Egalité et Réconciliation
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Entretien avec Jean-Emile Néaumet, rédacteur en chef de FLASH

L’invité du jour ? Jean-Émile Néaumet, alias Nicolas Gauthier et directeur du journal FLASH, dont nous publions à chaque numéro la une dans notre site.

Journaliste, il est aussi l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages allant du polar à la science-fiction tout en passant par des livres plus “sérieux”, dont des biographies consacrées à Jacques Mesrine (en collaboration avec Philippe Randa), au commissaire Charles Chenevier, l’homme qui traqua les dirigeants de la Cagoule et les Oustachis, Jean-Marie Goron, le policier qui fit tomber Ravachol, sans oublier un autre livre, co-écrit avec le bluesman Patrick Verbeke dédié à Eric Clapton.

Nous le remercions d’avoir accepté de répondre à nos questions.

GENERATION FA8 : Bonjour. Pourriez-vous vous présenter ?

Par principe, je n’aime guère parler de moi. Mais allons-y ! Je suis titulaire d’un CAP d’arts graphiques, mon seul diplôme de Bac moins deux… Je commence comme simple maquettiste au quotidien Présent en 1984. Et j’ai la chance d’apprendre le métier à l’ombre des grands : Jean Madiran, Roland Gaucher de National Hebdo et Jean Bourdier de Minute. Assez tôt, ils me permettent d’écrire mes premiers papiers. Comme je pense être un gros malin, je suis persuadé qu’ils ne remarquent pas que je tente de vampiriser leur style, leurs structures de phrases ; bref, tous leurs petits trucs d’artisans… Plus de dix ans plus tard, j’avoue ma forfaiture à Jean Bourdier qui me répond : “Mon jeune ami, vous ne croyiez tout de même pas que j’étais dupe. Mais je ne connais pas d’autres moyens d’apprendre le métier. D’ailleurs, en mon temps…” Aujourd’hui, à Flash, ce sont sûrement nos petits jeunes, un Antoine Le Nord ou un Jonathan Gabry qui font pareil, tentant de me voler des trucs qui ne sont même pas les miens… Dans le fond, c’est assez politique, tout ça : les sociétés bien ordonnées sont fondées sur la transmission ! Le “mojo” comme disaient les bluesmen de jadis ! Pour le reste, à bientôt cinquante balais, je demeure pantois devant ces années passées si vite. Je n’ai jamais su où je voulais courir, mais je savais assez bien où je ne voulais pas atterrir. On va faire court : je participe ensuite à la création du Choc du mois en décembre 1987, pars après à Minute, fonde Paris Scandale, sorte de Charlie Hebdo de droite de l’époque – on tiendra deux numéros, seulement. Dans la foulée, je seconde Philippe Randa dans l’aventure de son journal Pas de Panique, deviens le nègre de Samuel Maréchal, alors patron du Front national de la jeunesse, me retrouve dans la crise de décembre 1998 avec la tentative de putsch de Bruno Mégret, et deviens l’un des “gardes rouges” de Le Pen. Entre-temps, j’ai beaucoup écrit. Une quinzaine de livres. Trois ans dans la presse rap, tout en gribouillant des sketches pour Canal Plus et en écrivant des chansons pour mon ami Patrick Verbeke, avec lequel j’ai eu l’honneur de co-écrire la première biographie française d’Eric Clapton. Remarquez, il y a aussi un autre texte dont je suis plutôt fier : la rédaction de la profession de foi de Jean-Marie Le Pen pour le second tour de l’élection présidentielle de 2002. Bon, bien sûr, on n’a pas gagné, mais ça a été mon plus gros tirage à ce jour. Quelques dizaines de millions d’exemplaires : plus fort que Paul-Loup Sulitzer !

GENERATION FA8 : Qu’est-ce Flash ? Pourquoi l’avoir appelé ainsi ? Qu’entendez-vous par “Journal gentil et intelligent” ? Quels sont les objectifs de Flash et sa ligne éditoriale ?

