Egalité et Réconciliation
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Les fonctionnaires sont déjà les cocus de la rigueur !

Le Premier ministre François Fillon place l’augmentation pourtant promise de 0,5% du point d’indice de la fonction publique sous condition. La manoeuvre est grossière : il s’agit de faire en sorte que la négociation qui s’ouvre aboutisse à la baisse de la masse salariale de l’Etat dans les trois ans qui viennent.

La rigueur personne ne veut en parler à droite, mais elle s’installe en catimini. Prenons l’exemple des fonctionnaires. Ils attendent à bon droit que leur employeur augmente le point d’indice de 0,5% au 1er juillet, ce qui devrait se voir sur les paye de la fin du même mois. Mais le gouvernement qui s’était pourtant solennellement engagé auprès des syndicats et dans la loi de finances, n’est plus sûr de rien. Questionné trois fois sur le sujets par les journalistes lors de sa conférence de presse vendredi 25 juin, et sommé de répondre à une question simple « y aura-t-il augmentation le mois prochain, oui ou non ? », François Fillon a fini par s’énerver : « la vie n’est pas aussi binaire que oui ou non ! ». Selon ce que l’on a pu comprendre des explications du premier ministre, et ensuite de celle de Georges Tron, secrétaire d’Etat à la Fonction publique, ce matin sur RTL, une grosse bataille divise le gouvernement : Bercy exige le gel, Tron et Woerth (ministre du travail et de la fonction publique) demandent que la parole de l’Etat-patron soit honorée.

François Fillon tente un entre deux : il souhaite que le +0,5% de juillet 2010 soit inclus dans la négociation salariale triennale, concernant la période 2011-2013, qui s’ouvrira mardi 29 juin. Pourquoi ? Pour pouvoir afficher un gel salarial, et mieux qu’un gel, une baisse, dans les trois ans qui viennent, en cohérence avec la politique de rigueur qu’il veut appliquer au pays. Il a d’ailleurs le soutien de la cour des comptes qui demande d’agir sur les rémunérations de la fonction publique dans le but de réduire le déficit structurel du pays.

Déjà la presse a été abreuvée d’études montrant que, en 2009, comme il n’y a pas eu d’inflation, le pouvoir d’achat des 1,9 million de fonctionnaires aurait augmenté de 3,6% grâce au glissement vieillesse technicité (GVT). Sous-entendu : les augmentions à l’ancienneté et à la qualification suffisent largement, pas besoin de faire plus pour les agents de l’Etat.

C’est vraiment prendre les fonctionnaires pour des billes, et ce pour deux raisons :

La première est que le « GVT » est évidemment très mal réparti. Il est de notoriété publique que les déroulements de carrières des profs et des agents des impôts culminent après 20 ans de présence et demeurent plats ensuite. Cela représente des centaines de milliers de fonctionnaires pour qui la variation du point est la seule perspective d’augmentation. Les fonctionnaires ont par ailleurs bien compris que dans les années à venir, les cotisations retraites vont augmenter de plus de deux points. La seconde est que l’augmentation du point est la contrepartie du non remplacement d’un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique. Voici ce que l’on peut lire sur le site officiel du gouvernement « performance publique » :

« La combinaison de ces mesures (0,5% d’indice au 1er juillet de 2008 à 2011, NDLR) , du schéma d’emploi – fondé sur un strict respect du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite en 2010 et 2011 –, et de l’intéressement des agents aux suppressions d’emplois par le « retour catégoriel », se traduit par la quasi-stabilisation de la masse salariale de l’État en valeur, qui passe de 85,8 Md€ en LFI 2008 à 86,6 Md€ en 2011 (hors contributions au CAS pensions), soit une progression moyenne de 0,3% par an. »

Conclusion : dans la phrase ci-dessus, c’est le mot "en valeur" qui est révélateur. Il signifie que la masse salariale progresse déjà moins que l’inflation ( +0,3% par an). Si le point d’indice est gelé, par exemple de 2011 à 2013, cette même masse salariale va baisser, toujours en valeur ! Cela peut aboutir à une économie de plusieurs milliards en 2013. Contrairement à ce que prétend le Premier ministre, la France va faire comme ses voisins espagnols, irlandais, grecs, etc : payer moins pour sa fonction publique. En résumé : les agents de l’Etat seront les cocus de la rigueur, qui paraît-il, n’existe pas…