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Soudan du Sud : la réalité et la fiction

Le cas du Soudan du Sud est une illustration exemplaire de la réussite de la stratégie israélienne en Afrique. S’appuyant sur les forces armées états-uniennes, comme Irak et en Libye, l’État hébreux et son allié sont parvenus à diviser le pays et à éliminer de la partie riche en ressources leur plus important rival commercial, la Chine. Comme un symbole, la promotion médiatique de cette opération aura été confiée à l’acteur hollywoodien Georges Clooney, fils prodigue et porte parole du mariage de raison des intérêts coloniaux israélo-étasuniens.

Après la scène avec George Clooney [1] aux manettes, tournée devant l’ambassade (nord) soudanaise à Washington, c’est Hillary Clinton qui est venue sur le plateau, les larmes aux yeux, pour exprimer la profonde préoccupation des États-Unis sur la crise humanitaire et ses nombreuses victimes dans la partie méridionale du Soudan. Scènes touchantes de la fiction washingtonienne, destinée à la scène médiatique mondiale. La vérité est tout à fait différente.

Pendant des décennies les États-Unis et Israël ont soutenu les forces sécessionnistes de qui était à l’époque le Sud Soudan jusqu’à ce que, en 2005, le Nord et le Sud aient signé un accord, considéré par l’administration Bush comme un véritable triomphe en politique extérieure. L’administration Obama en a récolté les fruits : le 9 juillet 2011, le Soudan du Sud [2] s’est autoproclamé indépendant. Un nouvel État est ainsi né, avec une superficie de plus de 600 000 km2 (plus que la France, le double de l’Italie) et à peine 8-9 millions d’habitants. En se séparant du reste du pays, le Soudan du Sud est entré en possession de 75 % des réserves pétrolières soudanaises.

C’est par contre le Nord qui possède l’oléoduc, à travers lequel le pétrole du Sud est transporté vers la Mer Rouge pour être exporté. D’où le contentieux entre les deux gouvernements sur la partition des revenus pétroliers, avivé par l’affrontement pour le contrôle de zones de frontières le long des plus de 1 500 kms de confins, affrontement mené aussi à travers des groupes armés locaux.

Dans tout cela, les États-Unis continuent à jouer un rôle clé. Le Soudan du Sud est de plus en plus inséré dans le programme Imet (International Military Education and Training), géré par l’Africom avec des fonds du Département d’État : c’est là que sont formés chaque année 10 000 « leaders militaires et civils » africains, qui suivent des cours dans 150 écoles militaires étasuniennes.

Simultanément, sous la régie de Washington, on est en train de mettre au point le projet d’un nouveau corridor énergétique qui, formé d’un oléoduc, d’une autoroute et d’un ligne de chemin de fer, permettra de transporter le pétrole depuis le Soudan du Sud jusqu’au port kenyan de Lamu. Les avantages pour Washington seront multiples. D’une part, en se débarrassant de l’oléoduc nord-soudanais, assener un coup dur au pays, déjà affaibli par la perte des deux tiers des réserves pétrolifères, de façon à provoquer l’écroulement du gouvernement de Khartoum. D’autre part, marginaliser les compagnies chinoises qui, avec quelques compagnies indiennes et malaisiennes, extraient le pétrole soudanais : la majeur partie pourra ainsi être contrôlée par des compagnies étasuniennes et britanniques.

Et le Soudan du Sud n’a pas que du pétrole, mais aussi de riches gisements d’or, argent, diamants, uranium, chrome, tungstène, quartz qui restent à exploiter ; et auxquels il faut ajouter environ 50 millions d’hectares de terres cultivables en utilisant l’abondante eau du Nil. Des affaires en or pour les multinationales, dont les intérêts sont assurés par le nouveau gouvernement de Juba dont la fiabilité est garantie non seulement par Washington mais aussi par Tel Aviv.

Fait significatif : le Soudan du Sud ouvrira son ambassade à Jérusalem, en la reconnaissant ainsi comme capitale, et Israël « formera » des milliers de réfugiés sud-soudanais avant de les rapatrier. Tandis que le gouvernement de Juba, parmi ses premiers actes, choisit l’anglais et non l’arabe comme langue officielle et demande à entrer dans le Commonwealth britannique. Aux vieilles ex-colonies s’en ajoute donc une de type néocolonial.

[1] « George Clooney rejoint le CFR » et « George Clooney parraine l’observation satellitaire du Darfour », Réseau Voltaire, 17 juin et 29 décembre 2010.