La création de Flash, c’est tout bête : la rencontre de journalistes n’ayant plus de journaux dans lesquels s’exprimer. Imaginez une catin sans fesses et vous aurez une assez bonne idée de notre désarroi d’alors. Quant au sous-titre “Gentil et intelligent”, ce n’est rien d’autre qu’une boutade de l’ami Alain Soral qui a fini par se retrouver en une du journal. “Bête et méchant”, c’était “Hara-Kiri”, on a juste voulu faire un clin d’œil, quoi qu’à y mieux réfléchir, la blague d’Alain n’était pas si sotte. Il est un fait que nous tentons d’analyser l’actualité du vaste monde en mettant tout en œuvre pour demeurer “gentils” et “intelligents”. Après, qu’on y arrive ou non, c’est une autre histoire ! Pour être tout à fait honnête, j’avais aussi L’Idiot international de Jean-Edern Hallier en ligne de mire, cet hebdo dans lequel cohabitaient des patriotes venus de tous bords : Alain Soral, déjà, mais Alain de Benoist, également, qui nous a fait l’honneur de rejoindre notre petite équipe. Et également d’autres qui, plus à gauche, écrivent de temps à autre dans notre journal ; je dirais que toutes les opinions et toutes les confessions religieuses, voire même l’absence de confession, sont représentées dans Flash. Nos objectifs ? Défendre nos idées et tenter de vivre à peu près décemment de notre travail. Notre ligne éditoriale ? Si je vous dis qu’elle consiste à défendre les intérêts de la France et de son peuple, ça va faire court pour vos lecteurs. A minima, on dira donc, comme Jacques Bainville jadis, que cette “ligne éditoriale” consiste en grande partie à déterminer qui est le véritable adversaire et le faux ami, qui est l’ennemi premier et l’ennemi secondaire. Bref, à faire notre travail de journalistes et d’analystes de situations de plus en plus complexes, mondialisation oblige. Elle consiste encore à l’un de nos exercices favoris consistant à déboulonner les idoles du moment, ce qui est quasiment un boulot à temps plein.

GENERATION FA8 : Alain Soral est désigné comme le conseiller très spécial de la rédaction ? Qu’est-ce que cela veut dire exactement ? Pour quelles raisons l’avoir choisi ? Partagez-vous l’ensemble de ses analyses et de ses propositions politiques ?

Alain est effectivement un “conseiller (très) spécial” de la rédaction ! Si l’on résume : quand je mets un titre en une et qu’il fait quatre mots, lui arrivera à le réduire à trois. C’est l’un de ses talents spécifiques, sachant qu’il vient de la “grande presse”, qu’il a travaillé dans la publicité, ce qui permet d’avoir une vision plus rigoureuse des choses, laquelle contrebalance assez bien ma tendance à la rêverie et aux phrases parfois trop longues. Et comme il a un caractère, comment dirais-je, assez pétulant, on a trouvé rigolo d’accoler l’adjectif de “très spécial” à ses attributions officielles. Pour le reste, je n’ai pas plus choisi Alain qu’il n’a mis son dévolu sur ma personne. Il se trouve seulement que j’ai été, à “National Hebdo”, défunt hebdomadaire du Front national, l’un des premiers à découvrir son talent d’essayiste. Je pensais et écrivais alors que si cet homme avait de la constance et de la logique, nous finirions par faire un bout de chemin ensemble. Je crois ne m’être pas trompé. Après, à force de mettre tous les deux nos mains dans le même cambouis, il est devenu mon ami et j’espère être devenu le sien. Après, sommes-nous d’accord sur tout, évidemment que non ! C’est Karl Marx qui amène Alain à la défense de la nation ; moi, ce serait plutôt Charles Maurras. Je suis plus royaliste que lui et lui plus républicain que moi. Il a tendance à plus voir les situations au prisme du social et de l’économie, c’est son côté “gauche du travail” alors que je privilégierais plutôt une vision culturelle, religieuse, ethnique parfois, c’est-à-dire “essentialiste” des peuples, ça doit être ma sensibilité “droite des valeurs”… Pour le reste, nous sommes généralement d’accord sur l’essentiel, et j’adore l’entendre défendre l’Ancien régime avec des arguments marxistes ! Pour le reste, même si Alain demeure le plus connu de notre équipe, on ne saurait résumer Flash à sa seule personne. Un journal est certes une entreprise, mais une entreprise, ce sont avant tout des hommes et des femmes, avec leurs talents, leur personnalité, leur sensibilité propres. Politique qui nous permet de rester à l’écart des inévitables luttes de chapelles.

