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Mort d’un homme révolté

Hommage à Jacques Vergès, par Théophile Kouamouo

L’hommage de Théophile Kouamouo lu par Grégory Protche :

 

Jacques Vergès n’est plus – Mort d’un homme révolté

Par Théophile Kouamouo, 16 août 2013

 

L’avocat qui a courageusement défendu les victimes des massacres de Petit-Duékoué et de Guitrozon ainsi que le président Gbagbo en butte à l’hostilité de la France officielle et de la « communauté internationale » vient de s’éteindre à l’âge de 88 ans. Hommage.

D’ores et déjà, les portraits écrits la plume trempée dans le fiel commencent à paraître dans les médias hexagonaux. Les nécrologies ont toujours été des véhicules idéologiques puissants. Et celles qui fleuriront les jours prochains sur l’avocat Jacques Vergès, décédé hier à l’âge de 88 ans, ne feront pas exception à la règle. La radio française RFI a tiré la première. « Anticolonialiste, défenseur du tiers-monde, il finira par plaider la cause à quelques incarnations de la Françafrique, apportant son soutien à Laurent Gbagbo, après sa défaite à l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire. Il est finalement écarté de sa défense, non sans avoir empoché 100 000 euros avec son confrère Roland Dumas », peut-on lire sur son site Internet. Incroyable confusion idéologique et conceptuelle ! Si en 2010, Gbagbo était « l’incarnation » de la Françafrique, cela signifie-t-il que la coalition qui le combattait (présidence française, Trésor français, Conseil de sécurité cornaqué par Paris, Burkina Faso de Blaise Compaoré…) s’opposait ainsi à la Françafrique ? En « empochant » 100 000 euros aux côtés de Roland Dumas, Vergès a-t-il fait autre chose que de toucher des honoraires légitimes comme, au hasard, Jean-Pierre Mignard, avocat d’Alassane Ouattara et d’Idriss Déby… et accessoirement figure du Parti socialiste et ami intime de François Hollande ?

De Jacques Vergès, la mémoire ivoirienne retiendra surtout l’avocat qui est courageusement allé là où les bonnes âmes autoproclamées refusaient d’aller, conditionnées par une haine vigilante contre Laurent Gbagbo et ce qu’il incarnait ; ou non-désireuses d’aller dans le sens inverse du « troupeau médiatique ». Ainsi, quand une horde de Dozos déferle sur les villages de Petit Duékoué et de Guitrozon fin mai 2005, et y commettent un véritable crime contre l’humanité, assassinant femmes et enfants, RFI relaie une intox s’appuyant sur un faux rapport interne de l’ONU attribuant ce crimes aux « miliciens » pro-gouvernementaux. Pendant ce temps, Jacques Vergès, qui a défendu Alassane Ouattara à la fin des années 1990, vient sur le terrain, recueille les témoignages des victimes à qui pas grand monde ne tend son micro. Et publie un livre, Crimes contre l’humanité – Massacres en Côte-d’Ivoire. Un livre ignoré dans la France des droits de l’homme. Pensez-y : les morts n’étaient pas du bon côté.

 

 

Plus qu’un avocat, le procureur de la bonne conscience occidentale

Au moment de la crise postélectorale, Vergès et Dumas défendent crânement le président Laurent Gbagbo, ferraillant notamment dans les médias hexagonaux. Habile, Vergès « sort » opportunément des copies de procès-verbaux de bureaux de vote qui montrent qu’il y a un problème. Sur un plateau de télévision, il montre à une « panéliste » croyant incarner le « camp du Bien » la photo d’une militante du FPI battue et violentée à Korhogo par les rebelles dont on dit qu’ils défendaient « la démocratie ». La défenseuse de la vertu internationale détourne le visage. La réalité contredit ses théories. Elle ignore la réalité.

 

 

Cette scène traduit en réalité le profond désaccord de celui qui a écrit, à la suite de la guerre en Libye, le livre Sarkozy sous BHL, et les tenants de la pensée dominante en France. Plus qu’un avocat, Vergès, fils d’un Réunionnais et d’une Thaïlandaise, a été tout au long de sa vie un procureur. Le procureur mettant inlassablement en accusation la bonne conscience d’un Occident qui se dissimule à lui-même sa phénoménale brutalité et sa barbarie non-assumée.

