Soeur Hardeuse et soeur Putain
14 novembre 2013 15:49, par Hervé MorelLe problème de ce débat sur la pénalisation des clients est que d’une manière générale, il considère que la prostitution est un tout, homogène, un système qui fonctionne partout pareil. Sauf que c’est évidement faux ; aussi bien sur les plans humains, psychologiques, financiers, etc., la prostitution n’a rien à voir qu’elle soit dans le milieux du luxe ou sur les trottoirs. Cet article, par exemple, n’évoque que la prostitution faite, d’après l’auteur, pour satisfaire l’ego de personnes dépossédées de leur corps après une agression sexuelle. Mais cette critique de la prostitution ne fonctionne pas pour les personnes qui se prostituent par besoin, pour nourrir leurs gosses ou payer leur loyer (oui, ça existe toujours) et encore moins pour les femmes kidnappées par des réseaux mafieux à un bout de l’Europe, droguées, et finalement prostituées à l’autre bout du vieux continent. (À l’inverse, toutes les personnes ayant subit des sévices sexuels dans leur enfance ne deviennent pas des putains ou des dépravés sexuels). Bref, je n’ai jamais vu de débat qui englobe dans sa totalité le problème de la prostitution et toutes ses facettes, car il n’y a pas une mais des prostitutions selon les milieux, des gens qui font ça sous la contrainte, d’autres par nécessité, d’autres encore parce qu’ils y voient une solution de facilité pour gagner leur vie. Il est d’ailleurs extrêmement difficile de trancher dans un sens comme dans l’autre : interdire la prostitution ? On peut essayer, mais le "plus vieux métier du monde" continuera encore certainement d’exister de manière cachée. Légaliser les bordels ? Cela peut sembler séduisant aussi bien pour des questions d’hygiène, de lutte contre les IST, de protection des prostitués qui peuvent être vulnérables... Mais cela pose un problème éthique : un état de droit a-t-il de droit de légaliser la marchandisation des corps de ses citoyens ? Et quand bien même les bordels seraient légaux, il existerait toujours probablement une autre prostitution, celle de l’ombre, celle des miséreux (aussi bien du côté des clients que des prostitués), moins chère et moins clean. En somme, c’est un sujet sociétal très complexe, qui, je pense, ne peut être complètement interdit ou légalisé, car c’est un commerce aussi ancien que les premières cités des hommes, dont les ressorts tiennent de la nature humaine... En gros, encore un faux-débat sociétal sur lequel les médias mettent la pâtée pour ne pas aborder les enjeux sociaux concrets de ce pays...