GENERATION FA8 : Certains parlent d’islamisation de la France, d’autres de son américanisation. Nous pensons qu’il y a du vrai dans ces deux formules et qu’elles représentent parfaitement les menaces pour l’intégrité culturelle de notre civilisation. Qu’en pensez-vous ?

Formé, malgré une scolarité pour la moins pitoyable, par la pensée maurrassienne, thomiste et aristotélicienne, lesquelles enseignent qu’on part du réel pour aller au concept et non le contraire, je répondrais seulement ceci : Quand vous regardez TF1 ou Canal Plus, vous voyez quoi, l’islam ou l’Amérique ? Sont-ce les intellectuels musulmans qui monopolisent plateaux et temps d’antenne, où des journalistes et hommes politiques transpirants, certes dans leurs fonctions respectives, mais pas toujours pour les intérêts de la France. Bref, qui voit-on le plus ? Bernard Kouchner ou Tariq Ramadan ? Qui est au Quai d’Orsay ? Qui a le vrai pouvoir ? Ensuite, ces deux phénomènes sont de nature différente. L’un est induit par une stratégie géopolitique, celle des USA, menée de longue date, dont l’impérialisme culturel – Hollywood travaille main dans la main avec la Maison blanche depuis 1917 – n’est qu’une des facettes ; l’autre est issu d’une immigration de masse organisée, elle aussi de longue date, par un grand patronat qui participe lui aussi de la même vision d’un capitalisme mondialisé n’étant plus aujourd’hui équilibré par le contrepoids jadis exercé par l’URSS. D’un côté donc, un projet de domination planétaire, les pères fondateurs des USA ayant été dès l’origine persuadés d’avoir vocation à devenir les guides et les gendarmes du monde ; de l’autre, des gueux importés par wagons entiers afin de tirer à la baisse les salaires des ouvriers français. Si stratégie concertée il y a, elle est plus à chercher du côté de ces patrons voyous et irresponsables que de l’Arabe ou du Maghrébin à qui les mêmes ont fait miroiter une vie meilleure en Europe. Vous remarquerez à ce sujet que le système est devenu si perfectionné que les princes du CAC 40 n’ont même plus besoin d’aller les chercher ces nouveaux esclaves : ils viennent d’eux-mêmes ! Si l’islam pose des problèmes en France, c’est parce qu’il y a beaucoup d’immigrés de confession musulmane. Qui, de surcroît, sont pauvres et sur représentés dans la population carcérale ; un peu comme les mafieux italiens, les cartels sud-américains ou les gangs hispaniques, tous de culture catholique et qui bénéficient à peu près de la même réputation aux États-Unis, sachant que le crime organisé mondial est majoritairement chrétien, ce qui ne fait pourtant pas du christianisme une religion criminogène… Il y a mille fois plus de Français qui se convertissent au bouddhisme qu’à l’islam. Mais le bouddhisme, même s’il est bien plus étranger à la culture française que l’islam, c’est un truc de riches du showbiz : Richard Gere ou Véronique Jeannot, ça fera toujours plus rêver que l’épicier arabe du coin, même si le bouddhisme, dans sa forme tibétaine, la plus populaire, demeure une théocratie dans laquelle les femmes comptent à peine moins que les yacks. De fait, il ne s’agit que d’un phénomène mécanique : quand vous avez beaucoup d’homosexuels dans le Marais, les couples hétérosexuels finiront par s’y sentir mal à l’aise. Idem dans les quartiers chinois de Paris où le Français de souche se sent pareillement isolé, avec des marchands de nems à tous les coins de rue, tandis qu’il faut se farcir deux kilomètres à pied pour acheter une simple baguette. On peut décliner ce constat sociologique – à partir de 10 à 15 % de population exogène, la majorité n’assimile plus la minorité et finit par se “penser” comme une minorité dans un pays où elle est encore largement majoritaire –, mais cela n’induit en rien une stratégie de conquête messianique, pas plus pour les invertis du Marais, que les Asiatiques du XIIIe, voire même les Antillais de la Nation ; à ce bémol près que les lobbies entendant représenter les homosexuels pratiquent un lobbying législatif autrement plus intensif qu’un prétendu lobby musulman qui, d’ailleurs, n’existe que sur le papier… Après cette longue mais indispensable digression, je dirais, pour répondre à votre question qu’islamisation et américanisation, même si elles “agressent” toutes deux l’identité française, ne le font pas au même degré de profondeur et pas pour les mêmes raisons. Pour l’une, il s’agit d’un principe de volonté et pour l’autre, d’un seul principe d’opportunité.

