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Le coût de la dissuasion nucléaire ne représente que 0,15% du PIB

L’on entend souvent dire que les crédits de la dissuasion nucléaire sont « sanctuarisés » car il s’agit de « l’assurance-vie » de la Nation. Certains s’en félicitent.

D’autres, au contraire, le déplorent, estimant que l’on accorde trop d’importance aux forces stratégiques au détriment des troupes conventionnelles, en particulier terrestres, qui, régulièrement engagées dans les opérations extérieures, ne disposent pas toujours des matériels les plus modernes.

Ces propos, tenus notamment par un ancien ministre de la Défense, sont en fait simplistes, et donc redoutables quand il s’agit de convaincre l’opinion, qui n’est pas toujours bien informées sur ces questions. Car, à y regarder de près, la situation est un peu plus compliquée que ça.

Dans leur rapport sur l’exécution des crédits de la mission « Défense » pour l’année 2013, les députés Philippe Vitel et Geneviève Gosselin-Fleury s’attardent longuement sur la dissuasion française et remettent ainsi quelques pendules à l’heure.

Sur la question d’un éventuel abandon de la force de frappe française, les deux parlementaires sont catégoriques : ce serait un non-sens stratégique et politique total étant donné le contexte actuel.

« Une telle décision aurait pour conséquence de modifier considérablement la physionomie et les équilibres subtils du « club nucléaire ». En effet, il n’est pas inutile de rappeler que celui-ci est d’ores et déjà majoritairement composé d’États aux traditions démocratiques moins fortement établies – lorsqu’elles existent –, et au degré de prévisibilité politique – si ce n’est de rationalité – parfois incertain », écrivent-ils.

Quant au désarmement global, c’est une vue de l’esprit. « Les actuelles puissances nucléaires ne sont pas prêtes à rendre les armes », note le rapport. Ainsi, les États-Unis et le Royaume-Uni modernisent leurs capacités nucléaires afin de maintenir une « posture stratégique crédible » quand la Chine mène « en parallèle renforcement quantitatif et renforcement qualitatif » de son arsenal. Quant à la Russie, elle cherche à retrouver les capacités qu’étaient les siennes avant la chute de l’URSS.

« Il convient enfin de rappeler que les réductions capacitaires substantielles entreprises à la fin de la Guerre froide par les États nucléaires historiques et récemment réaffirmées n’ont manifestement pas dissuadé d’autres États de tenter d’acquérir le feu nucléaire », soulignent les deux députés.

Maintenant, combien coûte la dissuasion nucléaire française ? Est-elle vraiment sanctuarisée, ce qui laisserait à penser que les sommes investies ont été maintenue au fil des décennies, à leur montant initial ?

« Si, dans les premières années, d’importants volumes financiers ont effectivement été consacrés au lancement de la dissuasion, ses moyens ont ensuite régulièrement diminué. Ainsi, entre 1961 et 1967 l’effort financier avait été multiplié par cinq, passant de 0,2 % à environ 1 % du PIB. En 1990, il avait été réduit de plus de moitié en proportion et n’atteignait plus que 0,47 % du PIB. En 2013, il ne représentait que 0,15 % du PIB, soit 3,2 milliards d’euros pour 2 113,7 milliards d’euros de PIB », ont répondu les deux rapporteurs.

Le coût de la force de frappe française ne représente donc que 0,15% du PIB… Soit autant que le coût taux réduit de la TVA à 5,5% dans le secteur de la restauration (3 milliards de perte de recettes dans les caisses de l’État).

Quant aux Forces aériennes stratégique (FAS), qui viennent de fêter leur 50ème anniversaire, leur suppression, souvent évoquée pour faire des économies pour ne conserver que la composante océanique avec ses 4 sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE), ne rapporterait pas grand chose…

Déjà, leur format a été réduit (2 escadrons nucléaires au lieu de 3), de même que leurs effectifs, qui sont passés de 2 017 personnels en 2008 à 1 369 six ans plus tard. Et cela n’a pas pour autant bénéficié aux missions conventionnelles, auxquelles d’ailleurs les FAS participent. L’engagement d’un avion ravitailleur C-135 FR dans l’opération Chammal, en Irak, le prouve, s’il en était encore besoin.

« Au total le coût d’entretien de la composante aéroportée représente 7 % de l’agrégat nucléaire, soit 245 millions d’euros environ. Si l’on retire le maintien en condition opérationnelle (MCO) des avions qui participent aux missions conventionnelles, ce coût est divisé par deux et représente 3,5 % seulement de l’effort budgétaire global consacré à la dissuasion, soit 122,5 millions d’euros », avancent les deux députés. 122,5 millions donc… Soit le montant d’une grosse cagnotte de l’Euromillions.

Bien évidemment, ces sommes ne prennent pas en compte les crédits d’équipement ainsi que ceux dédiés à la recherche et le développement, étant attendu qu’il faudra moderniser les vecteurs et les porteurs d’ici 2035.

