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Obama veut terrasser les lanceurs d’alerte

Jesselyn Radack et Thomas Drake (photo ci-contre) dénonceront vendredi soir au FIFDH de Genève les faux-semblants de la présidence.

Thomas Drake a un petit job chez Apple. Son poste de cadre supérieur à la NSA, l’Agence nationale de la sécurité aux États-Unis, il l’a perdu quand il a fourni à la presse, fin 2005, des preuves que l’Etat espionnait les simples citoyens. Résultat : sa vie a été détruite, ses économies envolées. Jesselyn Radack, elle, était jusqu’en 2002 « conseillère éthique » au Département de la justice. Mais sa hiérarchie n’a pas apprécié qu’elle dénonce l’absence d’avocat lors de l’interrogatoire du « taliban américain » John Walker Lindh. À présent, elle assure la défense de lanceurs d’alertes, dont Edward Snowden. Vendredi soir à Genève ils participent à un débat du Festival international du film sur les droits humains (FIFDH), à 20 h 30 à la salle Pitoëff.

Dans l’Histoire des États-Unis, seulement dix citoyens ont été inculpés d’espionnage après des fuites de documents officiels vers la presse. Sept l’ont été sous Barack Obama. Est-ce donc devenu pire qu’avant ?

Jesselyn Radack : Obama aime parler de transparence. À son arrivée à la Maison-Blanche, il louait les lanceurs d’alerte. Depuis, son administration n’a fait que les réprimer. Pour les réduire au silence, cacher ce qui dérange. Il y a bien le Whistleblower Act, loi censée protéger depuis 1989 quiconque dénonce les violations de la Constitution. À deux exceptions près : il ne peut être question ni de sécurité nationale ni des services secrets. Une sacrée brèche ! Obama s’y est engouffré, déclarant la « guerre aux lanceurs d’alerte », comme disent les médias. Selon le New York Times, il y a plus d’obstacles à la liberté d’expression que sous Nixon (ndlr : tombé en 1974 suite au Watergate). Dénoncer une dérive, c’est être rayé de la fonction publique, passer pour un traître, se voir poursuivi par la Justice, se ruiner en frais d’avocat et ne plus trouver d’emploi.

Vraiment, la présidence actuelle ne fait pas mieux que Bush ?

Thomas Drake : C’est sous Bush, après le 11 septembre 2001, que tout a changé. La sécurité a soudain eu la primauté, même par rapport à la Constitution. À la NSA, un supérieur hiérarchique m’a affirmé sans sourciller que « la fin justifie les moyens » et que la violation de la sphère privée est « légale » puisqu’elle a été avalisée par « l’autorité exécutive carrément ». Bref, le gouvernement s’est placé au-dessus des lois.

Jesselyn Radack : Bush a autorisé ces dérives, mais Obama les a normalisées. Suspects torturés, citoyens espionnés, guerre des drones… Un million de personnes aux États-Unis avait accès à ces infos classées top secret avant de devenir de grands scandales. Les quelques patriotes qui ont donné l’alerte au FBI, à la NSA, dans l’armée ou au Département de la justice, ont été poursuivis sous l’Espionage Act, adopté pour lutter contre les agents adverses… à la fin de la Première Guerre mondiale !

Rien n’a donc été fait pour améliorer la situation ?

Jesselyn Radack : Si Obama voulait vraiment en finir avec fuites, il réformerait le Whistleblower Act, abolissant les exceptions et adoptant des sanctions contre quiconque se vengerait des lanceurs d’alerte. Au contraire, il renforce la culture du secret, qui fait naître davantage de dénonciations…

Thomas Drake : Comme Snowden, j’avais des documents prouvant que l’État espionne ses citoyens. À l’époque, je les ai fournis aux investigateurs internes de la NSA et à la commission parlementaire surveillant les services secrets. Sans résultat. Cela n’a pas échappé à Snowden, qui les a fournis aux médias…

Envers et contre tout, il y a encore des lanceurs d’alerte. Comment l’expliquer ?

Jesselyn Radack : Le courage, c’est contagieux. Edward Snowden dit avoir été inspiré par Thomas Drake. D’autres à l’avenir diront qu’ils ont été inspirés par Snowden. Chacun a sa ligne rouge. Nous tolérons bien des choses, mais seulement jusqu’à un certain point. Ensuite de quoi, cela devient tout simplement insupportable.

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