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Les travailleurs immigrés africains pris au piège de la révolte en Libye

Alors que les Européens sont régulièrement rapatriés de Libye et pris en charge par leurs ambassades, les Africains, eux, se sentent abandonnés par leur pays. Pour de nombreux ressortissants des pays du sud du Sahara, rien n’est réellement prévu pour les évacuer. Les représentations diplomatiques à Tripoli ne répondent quasiment plus, mais pour certains Etat, comme le Mali ou le Tchad, des dispositions existent pour apporter assistance à leurs ressortissants en détresse.

Les témoignages de ressortissants des pays africains sont quasiment tous les mêmes. Ils expriment tous un sentiment d’abandon. « Moi personnellement, j’ai essayé maintes fois. Je n’ai pu joindre personne. Le téléphone sonne… Personne ne décroche. Je vis avec un ami togolais ici. Lui, heureusement pour lui, son ambassadeur lui a répondu.

Mais l’ambassadeur lui a dit d’appeler ses parents pour qu’ils l’aident, alors qu’en ce moment toutes les banques sont fermées ici. (…) A quelqu’un qui est bloqué quelque part à une frontière, son ambassadeur lui dit d’appeler ses parents pour qu’ils lui envoient de l’argent afin qu’il puisse prendre son vol... Ils ne font pas grand-chose… Ils ne font pas grand-chose », déplore Abou un travailleur burkinabé qui s’inquiète du sort de ses amis. « J’ai des amis actuellement, qui sont à Saloum, c’est-à-dire après la frontière égyptienne, dans les camps de réfugiés. Il y a plein de Ghanéens, de Burkinabés…

Il y a aussi des Togolais, et beaucoup d’autres. Je les vois tous passer. Ils disent qu’ils vivent dans des conditions difficiles. Aucun ambassadeur n’est venu là-bas les soutenir », raconte ce travailleur burkinabé candidat au départ et qui a peur de tout perdre.

Tout n’est par perdu. Certaines chancelleries ont réagi. C’est le cas du Mali dont le gouvernement a demandé « à un comité de crise, constitué d’un certain nombre de ministères, de lui proposer des stratégies de rapatriement. Ce comité s’est réuni au moins deux fois, a donc fait des propositions pour le rapatriement de 4 000 Maliens. Nous allons donc les acheminer dans un premier temps sur Djerba, en Tunisie, et nous allons accorder des laissez-passer à ceux qui sont du côté de l’Algérie et de l’Egypte, pour les gens de ces pays-là. Pour le transport de Tripoli à Djerba, ce serait par bus.

Le gouvernement va débloquer à peu près la somme de 120 millions pour les transporter, et à partir de Djerba, nous sommes en contact avec l’Organisation Internationale d’Immigration, l’OIM. », précise Mamady Traoré, secrétaire général du ministère des Maliens de l’extérieur. Par ailleurs le gouvernement malien espère l’appui de l’OIM pour favoriser le rapatriement de ses ressortissants ; deux cents d’entre eux ont déjà été rapatriés à Bamako. Des requêtes sont également en cours auprès de l’Union européenne, l’ambassade de France, « pour voir quelles facilités elles peuvent éventuellement nous accorder », a déclaré, Mamady Traoré.

Le Cameroun qui n’a pas d’ambassade en Libye a confié à ses délégations diplomatiques en Tunisie et en Egypte le soin de se pencher sur le sort des ses ressortissants en Libye. Une vingtaine de Camerounais seraient déjà à l’ambassade du Cameroun au Caire. Mais pour l’instant aucun plan de rapatriement n’est prévu, même si des secours d’accueil peuvent être envisagés dans les pays limitrophes, en Tunisie et en Egypte.

Nombreux sont les Tchadiens qui vivent en Libye et connaissent les mêmes difficultés que les autres Africains. « Ils sont environ 300 000, ce sont des travailleurs immigrés, des bergers, des travailleurs agricoles et leurs familles… Nous avons pris contact avec les autorités égyptiennes, pour permettre à ceux de nos compatriotes qui se trouvent dans la partie orientale de Libye, de les laisser passer par la frontière égyptienne. Nous avons pris des contacts aussi à travers notre consulat en Tunisie. Ceux de nos compatriotes qui se trouvent dans la partie sud de la Libye, peuvent éventuellement rentrer au Tchad par la route. Mais nous n’excluons pas de coordonner tout ça, avec ceux qui voudraient nous aider pour cette opération » a précisé, Moussa Faki le ministre tchadien des Affaires étrangères.

Pour la plupart des ressortissants africains, la peur réside aujourd’hui dans une aggravation de la situation. Ils ont peur d’être enrôlés dans une guerre qui n’est pas la leur. L’inquiétude est grande dans certains pays, notamment au Mali et au Niger où il semblerait que de nombreux jeunes Touaregs seraient prêts à s’engager aux côtés de colonel Kadhafi.