« Concernant le vecteur, deux projets ont trait au successeur de l’ASMP-A : l’un se focalise sur l’amélioration de sa furtivité, l’autre sur sa vitesse dans le but d’atteindre l’hypervélocité – Mach 7 ou 8, ce qui rend le missile difficilement interceptable par les défenses ennemies. Le choix du porteur – avion de combat de nouvelle génération ou porteur lourd – sera déterminant. En effet, le système retenu devra être suffisamment fiable et adaptable pour assurer pendant plusieurs décennies la pénétration des défenses adverses, alors que des progrès réguliers sont faits dans le domaine de la défense anti-missile », note, à ce sujet, le rapport.

Enfin, les sommes consommées par la dissuasion ne sont pas des dépenses… mais des investissements car, relèvent les deux députés, « les technologies et applications initialement pensées et conçues pour le nucléaire militaire ne restent pas forcément cantonnées à ce domaine. Beaucoup ont bénéficié par la suite au nucléaire civil et ont fait l’objet de développements au profit de la recherche, de l’industrie, de l’économie, et donc de l’ensemble de la société française ». Cela vaut pour des domaines de pointe, comme l’électronique, le calcul haute performance, les lasers de puissance, les moteurs de fusée (ce qui profite à Ariane).

Enfin, s’agissant de l’idée que la dissuasion nucléaire vampiriserait les crédits des forces conventionnelles, les rapporteurs l’estiment tout simplement fausse. Et cela pour trois raisons.

La première est que la « dissuasion confère à l’autorité politique une totale autonomie stratégique et, par conséquent, une liberté d’action en appui des forces conventionnelles ». Et d’ajouter : « Si la France peut déployer ses armées sur des théâtres d’opération aussi nombreux et variés, c’est aussi parce qu’elle peut faire entendre sa voix grâce à ses forces stratégiques, en minimisant par ailleurs les risques de chantage de la part de ses adversaires ».

Par ailleurs, il existe un « lien capacitaire fort » entre les forces stratégiques et conventionnelles, les premières tirant les secondes vers le haut. « C’est peut-être le nucléaire qui a permis de maintenir – du moins de ne pas trop rogner – certaines capacités conventionnelles », estime même Bruno Tertrais, de la Fondation pour la recherche stratégique.

Enfin, les savoir-faire mis au point pour les besoins des forces stratégiques bénéficient également aux forces conventionnelles. Ce fut le cas, par le passé, du ravitaillement en vol ou aux missions de pénétration à basse altitude. Ou, plus récemment, de la mise en oeuvre du missile de croisière SCALP.

Voir aussi, sur E&R :

Découvrir ces hommes qui se battent
pour la France avec Prenons le maquis :

 






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11 Commentaires

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  • #997513
    Le 12 octobre 2014 à 15:31 par Laborator-Bellator-Orator
    Le coût de la dissuasion nucléaire ne représente que 0,15% du PIB

    Salut, E&R.

    Contrairement à ce que veut la morale hollywoodienne ambiante, je suis fermement et définitivement opposé au désarmement nucléaire. C’est la Bombe qui a empêché Russes & Américains de s’entretuer ouvertement au lendemain de la guerre. C’est ça qui a empêché les américains d’envahir définitivement le monde, malgré leur apparente victoire en 1989.
    Indiens & Pakistanais ne sont pas stupides puisqu’ils ne l’ont toujours pas utilisé l’un contre l’autre.

    En ces temps de rationalisme excessif, où l’homme occidental se sent sûr de lui, dominateur et imbu de lui-même : la peur de la Bombe est la seule peur métaphysique, voir quasi-spirituelle, qui le domine encore et l’empêche d’agir complètement n’importe comment. On a perdu notre foi en Dieu, notre peur de l’enfer. Remercions alors la Bombe d’avoir donné (et de donner à nouveau) aux peuples écervelés d’occident (enfin, surtout à leurs élites) ce sentiment si humain qu’est la peur, qui empêche tout le monde de croire qu’il est au-dessus de tout et invincible.

     

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    • #997647

      Votre message pro lobby est impressionnant de slogans déconnectés de la réalité qu’il faudrait traiter chacun séparément si c’était pas une pure perte de temps.
      Exemple, le premier que vous citez, "morale hollywoodienne ambiante". Ben, contrairement à ce que vous dites, elle est 100% conflit de civilisation la "morale holywoodienne" : Méchants barbus terroristes. Méchants pirates tout noirs et suants. Héros qui sauve le monde pour sa famille et on ressort même les supers héros inventés pour la guerre froide...

      Je vais pas tous les faire...

      Ah oui, vous confondez aussi dissuasion et nucléaire tactique. On est que trois pays à avoir la dissuasion. Vous noterez que la dissuasion russe ne les met pas à l’abri des emmerdes. Pour nous, pas de problème , on est déjà couchés.
      Mais comme dit le message suivant le votre qui nous rappelle fort à propos la traitrise de nos élites, je parierai que les codes sont en clair sur le bureau de Netanyaou et que le gros bouton rouge soit connecté via un circuit qui passe par l’autorisation du pentagone.

