Egalité et Réconciliation
https://www.egaliteetreconciliation.fr/
 

Mali : La rébellion touareg annonce la fin de ses opérations militaires

Le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), composé de rebelles touaregs, a annoncé, par un communiqué mis en ligne sur son site Internet, la fin de ses opérations militaires dans le nord du Mali à compter du 5 avril au soir.

Cette décision a été prise « unilatéralement » suite à « la libération complète du territoire de l’Azawad » et « compte tenu de la forte demande de la communauté internationale, notamment du Conseil de sécurité de l’ONU, des Etats-Unis, de la France ainsi que des Etats de la sous-région » explique le texte signé par le général Bilal Ag Acherif.

En conséquence, poursuit le texte, le MNLA « invite les Etats de la sous-région de de la communauté internationale à garantir le peuple de l’Azawad contre toute agression du Mali ».

Pour ces rebelles touaregs, l’objectif de s’emparer de l’Azawad, un territoire qui couvre le nord du Mali, a été atteint à l’issue d’une offensive de trois jours, lancée alors que la junte militaire a justement renversé le président Amadou Toumani Touré, le 22 mars, pour éviter qu’un tel scénario se produise.

Seulement, le MNLA n’a pas agi seul dans sa conquête de l’Azawad. Des groupes jihadistes, comme le Jamâa Anssar Dine (ou Ansar Dine) du chef touareg Iyad Ag Ghaly ou encore le Mouvement pour l’unicité et le jihad (Mujao) et des éléments appartenant à al-Qaïda au Maghreb islamique, ont également combattu à ses côtés.

Le risque est maintenant de voir le MNLA, qui se dit laïc, être débordé par ces militants islamistes, dont le but n’est pas de libérer l’Azawad mais d’instaurer la charia à l’ensemble du Mali et donc, un Etat islamique.

D’ailleurs, c’est ce qu’il semble s’être déjà produit dans plusieurs villes du nord du Mali, notamment à Tombouctou, qui, de par son architecture et les 200.000 manuscrits de l’époque de l’âge d’or de l’université de Sankoré, est inscrite au patrimoine mondial de l’humanité.

Même si le MNLA a affirmé tenir tête « face à tous les réseaux mafieux » et se « démarquer de l’organisation Ansar Dine et autres qui se dressent sur le chemin de la libération de l’Azawad », il n’en reste pas moins que plusieurs témoignages ont confirmé la présence de jihadistes à Tombouctou.

Outre le chef d’Ansar Dine, qui s’est d’ailleurs adressé aux imams de la ville, Mokhtar Belmokhtar, l’un des principaux responsables d’AQMI et par ailleurs un trafiquant notoire qui couvre ses activités autant illicites que lucratives sous un vernis religieux, aurait été vu à Tombouctou.

D’après les déclarations faites à la presse par des habitants, Iyad Ag Galy aurait multiplié les prêches et défendu l’instauration de la charia. Des bars servant de l’alcool auraient été saccagés et les femmes seraient obligées de porter levoile.

Chef historique de la rébellion touareg dans les années 1990, Iyad Ag Galy, âgé d’une cinquantaine d’années, passait pour quelqu’un de pieux. On retrouve son nom dans les négociations d’otages occidentaux retenus par AQMI. En tant qu’intermédiaire, il prenait au passage des commissions sur les rançons versées.

C’est de là que datent ses relations avec le GSPC algérien, devenu aujourd’hui AQMI, dont une des katiba est commandée par son cousin Amada ag Hama, alias Abdelkrim Taleb. Ce dernier est responsable de la mort de Michel Germaneau, un ressortissant français enlevé en 2010. Enfin, avant d’être un acteur important de la nouvelle rébellion touareg et à l’issue des accords d’Alger de 2006, Iyad Ag Galy a occupé les fonctions de consul général adjoint du Mali en Arabie Saoudite.

Maintenant, la question est de savoir si des affrontements auront lieu entre Ansar Dine et AQMI d’un côté et le MNLA de l’autre. C’est la crainte exprimée sur les ondes de RFI par par Pierre Boilleu, directeur du Centre d’études des mondes africains et spécialiste du monde touareg.

Cependant, a-t-il souligné, « le MNLA fera tout pour l’éviter, puisque, évidemment, ce n’est pas son intérêt, en sachant que les alliances sont complexes dans la région et que c’est aussi un peu difficile de se lancer dans un combat contre Ansar Dine, qui manifestement a des liens aussi avec certaines milices arabes ».