GENERATION FA8 : Beaucoup pensent que lorsque les musulmans seront majoritaires dans des villages ou des villes de France, la charia remplacera le droit français. C’est déjà le cas en Angleterre. En Belgique, mais aussi en France, des quartiers entiers sont sous domination musulmane. Il est très dur pour les non-musulmans et les européens d’y vivre, voire de les traverser. Que pensez-vous de tout cela ?

Je pense que votre question, certes pertinente, est mal posée. Tout d’abord, parce qu’une nouvelle fois, vous mettez sur le même pied deux phénomènes de nature différente. Et puisque vous me faites la courtoisie de m’interroger, je prendrai le temps de vous répondre en détail. Premièrement, dans les quartiers que vous évoquez, que ce soit à Londres ou à Bruxelles, les associations musulmanes n’exigent pas que le droit musulman remplace le droit local, mais qu’il puisse cohabiter avec ce dernier. C’est le communautarisme, d’ailleurs fortement encouragé en Angleterre, parce qu’en partie à la base de son droit, ou en Belgique, pour d’autres raisons, sachant que l’État est là-bas, par l’histoire, à fondement bi-national, bi-linguistique et bi-culturel, n’est pas à même d’imposer un droit “unique” tel que jusqu’alors en France. Deuxièmement, quand vous évoquez le cas français, il s’agit encore d’un autre phénomène et il convient là de procéder à un petit retour en arrière. Je précise être né en banlieue, avoir grandi aux abords des cités et avoir vécu ensuite plus de quinze ans dans le XVIIIe arrondissement parisien, soit dans les lieux où les “Gaulois” étaient rarement majoritaires. Mon expérience n’a donc rien de livresque et j’ai bien connu les quartiers que vous évoquez. Résumons : dans les années 70, les “arabo-musulmans” rasaient les murs pour rentrer le soir dans leurs “cités d’urgence”, tel qu’on disait alors, pour ne pas dire “bidonvilles”. La décennie suivante, grâce ou à cause du regroupement familial mis en place par le gouvernement Giscard/Chirac, ces immigrés ont pu faire des enfants sur le territoire national. On remarquera déjà qu’ils étaient fascinés par le modèle américain – aujourd’hui, le rap ; hier Elvis Presley – et que la violence était déjà là, même si la question de l’islam ne se posait pas. Tout ce gâte dans les années 90. Avec l’arrivée massive du trafic de drogue et, surtout, celle du consumérisme généralisé, véritable machine à produire de la frustration, publicité qui montre la femme qu’on ne sautera jamais ou le beau gosse qu’on ne sera jamais, parce que les fringues qu’il porte, à moins de les voler, jamais on aura les moyens de se les offrir. Et c’est précisément dans ces année-là que la vie devient impossible, dans le XVIIIe arrondissement de Paris, par exemple. Et, même s’il s’agit à vos yeux d’un paradoxe, c’est justement dans les endroits où l’islam prend de plus en plus de place que l’insécurité recule. Pour faire court : le Beur déculturé et qui biberonne au gangsta rap, quand il te bouscule, il te taxe ton blouson au passage. Le même dans sa version “islamiste”, il présente ses excuses pour t’avoir importuné. Après, cela pose un autre problème : si le consumérisme poussant les jeunes à adopter la culture des gangs américains crée des zones de non-droit ; le retour à une culture archaïque conduit à de véritables enclaves étrangères ; certes calmes, mais dans lesquelles notre Bitru national finit par se sentir, ce qui est bien compréhensible, étranger dans son propre pays. Néanmoins, ce retour à la culture ancestrale, archaïque, fort proche de celle que nous avons abandonnée en France – nos grands-mères sortaient voilées, on ne plaisantait pas avec l’autorité du père et les filles étaient censées arriver vierges au mariage – peut annoncer un cycle nouveau. La jeunesse issue de l’immigration est partie de zéro, puisque ignorante de sa culture d’origine et incapable de maîtriser celle d’accueil. Et il n’est pas impossible que ce soit en revenant à la première qu’elle puisse accéder à la seconde. Quand on connaît al-Ghazali, court est le chemin qui te mène à Molière ou à saint Thomas d’Aquin… mais si tu ne connais que NTM et la Star Ac… Bon, après, on peut toujours rêver de Reconquista et chanter Les Lansquenets à quatre dans une Twingo. Voilà pourquoi dans Flash, même si nous ne sommes pas toujours compris, nous persistons à partir du réel pour aller vers le possible, la politique étant malheureusement souvent le choix entre le préférable et le détestable… De toutes manières, les guerres civiles ne connaissent jamais de vainqueur, tout le monde y perd !

