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Retour d’Afghanistan, les militaires s’arrêtent à Chypre pour réduire leur stress

L’armée de terre met en place une sorte de "caisson de décompression" pour les militaires rentrant d’un séjour de six mois en Afghanistan. Ce dispositif, connu sous le nom de "sas de Chypre", a été présenté à la presse la semaine dernière, par ses concepteurs, les colonels Thiébault et Soriano. Sur la route du retour en France, les militaires font une halte de deux jours à Chypre, où ils sont accueillis dans un hotel du bord de mer, à Pafos. Il s’agit de "faciliter leur retour, de se réadapter à la vie ordinaire" en les aidant à "perdre les mécanismes d’adaptation au combat". Passer directement d’une Forward Operational Base à son domicile privé, en quelques heures, peut-être une épreuve douloureuse, pour le militaire - qui arrive avec son stress - comme pour sa famille.

Les deux jours passés à Pafos comprennent des séances de relaxation, avec notamment les Techniques d’optimisation du potentiel (TOP) qui s’apparentent à la sophrologie. Les militaires peuvent s’ils le souhaitent s’entretenir avec des psychologues. Ils ont du temps libre dans cette station balnéaire et sont sensibilisés au risque d’apparitions de troubles (syndrome post-traumatique, stress) dans les mois qui suivent.

Le coût est de ce "sas" est 400 euros par militaire. En 2009, il aura concerné 1200 hommes (100 en juin, 100 en octobre et actuellement l’ensemble du GTIA Kapissa et des OMLT). le taux de satisfaction semble très élevé (90%) et cette expérimentation pourrait être élargie à l’ensemble des personnels de retour d’Afghanistan.

Les Américains, les Britanniques et les Canadiens avaient déjà mis en place un tel sas. Ce souci de la santé psychologique des militaires est une donnée nouvelle dans les armées. Le "sas" n’est qu’un élément d’un dispositif plus large. Les unités ont désormais en leur sein un "officier environnement humain (OEH) qui reçoit une formation spécialisée. Dans chaque section, un "référent" (MdR ou sous-officier) constitue le premier maillon d’un réseau de personnels sensibilisés aux questions psychologiques. Un psychologue est en permanence auprès du général commandant les éléments français. En cas de besoin, la cellule de soutien psychologique de l’armée de terre (cispat) peut itervenir.

A leur retour, les militaires bénéficient d’un suivi individualisé pour détecter l’apparition de troubles, notamment pour ceux qui ont été confrontés à des attaques IED et au ramassage de morts ou de blessés.

L’armée française ne dispose pas de chiffres sur ses blessés psychiques. Les Américains estiment que 15 à 17% des soldats de retour d’Irak ou d’Afghanistan en souffrent. Les Britanniques annoncent des chiffres plus faibles, de l’ordre de 5%. Selon l’armée de terre, les taux français seraient "bien moindre", mais faute d’études épidémiologiques, il est difficile d’en être convaincus.

Quoi qu’il en soit, même si seuls 3% des militaires français rentrant d’Afghanistan sont victimes d’un syndrome post-traumatique ou d’autres troubles, cela fait quand même une centaine d’hommes chaque année ! Autant de vies personnelles et familiales abîmées. Il est tout à l’honneur de l’armée de terre de prendre désormais très au sérieux ces détresses longuement tues.