À l’époque de la guerre d’Algérie, celui qui est alors membre du Parti communiste et qui a déjà passé quelques années derrière le Rideau de fer, choisit de défendre le Front de libération nationale (FLN). Et plus particulièrement Djamila Bouhireb, « poseuse de bombes » indépendantiste qu’il épouse dans la foulée. Forcément, ça dérange la bien-pensance, y compris « de gauche » ! Comme le choix de l’ANC d’opter pour la lutte armée face à la violence de l’apartheid, lui aliènera le soutien d’Amnesty International et la fera figurer longtemps sur la liste des organisations considérées comme « terroristes » par les États-Unis !

Défenseur d’Ernest Ouandié et des upécistes camerounais

Certes, les colonisés peuvent dénoncer les méfaits de la colonisation, mais ont-ils le droit de « voler le feu » de la violence à ceux qui l’ont rendue acceptable en l’insérant au cœur de l’appareil idéologique d’un État raciste ? C’est la même logique qui conduit Vergès à défendre les « fedayins » palestiniens, qui s’opposent par les armes à l’État d’Israël. Ou Magdalena Kopp, ex-compagne du terroriste « rouge » Carlos. Moins médiatique, la cause des indépendantistes camerounais de l’UPC, massacrés dans l’indifférence internationale par la coalition constituée par la France et le président qu’elle a installé, Amadou Ahidjo, est aussi celle de Vergès. Il est un des deux avocats constitués pour défendre le « maquisard » Ernest Ouandié lors de son procès en août 1970. En violation totale de la convention judiciaire franco-camerounaise, il est empêché d’entrer sur le territoire camerounais pour défendre son client. Qui sera condamné à mort et exécuté.

Le divorce définitif entre Jacques Vergès, résistant gaulliste dans sa jeunesse, et la bonne conscience française intervient quand il défend le nazi Klaus Barbie. Provocateur, il froisse le récit national français. Et ose comparer les pratiques hitlériennes… à celles du colonialisme français.

Tel était Maître Jacques Vergès, l’homme révolté. L’homme qui s’est opposé à la tendance contemporaine des sociétés occidentales contemporaines à « fabriquer » des « méchants paroxystiques » pour mieux faire l’économie de leur nécessaire examen de conscience. Slobodan Milosevic, Saddam Hussein, Mouammar Kadhafi… Vergès les a défendus, pour mieux démasquer les mensonges à visage d’ange de l’histoire officielle, écrite par les puissants. Quand Vergès défend Omar Bongo, Gnassingbé Eyadéma et Denis Sassou N’Guesso contre l’association « Survie », cela procède d’une logique similaire – même si ce choix irrite profondément de nombreux militants de la cause africaine. Même si c’est le pouvoir prescriptif naissant d’ONG « oubliant » souvent de taper partout où cela fait mal qu’il dénonce.

Tel était Jacques Vergès qui, en défendant le jardinier marocain Omar Raddad, dont la « race » et le statut social faisaient de lui le coupable idéal de sa patronne Ghislaine Marchal, et en mettant en lumière les incohérences du ministère public et des parties civiles, a évité à la justice française une monumentale erreur judiciaire. Cela, on l’oublie souvent. Plus que « l’avocat de la terreur », comme on le qualifie souvent, Jacques Vergès était l’avocat des « causes perdues ». Et c’est tout à son honneur.

Théophile Kouamouo

Prolonger l’article avec Kontre Kulture :

 






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17 Commentaires

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  • #499625
    Le 22 août 2013 à 19:24 par lina
    Mort d’un homme révolté

    J’aime sa répartie lorsqu’il lui parle de la femme (nous ne dirons pas ses origines) qui aurait été agressée dans le train....les médias et les élus avaient tous sortis les mouchoirs....je ne savais pas qu’elle avait défendu la pseudo plaignante...