GENERATION FA8 : Alain Soral a exprimé que le problème ne venait pas de la culture et des idées développées par l’islam, mais qu’il s’expliquerait par le nombre de musulmans. Est-ce aussi votre avis ? Ne pensez-vous pas que l’islam pose intrinsèquement problème ?

Je suis évidemment d’accord avec Alain sur votre première question. Pour la seconde, je répondrais que, par nature, chaque problème est intrinsèque. Je vais prendre un autre exemple. Dans ma vie, j’ai eu la chance de beaucoup voyager. J’ai longtemps vécu en Californie, au début des années 80. À l’époque, il y avait à Los Angeles trois quotidiens hispanophones. La dernière fois que j’y suis retourné, en 2002, il y en avait plus de dix. Il ne s’agit pas d’un autre plan concerté de Reconquista à l’envers, ourdi par des Indiens catholiques voulant reprendre possession de terres dont ils ont été chassés par des protestants anglo-saxons ; mais seulement d’un autre cas d’immigration massive – là aussi largement encouragé par le grand patronat local : sans l’immigration mexicaine, l’agriculture californienne s’effondre du jour au lendemain. Et comme ces Indiens catholiques tendent à devenir majoritaires, leur mode de vie se répand par une sorte de capillarité naturelle. Après, vous auriez pu me poser cette question, mais je me la pose à votre place : “ Le problème de l’islam est qu’il ne fait pas la différence entre le politique est le religieux…” C’est à peu près vrai dans Le Coran, quoique dans Le Coran, on finit toujours par y dénicher ce que l’on entend y trouver. Tout cela pour vous dire que si les musulmans – même dans leur version la plus “littéraliste”, celle des wahhabites séoudiens, les meilleurs alliés des Américains, soit dit en passant –, on sait très bien rendre à César et à Allah ce qui leur revient de droit. Autrement, le pieux roi séoudien n’aurait pas accepté des bases américaines sur le sol national – un peu comme si l’armée algérienne installait ses baraquements au Vatican… – et que même si les religieux piaillent, la raison d’État conserve toute sa primauté. Ensuite, au risque de blesser mes amis musulmans, je dirai ceci : l’islam n’existe pas et l’Oumma est une farce aussi aimable que la Communauté des croyants chère aux catholiques, communauté dont je suis, je tiens à le préciser. Ainsi, c’est un peu le problème avec certains courants “d’extrême droite’ consistant à surestimer “l’adversaire”. À considérer, en la circonstance, que l’islam est unique – le Dieu des musulmans l’est, mais il est malheureusement bien le seul ! – et qu’on puisse le comparer, en termes de visées hégémoniques, à la défunte URSS. Celle-là, malgré ses frontières, sa capitale, son organigramme officiel et sa stratégie globale, était pourtant traversée de courants antagonistes, entre panslavisme et désir de renouer avec l’Ouest du continent… Alors, imaginez l’islam ! Encore plus émietté que le catholicisme qui, nonobstant la hiérarchie vaticane, présente un spectre politico-religieux allant de Jacques Gaillot à monseigneur Williamson ! Les musulmans, c’est pareil à la puissance mille ! Évidemment, on peut toujours exhumer telle ou telle déclaration d’un cheikh libanais ayant un peu trop tiré sur le narguilé qui assure doctement qu’un jour la France sera une république islamique, tout comme Lénine pensait envahir l’Europe en la contournant par l’Afrique. Voilà qui prouve juste que certains crétins ne disent pas que des inepties, mais qu’ils en écrivent aussi ! Et que je ne vois surtout pas pourquoi on devrait accorder plus que ça de crédit à des allégations en permanence démenties par la réalité. Je sais qu’il s’agit là d’un sujet sensible pour certains et loin de moi l’idée de brusquer vos lecteurs. Mais je m’étonne seulement du tollé provoqué par un entretien que Jean-Marie Le Pen nous a accordé, à l’occasion duquel il affirmait, au nom du simple bon sens, que les cinq piliers de l’islam – croire en Allah, faire ses cinq prières quotidiennes, pratiquer la charité le vendredi, respecter le Ramadan et faire, si possible, un pèlerinage annuel à la Mecque – étaient compatibles avec la vie en société française. Nombre de mes amis musulmans respectent ces cinq piliers et cela ne les empêche nullement de voter Le Pen, signe d’assimilation manifeste, vous en conviendrez !

