas d’armes chimiques « changerait la donne » et justifierait une intervention internationale.

Le gouvernement syrien n’a pu que répéter que ce qu’il avait précédemment déclaré sur le même sujet, à savoir qu’il n’utiliserait jamais de telles armes contre son peuple, les réservant à des agresseurs étrangers.

Comment analyser cette nouvelle escalade déclamatoire américaine ? Comme une continuation, bien sûr, de la guerre contre la Syrie (et l’Iran et le Hezbollah). Mais par d’autres moyens que la guerre réelle. Tout ceci – qu’on pourrait résumer par la formule « de la fumée sans feu » – s’inscrit dans le même processus de pression – psychologique autant que diplomatique – sur les milieux militaires et politiques syriens, pour leur signifier qu’ils ont toujours dans le collimateur de l’axe occidental, avec une épée de Damoclès, judiciaire sinon militaire, au-dessus de leurs têtes. Mais nous pensons que les milieux dirigeants ne se laisseront pas impressionner, d’autant qu’ils savent qu’ils n’ont rien à espérer de leurs ennemis.

Leurs ennemis qui, sur le terrain, font certes chaque jour des dégâts, mais n’avancent pas, ni géographiquement, ni militairement, ni politiquement. Et ce patinage sanglant explique sans doute en partie les menaces médiatiques de l’administration Obama. Qui n’enverra pas les boys en Syrie, alors qu’elle doit le retirer d’Afghanistan et que le souvenir de l’Irak, de la Somalie, et aussi du Vietnam reste prégnant dans l’opinion américaine.

Une fois de plus, Washington et ses relais, incapables de passer à l’acte, se réfugient dans la guerre psychologique à la petite semaine, histoire de maintenir un minimum syndical de pression – et de sauver la face. C’est à ce registre qu’appartient la dernière déclaration du secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, selon qui l’opposition progressait « chaque jour politiquement et militairement » et le régime syrien pouvait tomber « à n’importe quel moment ». N’importe quand, ça peut donc aussi être dans un avenir lointain. On ne poussera pas plus loin l’exégèse et on se contentera de rappeler que M. al-Arabi n’est, après tout, qu’un salarié de l’émir du Qatar.

Poutine visé par les Patriot

D’une importance plus immédiate pour l’indépendance et la sécurité de la Syrie, les entretiens Poutine/Erdogan à Ankara, lundi, se sont conclus, au-delà des formules de politesse diplomatique et par-delà les réalités économiques liant les deux pays, par un franc constat de désaccord. Que Poutine a exprimé sans fard au cours d’une conférence de presse commune avec le Premier ministre turc. Certes, a-t-il assuré, Moscou et Ankara ont les mêmes objectifs (de paix et de démocratie) pour la Syrie. Mais, évidemment, la manière diffère : « La Russie et la Turquie ne peuvent trouver pour le moment une approche mutuelle sur les moyens de régler la situation en Syrie », a sobrement dit le président russe. Qui a critiqué une nouvelle fois le projet de déploiement de quatre ou six batteries de missiles euro-américains Patriot par les Turcs sur leur frontière avec la Syrie, déploiement qui devrait être avalisé par l’OTAN réuni aujourd’hui à Bruxelles. Les missiles devraient être opérationnels au premier trimestre 2013.

Sergueï Lavrov, chef de la diplomatie russe, présent au sommet de l’OTAN, exprimera cette désapprobation russe. Mais on peut penser qu’au-delà des protestations diplomatiques, Moscou devrait (le verbe « devoir » est ici employé aussi bien au sens d’obligation politique que de possibilité factuelle) travailler à des contre-mesures techniques, pour soutenir le gouvernement syrien. Nous pensons qu’ils le feront. Parce qu’il n’est toujours pas de leur intérêt que Bachar perde et que le Qatar et l’OTAN gagnent. Et qu’il leur est difficile de laisser déployer des Patriot si près de leurs frontières. Après tout, ces missiles sont aussi dirigés contre les Russes, autant que contre les Syriens – et les Iraniens.

