Egalité et Réconciliation
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"La façon la plus simple de désobéir à la finance, c’est de refuser de payer les dettes"

Entretien avec David Graeber

La dette ? Une construction sociale, fondatrice d’un pouvoir arbitraire, estime David Graeber, anthropologue et économiste états-unien, considéré par le New York Times comme l’un des intellectuels les plus influents actuellement.

Les pays pauvres et les personnes endettées sont aujourd’hui enchaînés aux systèmes de crédit. Piégés dans des relations basées sur la violence, les inégalités et justifiées par la morale, décrit l’auteur, dans un ouvrage qui retrace 5000 ans d’histoire de la dette. « Rembourser ses dettes » est devenu un dogme, impossible à contester. Et si, malgré tout, on décidait d’effacer l’ardoise ? Avec le mouvement Occupy Wall Street, David Graeber lance des actions de désobéissance civile pour démontrer l’absurdité du système capitaliste actuel. Entretien.

 

Basta ! : À quel moment dans l’histoire le crédit est-il apparu ? Qu’est-ce qu’une dette ?

David Graeber : La dette est une promesse, qui a été pervertie par les mathématiques et la violence. On nous a raconté une histoire : « Il était une fois des gens qui utilisaient le troc. Voyant que cela ne marchait pas très bien, ils ont créé la monnaie. Et l’argent nous a amené le crédit. » Du troc au crédit, une sorte de ligne droite nous amènerait donc à la situation actuelle. Si on regarde plus attentivement l’histoire, cela s’est passé bien différemment ! Le crédit a d’abord été créé. La monnaie physique est apparue quelques milliers d’années plus tard. Cela permet de poser les questions différemment : comment sommes-nous passés d’un système où les gens disaient « je vous dois une vache », à un système où l’on peut mesurer la valeur exacte d’une dette ? Ou l’on peut assurer, formule mathématique à l’appui, que « 340 poulets sont équivalents à cinq vaches » ? Comment une promesse, une obligation de remboursement, est devenue une « dette » ? Comment l’idée que nous devons une faveur a-t-elle été quantifiée ?

En quoi quantifier une dette est-il un problème ?

Quantifiable, la dette devient froide, impersonnelle et surtout transférable : l’identité du créancier n’a pas vraiment d’importance. Si je promets de vous rencontrer à cinq heures demain, vous ne pouvez pas donner cette promesse à quelqu’un d’autre. Parce que la dette est impersonnelle, parce qu’elle peut être exigible par des mécanismes impersonnels, elle peut être transférée à une autre personne. Sans ces mécanismes, la dette est quelque chose de très différent. C’est une promesse qui repose sur la confiance. Et une promesse, ce n’est pas la négation de la liberté, au contraire, c’est l’essence de la liberté ! Être libre, c’est justement avoir la capacité de faire des promesses. Les esclaves ne peuvent pas en faire, ils ne peuvent pas prendre d’engagements auprès d’autres personnes, car ils ne sont pas sûrs de pouvoir les tenir. Être libre, c’est pouvoir s’engager auprès d’autrui.

Lire la suite de l’entretien sur bastamag.net

Sur la dette, chez Kontre Kulture :

 






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39 Commentaires

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  • Bonjour,
    je rejoins parfaitement votre point de vue !
    A propos de dettes ! Il faudrait insister sur le fait que la planche à billets de dollars
    tourne à plein rendement permettant ainsi aux pays occidentaux (entre autre) de continuer à s’endetter
    en ne remboursant aux banques que des intérêts qui représentent des milliards sur le plan mondial
    sans jamais pouvoir rembourser le capital !
    Ces intérêts versés aux banques servent à racheter des terres, des forêts, des mines, ...... , des gens,
    des peuples et des même des Etats (peut-être comme le France) : cet argent est produit par elles-même et
    n’a de valeur que celle estimée par elles-même (la FED par ex.)
    Le jour , pas très lointain, où elles décideront que l’argent ne vaudra plus rien (29 à 33) les documents de propriétés,
    cités ci-avant,seront bien réels et les Etats , c’est à dire nous, mis ainsi en faillite devront céder leurs avoirs
    y compris économies et bien personnels ! Seul les financiers organisateurs de la débâcle resteront riches :
    Penchez-vous sur la faillite des "Assignats du système LAW" et notez ce petit extrait :
    "Et politiquement et socialement, les assignats réalisèrent surtout un important transfert de propriétés en un temps très réduit.
    Ainsi, les assignats attachèrent au nouveau régime tous les acquéreurs de biens nationaux, et cette nouvelle bourgeoisie foncière redoutera désormais le retour de la Monarchie.*"
    (*trouvé sur Wikipedia)
    Et si vous avez un peu de temps intéressez vous à la famille "FUGGER" ’(dont Jacob) "faiseuse de guerres et de Roi !

    Bonne année !

     

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  • Quand est-ce qu’ ER fonde sa propre banque ??

     

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  • La peur terrifiante de Goldman Sachs : Que la banque du Quatar ouvre ses propres "marchés financiers" (désolé je ne suis pas assez calé pour en connaitre les vrais mécanismes mais en gros c’est ce genre !) avec sa conversion de devises étrangères.... (on va dire... pardon auprès de économistes libres qui fréquentent le site si j’emploie pas les bons termes) et SANS INTERET de pénalité (parce que le temps appartient à ALLAH !).....

    La banque Tunisienne.... allait débuter une petite réforme.... mais "manque de chance" : le printemps arabe est survenu... et la banque fut sous "tutelle".... pas mal non ????

     

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  • de refuser de payer les dettes à la Chine veut-il dire ?...