GENERATION FA8 : Depuis que l’Occident est rentré en contact avec l’islam il a toujours été question de guerres et de conflits. La situation pourrait-elle être autre aujourd’hui ? Et si oui, pourquoi ?

Ce n’est pas faux, mais cela vaut tout autant, si ce n’est plus avec l’Angleterre (des siècles de conflit) ou l’Allemagne (deux guerres mondiales) et il s’agit pourtant de pays européens, de race blanche, de religion chrétienne et de culture gréco-latine, comme l’assurait un général bien connu. Et que dire de l’Irlande, où les mêmes rouquins, buveurs de bière et poseurs de bombes se massacrent allègrement depuis près d’un siècle ! Remarquez, si les Européens n’ont jamais eu besoin de personne pour se ridiculiser et mettre la planète à feu et à sang, les Orientaux sont également assez forts dans le domaine… En revanche, aujourd’hui, face à une mondialisation de plus en plus uniformisatrice, oui, pourquoi pas, tel que le préconisait déjà Alain de Benoist dans son remarquable essai “Europe Tiers monde même combat”, envisager d’autres alliances ? Et ce pour deux raisons. La première est d’ordre intellectuel et religieux : les sociétés fondées sur la transcendance, les nôtres un peu moins – l’esprit consumériste est passé par là – que leurs homologues musulmanes n’auraient-elles pas vocation à créer une sorte de “Front du sacré” contre celui du “Veau d’or” ? La seconde serait d’ordre plus politique et stratégique : pourquoi s’obstiner à s’allier avec des puissances déclinantes, tels les USA – qui, de plus, se sont construits “contre” la Vieille Europe – alors que des puissances émergeantes, au pis neutre ou au mieux, bienveillantes ? À ce titre, je vous rappelle que toutes les attaques anticatholiques (Pie XII, Da Vinci Code, etc.), nous viennent de ce grand ensemble “chrétien” qu’est l’empire états-unien, et pas du monde musulman, dans lequel ces polémiques ne sont pas de mise et où les livres et les films les relayant sont systématiquement interdits… Ce que je vois aussi, c’est ce que nous apprend la lecture de George Orwell et sa minute de haine quotidienne. Avant, c’était la haine anti-FN ; désormais, c’est la haine anti-islam. Avec ce paradoxe consistant à retrouver une Caroline Fourest et un BHL, unis contre Le Pen et qui désormais en sont à vouloir faire interdire Tariq Ramadan et Dieudonné ; ce au nom de la liberté d’expression, tel qu’il se doit. Comme défenseurs de l’Occident chrétien, il y a peut-être mieux qu’un faux philosophe et une pigiste de Charlie Hebdo !

GENERATION FA8 : Aujourd’hui beaucoup voudraient agir politiquement mais ne savent pas quoi faire et comment. Que leur diriez-vous ? La situation ne se trouve-t-elle pas d’ores et déjà perdue ?

Je leur dirai seulement ceci : il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer. Que trois fois rien, c’est toujours quelque chose. Que notre devoir est de demeurer fidèles, envers et contre tout, aux hommes que nous sommes. Que rien n’est jamais perdu. Que Rome est tombée mais que l’Italie est toujours là. Que les choses renaissent immanquablement sous une autre forme. Que la France des années 60, celle que j’ai connue gamin est certes morte, mais qu’autre chose adviendra. Un truc qui sera sûrement différent, mais à vous d’agir aussi pour qu’il soit à votre goût…

GENERATION FA8 : Quel sera votre mot de la fin ?

Au risque de me répéter : je ne sais pas forcément où je veux aller, mais je sais fort bien là où je ne veux pas aller.