 

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Sans surprise, Poutine et Erdogan ne sont pas parvenus à un accord sur la Syrie. Mais le président russe devra trouver une parade aux Patriot de l’OTAN…

 

Un certain nombre des lecteurs d’Infosyrie trouvent Poutine « mou du genou » sur la Syrie. C’est faire bon marché de l’action diplomatique – fondamentale – et de l’aide technique et militaire – non-négligeable – des Russes en faveur de la Syrie depuis un an et demi. La manière russe, dénoncée globalement comme brutale par essence par les milieux atlantistes de France et d’ailleurs, privilégie la forme, une forme respectueuse des procédures internationales de négociation, qui souligne a contrario l’activisme et l’agressivité des Occidentaux sur le dossier syrien.

Au fond, toute l’action de Poutine et de Lavrov depuis un vingtaine de mois consiste à démontrer au monde que Washington et ses alliés ne veulent ni la paix, ni la démocratie, ni le dialogue, pas plus que n’en veulent la majorité des rebelles sévissant en Syrie. Cette stratégie doit évidemment être complétée par une aide militaire et économique concrète. Elle existe, même si elle et peu médiatisée. Poutine, considéré comme un cosaque par nos « élites », veut corriger cette image, et rappeler à l’opinion internationale que la paix dans le monde – et au Proche-Orient – est d’avantage menacée par les cow-boys que les cosaques.

Approfondir le sujet avec Kontre Kulture :

 






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11 Commentaires

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  • #276247
    Le 4 décembre 2012 à 22:25 par Acte patriote
    De la guerre chimique à la guerre médiatique

    Il est vrai que l’attitude des dirigeants russes se démarque de la vulgarité manifeste des siono-atlantistes ! Je repense souvent aux propos de M Pierre Hillard sur l’internationalisme de M. Poutine. Mais puisqu’il se bat pour la paix mondiale, perso, je crois qu’il accepte l’idée de souveraineté nationale. Pas besoin de le mettre à côté de la déglinguée de clinton, pour comprendre qui se rapproche le plus de l’humanité et donc, de l’intelligence ...

     

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  • #276388
    Le 5 décembre 2012 à 00:56 par inconnu
    De la guerre chimique à la guerre médiatique

    Les "Patriot", c’est pas des missiles de défense anti-aérienne ? Pourquoi la Syrie et la Russie devrait-ils avoir peur des "Patriot" ?

     

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    • #276542
      Le Décembre 2012 à 10:08 par Gaius
      De la guerre chimique à la guerre médiatique

      C’est une arme de défense certes mais peut être utiliser pour bloquer une contre-attaque , c’est à dire , la Russie se prend des missiles , elle veut riposter, les patriots bloquent ses missiles de riposte.

       
    • #276561
      Le Décembre 2012 à 10:43 par francky
      De la guerre chimique à la guerre médiatique

      Tout simplement parce que en cas d attaque de l axe atlantic sur la Syrie cette derniere n aurait aucun moyen de menancé ses adversaires, donc le combat serait quasiment perdu d avance. Poutine ne craint pas les missiles Patriot en tant que vecteur d attaque mais en tant que bouclier qui l empecherait d intervenir sur le sol turc qui servirait de base d attaque a l armée de l ’ OTAN.

       
    • #280702
      Le Décembre 2012 à 01:20 par solmed
      De la guerre chimique à la guerre médiatique

      Mais non, il faut arrêter de plaisanter, le problème ce ne sont pas des missiles antimissiles (Patriot) totalement inoffensifs mais le système de radar sophistiqué et très puissant qui l’accompagne....

       
  • #276502
    Le 5 décembre 2012 à 08:01 par AtropoS
    De la guerre chimique à la guerre médiatique

    Bonjour,

    Pour ceux qui croient encore que la pseudo armée syrienne de libération est composée en majeure partie de syriens, ça peut choquer. En fait, le raisonnement de BEA est on ne peut plus honnête : il réserve les armes chimiques à des étrangers présents sur son sol national. Maintenant, possède t-il ces armes, va t-il en faire usage ? Cela ne serait pas sans dommage pour la population civile, donc cela servirait la cause ennemie.