      Alors maintenir un joujou technologique obsolète qui doit assurer votre emploi ou/et votre virilité n’est plus une priorité nationale quand on subit Bruxelles et les marchés

       
    • #997758
      Le Octobre 2014 à 20:13 par Laborator-Bellator-Orator
      Le coût de la dissuasion nucléaire ne représente que 0,15% du PIB

      Pascal, je mets votre verve sur le compte de votre ignorance prouvée par votre incapacité à contrecarrer mon raisonnement.

      Personne ne peut envahir un pays détenteur de l’arme nucléaire qui est en elle-même dissuasive.
      Si les américains échouent face à la guerrilla Talibane en Afghanistan c’est parce que, pour la combattre efficacement, il leur aurait fallut transgresser la frontière Afghano-Pakistanaise...Or, le Pakistan, en plus d’être un allié de la Chine, possède l’arme atomique.

      Pour quelle raison l’armée Ukrainienne ne s’est-elle pas précipitée en Crimée pour chasser les Russes ? Pourquoi n’auraient-ils pas pu les affronter en face ? Est-ce parce qu’ils sont si puissants qu’ils n’auraient pas pu être repoussés ? Ou bien parce que la fédération de Russie compte l’un des plus gros arsenal nucléaire au monde ?

      Dites-moi donc qui entre l’Irak, la Serbie, l’Afghanistan, la Libye, la Syrie, la Géorgie, le Liban, le Mali, la Côte-d’Ivoire, la Tchétchénie, la Bosnie, l’Ukraine, la Palestine, la Centrafrique ou la Somalie possédait l’arme atomique ? Aucun d’entre eux, aucun ! Citez-moi une seule, je dis bien une seule, nation possédant la bombe atomique (qui est en elle-même dissuasive) et ayant, depuis 1945, subit une invasion par une puissance extérieure officielle.

       
    • #997967

      sauf que lorsque l’arme atomique est aux mains de psychopathes fanatiques qui croient fermement sortir d’une élite qui croit devoir régner sur terre et pour qui le reste n’a aucune valeur, c’est vraiment naïf de croire qu’ils ne s’en serviront plus jamais. En tout cas je n’ai aucune confiance en eux.

       
    • #998105

      Vous confondez toujours nucléaire tactique et dissuasion nucléaire qui est le sujet de l’article.
      Je vais pas passer 5 lignes à prouver que chaque suite de trois de vos mots est inepte. Je l’ai fait pour Hollywood et la morale...

      Je vais prendre juste votre dernier "subit une invasion par une puissance extérieure officielle" . Effectivement ce serait bien qu’elles soient encore "officielles" vos invasions !!! Continuez à poster vos messages pro areva/cea sur le site du Figaro, vous aurez moins de mal à convaincre qu’ici sur E&R.

      Sinon pour rappel, la Grèce pays européen, zone euro, disposant de l’arme atomique via Otan :
      Salaire minimum -30%
      Nombre fonctionnaires -30%
      Niveau retraites -15%
      Budget éducation -30%
      Recrutement hospitalier gelé....etc...
      C’est pas un pays attaqué ça ?

       
    • #998859
      Le Octobre 2014 à 23:19 par Laurent Franssen
      Le coût de la dissuasion nucléaire ne représente que 0,15% du PIB

      Vous avez peut-être perdu votre foi en Dieu,
      mais c’est votre problème,pas le mien.

       
    • #998864
      Le Octobre 2014 à 23:25 par Laurent Franssen
      Le coût de la dissuasion nucléaire ne représente que 0,15% du PIB

      L’un d’entre vous va t’il comprendre qu’une " vrai " guerre , n’est plus possible ?

      Nous FAISONT la guerre,
      mais ne la subissont plus.

      Tout pays qui est alimenté en energie nucléraire ne peut pas se permettre une " vrai " guerre.
      Avec ou sans bombe nucléaire...

       
  • #997522
    Le 12 octobre 2014 à 15:47 par Vox Populi
    Le coût de la dissuasion nucléaire ne représente que 0,15% du PIB

    Mais précisément ! C’est parce que la France jouit de ce privilège d’autonomie totale que les autres veulent l’en priver...
    La France a toujours été, jusqu’à l’ère des présidents traîtres, un empêcheur de tourner en rond, mettant son grain de sel dans les affaires du monde. En particulier celles des anglo-américains qui nous détestent cordialement...

     

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  • #997754
    Le 12 octobre 2014 à 20:08 par ajax à l’ame illuminée
    Le coût de la dissuasion nucléaire ne représente que 0,15% du PIB

    si la bombe atomique servait a autre chose qu’a engraisser le lobby du cea , l’urss ne se serait pas effondrée.

     

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  • #998101

    Le fait est qu"en ces temps de disette, nous pouvons économiser sur la disuasion pour privilégier les nouvelles guerres sociétales ou les moyens manquent.

     

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  • #998856
    Le 13 octobre 2014 à 23:17 par Laurent Franssen
    Le coût de la dissuasion nucléaire ne représente que 0,15% du PIB

    Il y a pire que le nucléaire maintenant,
    bombe "anti-bunker"
    capable de percer et endommager la croute terrestre,
    vous pouvez maintenant couler un continent genre USA, faille est et ouest aidant, et en faire un charnier d’activité volcanique...
    Un continent...ou tous...ou pire

     

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