     

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  • #499674
    Le 22 août 2013 à 20:47 par karimbaud
    Mort d’un homme révolté

    et l’autre guedj qui distribue les robes d’avocats maintenant !...qui est digne ou pas, selon elle : parce que Barbie, Dieudonné, çà c’est pas possible, hein...bizarre comme ces racialistes communautaires perdent toute crédibilité à la simple évocation de certaines affaires chères à leur coeur étriqué...par contre, elle, avait le droit de défendre une mytho hystérique qui avait " fabulé " une agression (affaire de la fausse agression du RER)...bon, il n’était question que de détruire la vie insignifiante de quelques jeunes "bonobos" après tout...sinon, elle dit qu’elle a toujours défendu les opprimés, c’est çà ?!...wwaaou, j’ai failli avoir la larme à l’oeil en écoutant ce crocodile !

     

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    • #499894
      Le Août 2013 à 00:44 par Intifada
      Mort d’un homme révolté

      En condamnant Klaus Barbie alors que c’était la guerre, la France licratisée en a fait un martyre. J’ai plus de respect pour les vaincus de la guerre que pour cette mégère de Nicole Gedj. Elle suite la haine jusqu’à Tel-Aviv. Oui, elle a toujours défendu les (prétendus) opprimés de sa communauté.

       
  • #499760
    Le 22 août 2013 à 22:18 par Jean Seb
    Mort d’un homme révolté

    J’attaque systématiquement de manière frontale, je dénie totalement l’autre, je ridiculise la partie en face, je n’ai aucun respect des aînés, je m’habille et me coiffe clinquant à la mode du sentier, je jouis de mon petit effet et je me moque de l’autre qui prétendument joue les stars, je parle de l’actualité sans en être, je brouille les pistes à parler de la forme sans parler du fond, je donne des leçons avec des gestes inquisiteurs, je suis sans gêne et sans retenue aucune ; je fais du sentiment avec ma défense des opprimés, j’en perd mon souffle, je cherche l’air, je reconnais que je ne suis pas digne de porter la robe, je m’appelle Nicole Guedj

     

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  • #499806
    Le 22 août 2013 à 23:16 par solaine
    Mort d’un homme révolté

    Merci E&R de nous avoir fait partager ce bel hommage rendu au regretté Maître Jacques Vergès. Il le méritait bien et même la chanson de la fin a été bien choisie (j’ai adoré).

    Que son âme repose en paix !

     

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  • #499832
    Le 22 août 2013 à 23:40 par Deratiseur
    Mort d’un homme révolté

    Nicole Guedj, hautaine et méprisante, manquant de respect à Verges ( + de 85 ans le monsieur ) dans la vidéo, est comme par hasard vice-présidente du Consistoire israélite de Paris... Je me demandais pourquoi elle s’était positionnée du côté du mal tout en faisant l’avocate des gentils et qu’elle prenait autant son pied à mentir. Avec ses yeux qui crachent des flammes, ne cherchez plus, c’est BON POUR ISRAEL ce qui se passe en cote d’ivoire.

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Nicole...

    Je sais déjà de quel côté se situe la vérité. Reposez en paix Jacques Verges.

     

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  • #499836
    Le 22 août 2013 à 23:43 par Crazy Horse
    Mort d’un homme révolté

    Très bel article qui a bien cerné la personnalité et le vrai combat mené par Verges. Quant aux autres, Haziza, Guedj... Franchement, valent-ils seulement qu’on leur réponde ? Leurs propos sont d’une pauvreté crasse. Certains auteurs - Nietzsche, Guénon - ont prédit qu’il viendrait un temps où les vulgaires et les médiocres règneraient sur la société, harangueraient et insulteraient les grands hommes, où toutes les valeurs seraient inversées, où le vice passerait pour la vertu. Eh bien nous y sommes, malheureusement. Ce que nous devons faire, au lieu de nous énerver sur eux, c’est de concentrer notre énergie à écouter des hommes comme Verges, à les lire, à nous en nourrir et à nous en grandir. Quant aux autres, un jour leur compte sera réglé.