     

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  • #276639
    Le 5 décembre 2012 à 12:41 par Tenez
    De la guerre chimique à la guerre médiatique

    Qu’esce que c’est que ces nouvelles menaces sur la Syrie et son uilisation d’armes chimiques ? C’est marrant mais l’idee vient originellement de Fabius et est maintenant adoptee par Obama et l’Otan....quelle coincidence que ces sionistes arrivent a la meme menace ?!? Quelle coincidence aussi qu’on commemore les 25 ans du masscre d’Halabja en Irak (sur BBC/CNN/etc..)..je ne me souviens pas qu’ils aient commemore les 20ans ni les 15 ?

    Ils nous prennent vraiment pour des idiots...mais faut croire qu’on l’est si on ne reagit a ces mensonges en series.

    Maintenant il suffit simplement d’acheter 2 idiots en costumes militaire Syrien ou simplement d’en deguiser quelques rebels pour orchestrer un autre massacre chimique (fourni par "nous" bien sure) qui tueras sous nos ordres plein de nouveaux innocents pour conforter les esprits occidentaux endormis que les guerres que nous engagons "la-bas" sont justifiees encore une fois.

    Quand on lit le jeu du diable et qu’on s’apercoit enfin que le diable c’est nous...ca fait des frissons dans le dos.

     

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    • #276746
      Le Décembre 2012 à 15:43 par pff
      De la guerre chimique à la guerre médiatique

      Je souscris tout à fait à ce que tu dis.
      .
      D’ailleurs, les méthodes employés par les amerlosionistes sont tout à fait connues. La preuve, dans les émissions du type "juste pour rire", programme comique canadien, on voit souvent une blague assurer sa réussite auprès de la "victime" par la mise en place au préalable d’une version-miniature ou d’une saynette ayant des points communs avec le délire de la blague (pour faire entrer l’esprit des gens dans le paradigme). Ainsi, un chasseur de serpent courant dans un parc (en tenu d’Indiana Jones) prépare à leur insu les passants (surpris mais qui pensent vite à autre chose) et, quelques instants plus tard, on fait jaillir au-dessus de leur tête un faux serpent. Résultat assuré.
      .
      Ici, c’est pareil. On en est à l’étape 1 sur 3.
      .
      Rappel : 1) Fumée sans feu puis feu réel mais sous faux drapeau, 2) public terrorisé qui "réclame" des mesures ; 3) intervention (guerre). Autrement dit, la formule magique maçonnique de l’ordo ab chaos (provoqué par soi-même) : problème, réaction, solution.

       
  • #276710
    Le 5 décembre 2012 à 14:43 par Sibel
    De la guerre chimique à la guerre médiatique

    Vladimir Poutine : "Moscou et Ankara ont les mêmes objectifs (de paix et de démocratie) pour la Syrie."

    Poutine est diplomate, mais il n’avait pas besoin de vanter la politique d’Erdoğan, il devait dire la vérité ou évité de mentir.

    La Russie et la Turquie s’en fout s’il y a la paix ou la démocratie en Syrie. Poutine pense à l’intérêt de la Russie, c’est un patriote. Erdoğan pense à son propre intérêt, c’est un traitre.

    Erdoğan est le co-président du projet sioniste (La doctrine de remodelage du Grand Moyen-Orient). Erdoğan veut rester le plus possible au pouvoir et pour ça il est prêt à tout. Si Poutine et Erdoğan parvenaient à un accord sur la Syrie, cela voudrait dire que Erdoğan signe sa fin ou alors Poutine trahi son peuple et s’allie avec l’Empire.

     

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  • #277548
    Le 6 décembre 2012 à 22:20 par abderrahim
    De la guerre chimique à la guerre médiatique

    C’est Brigitte Bardot qui va pas être contente

     

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  • #277564
    Le 6 décembre 2012 à 22:30 par walislam9394
    De la guerre chimique à la guerre médiatique

    les russes (poutine en tête) sont des exemple que nos elites françaises devraient suivre plutot que de se mettre a genoux devant les americano-sionistes. ça doit etre lourd de se sentir "prostitués" par ces gens-là

     

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