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L’"ermite" nord-coréen de nouveau en Russie

Le train de l’ermite nord-coréen, qui traverse le territoire russe, suscite beaucoup de curiosité auprès de ceux qui connaissent la rareté des voyages du président nord-coréen à l’étranger.

Cependant, il ne faut pas attendre de progrès particuliers et d’événements décisifs de cette visite. En y regardant de plus près, l’ordre du jour de cette dernière était fixé depuis plusieurs semaines et concerne avant tout les voies de communications et les gazoducs. En ce qui concerne les problèmes des programmes nucléaires de la Corée du Nord, peu de choses pourront être décidées lors de la rencontre bilatérale entre les présidents russe et coréen, car il s’agit d’une question relevant de négociations internationales multilatérales.

Les années perdues

La situation dans la péninsule coréenne a été gelée dans tous les sens du terme à partir de 2002-2003, lorsqu’a commencé la longue procédure d’accusation de Pyongyang : Washington parlait de l’existence des programmes nucléaires nord-coréens secrets que Pyongyang développait en dépit des accords en vigueur à l’époque avec les Etats-Unis. Aucune preuve tangible de l’existence de ces programmes n’a été apportée depuis, et personne n’en a réellement besoin : entraîné dans le scandale, le gouvernement nord-coréen a ouvertement commencé à développer de tels programmes et possède à l’heure actuelle des ogives nucléaires.

Mais quelle était la situation nord-coréenne en 2002 ? Le pays a essayé de mettre en œuvre des réformes économiques selon le modèle vietnamien. On discutait activement les options d’intégration du Nord et du Sud de la Corée, on parlait des délais de leur possible réunification (on disait souvent que cela prendrait 50 ans), les voies ferroviaires des deux pays ont été reliées dans la zone démilitarisée (à la frontière) dans une ambiance solennelle.

Cette histoire concernait directement la Russie, car il était question du raccordement du Transsibérien au chemin de fer transcoréen. Le projet ferroviaire, arrêté en 2001 lorsque Kim Jong-Il a rencontré en Russie le président Vladimir Poutine, promettait non seulement beaucoup d’avantages de transit à tous les participants, mais serait également devenu l’axe logistique du futur développement du Nord de la Corée grâce aux efforts internationaux. Ainsi que l’axe de toutes les relations économiques Russie-Corée du Nord, qui ont actuellement une importance tout au plus locale (pour l’Extrême-Orient russe).

Kim Jong-Il et Vladimir Poutine se sont ensuite rencontrés en 2002 à Vladivostok, et on y a également principalement parlé du chemin de fer. Il était clair que le régime "stalinien" de la Corée du Nord commençait à subir une transformation avec le soutien de tous ses trois voisins (la Russie, la Chine, la Corée du Sud).

Or, l’affaire est restée bloquée à cette étape pendant 9 ans (en raison du scandale nucléaire), et aujourd’hui tous les signes montrent qu’on retourne à cette même étape. Bien qu’une nouvelle idée soit apparue : le gazoduc transcoréen.

Un gazoduc longeant le chemin de fer

Le projet appartient au russe Gazprom et concerne la fourniture de gaz à la Corée du Sud. Les sources étrangères estiment les volumes à 10 milliards de mètres cubes de gaz par an pendant 30 ans. Et la Corée du Nord aura également besoin du gaz. Il s’agit de la politique russe de diversification des fournitures de gaz non seulement grâce à l’augmentation des fournitures en Orient, mais également en élargissant le cercle des clients dans cette région. Les négociations avec la Chine avancent difficilement, mais ce n’est pas le seul pays de la région.

Cependant, le gazoduc reliant la Russie et le Sud de la péninsule coréenne peut être construit seulement en passant par le Nord. Pour cette raison depuis plusieurs mois Moscou négocie le projet avec Séoul et Pyongyang, notamment le fait qu’il serait plus pratique de travailler sur le chemin de fer et de construire le gazoduc parallèlement à celui-ci.

Fin juin, certains parlaient de la visite de Kim Jong-Il à Vladivostok, mais à l’époque ce n’était que des rumeurs. Toutefois, il était difficile de ne pas remarquer les déclarations des diplomates russes haut placés qui mentionnaient le fait que Kim Jong-Il était depuis longtemps invité, et qu’il ne restait plus qu’à déterminer le lieu et la date. En ce qui concerne le lieu, les Sud-coréens estiment que Kim Jong-Il et Dmitri Medvedev se rencontreront mardi à Oulan-Oude (ville russe à proximité de la frontière mongole – ndlr). Les sources russes ne se prononcent pas à ce sujet, bien que le site présidentiel annonce que Kim Jong-Il visitera seulement les districts fédéraux russes de Sibérie et d’Extrême-Orient.

L’économie aidera la politique

On peut supposer quels seront les autres sujets abordés par les deux chefs d’Etat. Par exemple, leur coopération économique qui pourrait être un bon moyen de changer la situation de la sécurité dans la région, qui a bougé du point mort, de manière à ce que les négociations multilatérales internationales sur le problème nucléaire s’accélèrent.

Bien sûr, à une époque, Pyongyang avait des raisons de soupçonner l’initiateur de l’histoire "nucléaire", le président américain George W. Bush, de vouloir écraser le régime nord-coréen (de la même manière que l’irakien ou l’iranien, tous les trois ont été qualifiés par Bush d’axe du mal et de créateurs de la bombe nucléaire). Et les raisons de s’inquiéter étaient d’autant plus tangibles lorsque Bush a envahi l’Irak, sous le coup d’accusations similaires (qui n’ont jamais été prouvées). Toutefois, le fait même de la mise en place des négociations à Six après le début du scandale nucléaire, c’est-à-dire l’apparition d’un groupe de médiateurs forts entre les Etats-Unis et la Corée du Nord, aurait dû convaincre la Corée du Nord qu’elle ne connaîtrait pas le scénario irakien.

Actuellement, on peut parler non plus seulement du rôle de médiateur de la Russie dans cette histoire, mais également du fait que la normalisation des relations entre Moscou et Washington donne des raisons à la Corée du Nord d’être plus confiante. Et de croire, comme dix ans auparavant, que l’on souhaite l’impliquer dans une large coopération régionale qui contribuera à régler toutes les questions sécuritaires.

 






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2 Commentaires

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  • #40334
    Le 24 août 2011 à 17:13 par kirikou
    L’"ermite" nord-coréen de nouveau en Russie

    Pourquoi l’OTAN le laisse tranquille ce fou à lier de Kim Jong Il ?
    je ne pense pas que les nord coréens vivent aussi bien que les libyens sous le régime de Kadhafi

     

    Répondre à ce message

    • #40473
      Le Août 2011 à 00:13 par Varlaam
      L’"ermite" nord-coréen de nouveau en Russie

      Aucun intérêt pour l’OTAN et sa clique d’intervenir en Corée du Nord, au contraire.

      La "menace" de ce pays permet aux USA de maintenir des bases en Corée du Sud et au Japon et ce dans le but de garder un œil sur la Chine et la Russie.

      "On s’installe chez vous pour vous protéger du grand méchant Kim Jong Il"

      D’ailleurs, à chaque fois que la Corée du Nord a fait parler d’elle, c’est souvent peu après des négociations en vue de retirer les bases américaines du Japon...