Egalité et Réconciliation
https://www.egaliteetreconciliation.fr/
 

Cités : Luc Besson a la haine. Pour de vrai.

Avant, Luc Besson ne tarissait pas d’éloges sur le 9-3, où il avait décidé de tourner le prochain film qu’il produit. Mais depuis que les « jeunes qui en veulent » de Montfermeil lui ont cramé dix véhicules, le réalisateur découvre que la banlieue c’est pas rose, la banlieue c’est morose.


Comme il semble loin le temps où Luc Besson déclarait sa flamme au « 9-3 », véritable « trésor » où les jeunes habitants ont « envie de manger la vie, envie d’y arriver, envie de créer ». C’était pourtant il y a moins d’un mois, dans Le Monde du 30 septembre 2008. Le réalisateur du Grand bleu découvrait alors avec émerveillement Montfermeil et sa tristement célèbre cité des Bosquets, où il avait choisi de tourner certaines scènes de sa prochaine production, From Paris with love. Il s’étonnait que « ça ne pète pas plus », compte tenu des conditions de vie… Eh bien le voilà servi ! Dans la nuit du 12 au 13 octobre derniers, dix véhicules stationnés dans la cité et qui devaient servir aux cascades et aux décors film ont été incendiés. Du coup, le patron d’Europacorp a laissé tomber sa casquette de « mécène des cités » pour reprendre celle de « producteur d’un film à 38 millions d’euros » et a décidé de « suspendre » le tournage de From Paris with love.


La banlieue c’est pas rose, la banlieue c’est morose


Débarquer dans une cité réputée difficile avec quatre-vingt techniciens est forcément source de tension. Luc Besson s’en doutait et avait promis d’embaucher près d’une centaine d’habitants comme vigiles, figurants ou cuisiniers. Il en avait profité pour fustiger les pouvoirs publics, incapables de régler la question du taux de chômage dans les quartiers difficiles alors qu’il lui paraissait tellement fastoche de faire confiance à des jeunes des cités… Mais hier sur Europe 1, le discours de Luc Besson avait un peu changé : « on essaie de faire de l’emploi au maximum, mais je ne suis pas l’Etat », a-t-il expliqué, oubliant qu’il avait, quelques semaines auparavant, fait la leçon à ce même Etat.

Avec une candeur touchante, il a semblé découvrir le manque de sécurité dans ces quartiers : « une maquilleuse, quand elle vient le matin, ce n’est pas pour se prendre une pierre, s’est-il inquiété. Imaginez que quelque chose se passe et quelqu’un se prenne une pierre ». Le caillassage des équipes de télé dans les quartiers sensibles ne date pourtant pas d’hier. Un journaliste de France 2 a d’ailleurs été roué de coups mardi après-midi alors qu’il enquêtait justement sur l’affaire des véhicules incendiés… On se demande où Luc Besson a passé les 20 dernières années. Sur la planète cinéma, où les voyous, comme Nikita, finissent toujours par troquer leur batte de base ball contre un bâton rouge à lèvres, où les tours et les barres sont de super terrains de jeux pour les Yamakasi ?

En quittant précipitamment la cité des Bosquets, Luc Besson montre qu’il n’a finalement pas autant d’intérêt qu’il le prétendait pour la Seine-Saint-Denis qui semble avoir perdu à ses yeux beaucoup de son glamour. Eh oui Luc, la banlieue ce n’est pas seulement un décor de film. Et la paix sociale, on ne l’achète pas à coups de CDD de figurants à 100 euros par jour.

Source : http://www.marianne2.fr