     

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  • Quoi qu’il arrive, vous vous devez de rembourser un prêt.
    Le problème se situe autour des intérêts.

     

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  • Je me souviens avoir entendu Attali dire dans une émission : "La France a des dettes, elle doit les payer".

     

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  • Sombart dans "les juifs et la vie économique" donne même l’historique détaillé de la dépersonnalisation de la dette, mais aussi de la lettre de change qui a permis la création des marchés boursiers puis de tous les outils financiers.
    pour faire court : cela se produit grâce a la substitution progressive du droit Saxon (incluant le droit romain) au droit judaïque. lisez ce livre, c’est un incontournable pour expliquer la création de la finance, le moteur diabolique du capitalisme
    il faut rappeler que la dette en soi n’est pas un problème, au contraire elle est fondée à l’origine sur la solidarité et l’honneur,
    exemple simple : j’ai pas de pain, je vais en emprunter à mon voisin qui en a assez pour m’en filer un bout, le lendemain je le lui rends.
    pas question d’intérêt,
    pas question de lui refiler un oeuf à la place
    une dette simple fonctionnelle,
    mon voisin me prête par solidarité,
    je lui rends pour garder mon honneur.

     

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    • Pas lu mais je l’ai encore sous plastique :)

      C’est la dé-personnification (en bout de papier ligne comptable matérialisée en elle même qui est problème)
      puis l’échange marché trafic (ce bout de papier se négocie entre banquier)
      qui a amené à ce genre de dérive à la con dans laquelle on est empêtré et esclave.

      Tu as raison la dette en soi, n’est pas un problème, je te doit un bout de pain point, mais dès que ça spécule et échafaude des trucs autour aie ...

      ER devrait monter un Système d’Hawala (je regarde ça en ce moment),
      * pas de banque centrale
      * un registre de dettes entre transféreurs (juste les fluxs)
      * et de la confiance (peut-être que la ça bloque), ben oui quand les gens s’appellent frères ça aide ...
      http://www.loretlargent.info/tag/hawala/

      Laissez de coté la coté terroriste qui est un peu de la propagande des agents du système pour nous détourner de ça ...

       
  • cet article est hyper-intéressant, abordant la nocivité essentielle de la dématérialisation (axiomatisation ensuite poussée à outrance) de la Dette au fil du temps !...beaucoup d’idées communes avec celles présentes dans le livre-phare d’Alain Soral " Comprendre l’Empire ", notamment la quantification progressive et la " moralisation " de la dette, sa préservation à l’aide de la force qui sous-tend les rapports de force inégaux entre les pays ou entre une banque et le citoyen...article passionnant, original et foisonnant...important la désobéissance civile américaine, protégée par la Constitution...mais dont l’auteur David Graeber prévient que le coup d’arrêt viendra sitôt une masse critique de gens éveillés et devenue dangereuse pour le Système...néanmoins, à suivre cette affaire de rachat de la dette du peuple par lui-même pour mieux l’annuler, et ainsi couper l’herbe sous le pied de l’état-financier spoliateur...mettre en relation ces mouvements civiques réels, Occupy Wall Street avec le combat d’un Bruno Boulefkhad en France, qui est aussi celui de Farida Belghoul...notre combat...à mon avis l’un des articles les plus puissants (car aussi très didactique) trouvés sur E&R concernant la Banque et son pouvoir tentaculaire sur nos vies et l’avenir du monde.

     

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    • Cette opération de rachat de dettes est extra ... quand tu penses qu’une dette peut se racheter à 1/20eme de son "nominal" (je crois qu’on dit comme ça) ... c’est mieux que s’apitoyer son sort / son chiffre ...

      Ce qui fait un peu froid dans le dos et qui montre que des banquiers sont bien à poil c’est qu’il laisse racheter leurs dettes à ce prix, c’est dire si ils les pensent pourries !

       
  • ou la rééchelonner , je suis étonné de n"avoir jamais entendu un quidam proposer cette solution. En effet lorsqu’un ménage endetté, a, pour un raison ou pour une autre, une forte baisse de revenu, c’est tout naturellement qu’ils vont voire leur banquier pour renégocier leurs emprunts, pourquoi ne serait ce pas possible pour un état. Je ne comprend pas pourquoi personne je dis bien personne n’ai jamais envisagé cette solution.

     

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  • d’un point de vue droit : la banque c’est un produit de consommation ...
    obligatoire 8-| (il faut un compte bancaire loi !)
    mais aussi discriminent, car des banques choisissent leurs clients ! (revenus, patrimoine, ratios)
    Comment se prémunir du refus de vente interdit par le code du commerce ?
    Ben c’est contourné par la banque de France qui peut forcer un établissement à vous prendre.
    C’est tordu mais on voit qui à les manettes et qui a collaboré à ...

    Historiquement, la dette va au bout de sa logique :
    * Rome n’a pas fait de réforme de redistribution des terres, les invasions barbares s’en sont chargés
    * les révoltés d’en bas 89 en France on cherché les terriers, l’ancien régime ne s’étant pas réformé seul
    ...

    Annuler de la dette c’est biaisé les choses, à mon sens ça va bricoler jusqu’au bout :
    * sinon à moi tout les prêts sachant qu’il me seront annulé, c’est pas vertueux !
    * quel différence entre le gros consommateur porcin et l’écureuil, y en a un qui a moins joui et qui se fait enculer ... (bon ok ça fait parti du système aussi)
    C’est avec ces comportements qu’on devienne si on ira au mieux ou au pire de la situation actuelle ... En tout cas se sera violent ...

     

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