     

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  • #499957
    Le 23 août 2013 à 03:38 par grondin
    Mort d’un homme révolté

    Que Dieu lui fasse miséricorde. Si vous chercher des argument contre le conflit de civilisation et la stigmatisation des arabes en temps qu’ethnie violent et mal élevé de banlieue regarder l’histoire de la Réunion je ne développe pas pour que vous cherchiez. Il y à beaucoup à apprendre. La Réunion est Un terrain ou l’analyse est simple à faire et limpide avec les outils que Mr Soral nous a fourni et un exemple vivant pour tout détracteurs. Je pense que ce sont mes débat sur le sujet qui m’ont fait interdire l’ajout de commentaire sur youtube car tout ce que je dit est verifiable, en chaire et en os. Au passage je suis content que pour une fois la chanson qui représente la Réunion et J. Verges ( Je pense que le refrain le représente assez bien) sois bien choisis et pas stéréotypé avec une chansons des années 50.

     

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  • #499999
    Le 23 août 2013 à 07:51 par MagnaVeritas
    Mort d’un homme révolté

    L’hideuse guedj et la chutzpah de la communauté qui n’existe pas.

    Elle sourcille pas en s’attaquant à deux pontes qui la surpassent à tous points de vue, c’en est grotesque.

     

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  • #500027
    Le 23 août 2013 à 09:09 par A.D.
    Mort d’un homme révolté

    Petite curiosité :
    La ville de Mougins, tristement célèbre, par la mort violente d’une riche veuve, Ghislaine Marchal, dont "on" fit endosser la responsabilité à son jardinier marocain, Omar Raddad, défendu par Jacques Vergès, est aussi un lieu qui abrite d’autres personnalités importantes parmi lesquelles :
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Mougin...
    ..."Des politiciens :
    François Hollande VIIème Président de la V° République y possède une villa.
    mune, où il habitait une luxueuse villa.
    Alassane Ouattara, président de la Côte d’Ivoire y séjourna chez une connaissance et y possède une villa.
    et autres :
    L’émir du Qatar y possède une résidence"
    ...

    Peut être un genre de triangle des Bermudes français, ou nombre de secrets disparaîssent opportunément !

     

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  • #500034
    Le 23 août 2013 à 09:36 par A.D.
    Mort d’un homme révolté

    "Le divorce définitif entre Jacques Vergès, résistant gaulliste dans sa jeunesse, et la bonne conscience française intervient quand il défend le nazi Klaus Barbie. Provocateur, il froisse le récit national français. Et ose comparer les pratiques hitlériennes… à celles du colonialisme français."

    Pour commencer, on peut dire qu’il n’a pas tout-à-fait tort, ces "fruits empoisonnés" ont poussé sur le même arbre, nourri à une même et unique idéologie, laquelle a pris naissance au sein de la soi-disante "révolution française", qui a promut la "terreur" comme modèle universel !
    Toutefois, si la France a certainement été le "lieu" de cette irruption "satanique", ce n’est pas un hasard, elle a été choisie... mais l’on ne peut certainement pas dire que le peuple français est le concepteur de cette idéologie, il s’en faut de beaucoup.
    Une secte ténébreuse, étrangère à la "France éternelle" a malheureusement pris la France en "otage" et discrédite, jusqu’à nos jours le génie français.
    Le peuple français n’a jamais été à proprement parlé "raciste", issu lui-même de nombreux mélanges merveilleusement assimilés. Il doit cependant se tenir en garde contre les couleuvres que l’on désire lui faire avaler en falsifiant l’histoire !
    Maître Vergès, quant à lui était un homme très cultivé. Il aimait la France et connaissait en profondeur l’histoire de son pays et ce d’autant plus qu’il combattait, à travers les différents procès qu’il a mené, "ceux" qui vraiment n’ont jamais aimé la France car on les voit corrompre et défigurer de mille manières, le visage de ce beau pays.
    Je ne sais pas si Maître Vergès connaissait E&R et son fondateur Alain Soral, mais je suis "presque sûre" qu’il aurait aimé le défendre. Dommage qu’il nous ait quitté...
    Cordialement,
    Anissa

     

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