Egalité et Réconciliation
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Le chasseur Gros beauf ou résistant ?

Il est là… posté au coin du bois. Ses sens sont aux aguets. Ses mains sont serrées sur sa carabine, prêt à l’épauler. Une gitane maïs éteinte tourne et retourne entre ses lèvres. Au loin, le rabat vient de débuter. Cris, coups de pibole, aboiement des chiens, la chasse est lancée.

Une compagnie de sangliers est levée. Quelques minutes plus tard, les « cochons » lui passent à vingt mètres en plein travers. Deux coups de feu, un animal est touché. Mauvaise balle. Le suidé tombe, se relève et disparaît. Les chiens arrivent à leur tour, suivis des traqueurs. Suant, hurlant, ils courent en encourageant leurs auxiliaires. Des hurlements leur répondent. La bête blessée fait face. N’ayant plus les moyens de fuir, elle accepte le combat. Les chiens l’entourent. Un coup de dague met fin à cette mêlée.

Le chasseur… Encore là, toujours vivant, recrutant encore, il n’a pas disparu. Et pourtant, depuis quarante ans, il est une des premières cibles de l’idéologie soixante-huitarde. La cible n’en est que trop belle : archétype parfait du gros beauf, il doit disparaître. L’offensive a débuté avec les livres pour enfant. Il en a rapidement été supprimé. Même l’histoire du petit chaperon rouge a été revisitée. Dorénavant, le méchant loup n’est plus trucidé par un nemrod. Ce sont les « petits amis de la forêt », qui viennent la nuit ouvrir le ventre du méchant canidé et délivrer grand-mère et petite fille. Parfois, il réapparaît. C’est pour avoir le mauvais rôle. Dans « Rox et Rouky », Walt Disney n’aime pas les chasseurs.

Rarement, une population aura été aussi stigmatisée. En solidarité avec notre BB nationale, les artistes s’y mettent. Entre deux cures de désintoxication alcoolique, Renaud gagnera la palme : « …même dans les rangs des chasseurs, qui dégomment la tourterelle, et occasionnellement les beurs… »

Diable, le voilà, maintenant milicien d’extrême droite et raciste… Fini, le temps où Jean Ferrat chantait ces paysans à la vie saine et rude qui s’en allaient « chasser la caille ou la perdrix ». A cette propagande, se joint une guérilla juridique. La moindre date d’ouverture est attaquée devant les tribunaux.

Quand en 1998, trois cent mille chasseurs, fatigués de cette stigmatisation constante, déboulent dans Paris. L’inénarrable Alexandre Adler ne retiendra dans « Courrier International », que le témoignage d’un touriste américain (entre gens du même monde…) s’insurgeant sur les quelques bouteilles vides laissées sur le parcours. Et en plus ils picolent…

La réaction se fait attendre. Rien à espérer des médias, Christophe Dechavanne, pourtant propriétaire de 300 hectares en Sologne préfère parler des préservatifs… les autres se planquent. Le politiquement correct fait son œuvre. Les instances cynégétiques adoptent un nouveau vocabulaire. Le chasseur ne « tue » plus, il « prélève » ou « régule ». Désormais, il « gère » la faune. De fait, l’augmentation des populations de grand gibier plaide en sa faveur. Le temps est aussi à l’ouverture vers la gente féminine.

S’il s’implique de plus en plus dans la protection de l’environnement et la gestion des espèces, notre chasseur n’est pas convaincu par la totalité de ce discours. Les femmes à la chasse ? cela ne prend pas, le pourcentage de chasseresses reste très faible… influence des cent mille générations de chasseurs précédentes, qui ont transformé cette passion en monde d’hommes ? répugnance féminine face au sang versé ? volonté des hommes de ne pas partager leur univers ? Sans doute un mélange de tout cela.

Pour exprimer sa mauvaise humeur, il vote CPNT et créée la surprise électorale aux européennes de 1999. Plus doigt d’honneur tendu vers les partis traditionnels que véritable formation, CPNT s’orientera vers le clientélisme, au bout duquel se trouvera la déconvenue électorale et pour finir l’alliance avec l’UMP…

Aujourd’hui, l’homme est de plus en déconnecté de la réalité du vivant. L’idéologie ambiante substitue des règles morales aux lois de la nature. Dernier avatar de cette évolution, les « éco-guerriers », post-pubères habillés de noir, aux connaissances écologiques apprises dans les émissions de Nicolas Hulot… ont pour jeu de troubler chasses à courre et battues. Face à cela, le chasseur apparaît comme l’un des derniers rebelles de ce monde aseptisé en revendiquant :
- sa connaissance du sens de la vie et du rôle de la mort ;
- son appartenance à la nature et son implication au sein de celle-ci en tant que prédateur ;
- son patrimoine culturel immense. De Chambord à Mozart, en passant par la peinture, sans oublier le vocabulaire…
- une brutalité maîtrisée et revendiquée, partie intégrante de la prédation.

Symboles de cette évolution, vénerie et chasse à l’arc se développent. Or ces deux modes de chasse revendiquent haut et fort ces valeurs. Quinze mille archers (quelques centaines lors de la légalisation en 1995), cent mille veneurs et suiveurs y adhèrent. Ainsi si la chasse reste une confrontation avec le sauvage, si elle ne cède pas au consumérisme, ses enseignements sont plus que jamais d’actualité.

Griffon - E&R