[2] L’appellation officielle de l’État est Soudan du Sud, en anglais : South Sudan. La traduction Sud Soudan est un anglicisme, l’expression Sud Soudan désignant désormais le Sud de l’actuel Soudan.

 






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13 Commentaires

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  • #126108
    Le 28 mars 2012 à 21:46 par pseudonyme
    Soudan du Sud : la réalité et la fiction

    L’auteur "oublie" de préciser que ce nouvel Etat a la légitimité du referendum (peut importe ses alliances ! Ce n’est pas comme si ils avaient eu le choix, ils ont été obligé de prendre le camp opposé à celui de Karthoum...).

     

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  • #126129
    Le 28 mars 2012 à 22:18 par toto666
    Soudan du Sud : la réalité et la fiction

    Conformément à ce qu’avait évoqué Wesley Clark en 2007,
    Irak, Libye, Soudan apparement c’est fait, Syrie ça resiste encore... Somalie je sais pas, Liban et puis là faudra qu’on chausse les rangers et tous direction Iran ou la clandestinité, - choisis ton camp camarade - ...
    Putain des fois je crois réver...

     

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  • #126184
    Le 28 mars 2012 à 23:54 par ratan
    Soudan du Sud : la réalité et la fiction

    L’analyse, essentiellement économique, inverse les causes et les effets.
    Elle n’est pas fondée.
    La réalité du soudan du sud est d’être chrétien, alors que le nord est musulman.
    Et le nord martyrisait le sud depuis des années, y compris via un sous développement.
    Qu’il y ait, effectivement, le gros des ressources au sud est une incidence qui a aggravé la situation.

     

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    • #126405
      Le Mars 2012 à 14:20 par Clem
      Soudan du Sud : la réalité et la fiction

      Chrétien sioniste ! ça change tout. Et le meilleur vassal d’Israël dans la région. Je te laisse faire quelques recherches sur son président soi-disant Chrétien Salva Kiir en visite en Israël. Il pose avec joli un chandelier talmudique qui te plaira.

       
    • #126457
      Le Mars 2012 à 16:31 par gangan
      Soudan du Sud : la réalité et la fiction

      Tu as tout a fait raison, avant qu’il est un pays j’ai fais quelques dons et j’ai eu des infos sympathiques j’aurais aimé leur envoyer des armes à l’époque.

      On a même eu un intervenant dans ma paroisse on étaient contant d’être en France...

       
  • #126260
    Le 29 mars 2012 à 03:58 par nactule
    Soudan du Sud : la réalité et la fiction

    D’un autre côté, l’arabe ou l’anglais comme langue pour le sud Soudan, ça reste une langue de colons.
    Ils sont passés de l’un à l’autre.
    Les Soudanais de souche, c’est comme pour les Français, on ne leur demande pas leur avis.

     

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    • #126331
      Le Mars 2012 à 10:56 par Mwana Ya Lola
      Soudan du Sud : la réalité et la fiction

      Il y a eu un référendum et ils ont choisi. C’était ça ou se faire tuer ou islamiser de force. J’aurais agi comme eux.

       
    • #126408
      Le Mars 2012 à 14:24 par Clem
      Soudan du Sud : la réalité et la fiction

      Oui tu as raison, plutôt que de se faire "islamiser de force" autant se faire sioniser en douce...un referendum à l’air des médias de masses et d’hollywood ça n’est pas forcément un gage de la volonté populaire ni surtout de leur intérêt à long terme.

       
    • #126456
      Le Mars 2012 à 16:23 par gangan
      Soudan du Sud : la réalité et la fiction

      Ils leur apprenaient pas la langue arabe ils les massacraient !

       
    • #126461
      Le Mars 2012 à 16:49 par Mwana Ya Lola
      Soudan du Sud : la réalité et la fiction

      Vous croyez que les Sud Soudanais ont accès au cinéma d’Hollywood ? Vous croyez qu’ils ont voté en regardant TF1 ? Le monde n’est pas l’Occident ! Ils n’ont pas la Télé et le divertissement de masse. Ils ont écouté leur instinct de survie. Pendant que vous lisez "Comprendre l’Empire", ils étaient traqué par le gouvernement de Khartoum ! Le combat des Sud-Soudanais ne date pas d’aujourd’hui. Le fait que les sionistes en profitent ne change rien au problème qui a causé cette guerre : l’impérialisme et le mépris des nordistes à l’égard des sudistes. Si demain les Toubous, qui sont actuellement entrain de se faire plomber, déclare leur indépendance avec l’aide d’Israël, vous direz que c’est de leur fautes ? Quel est l’intérêt de combattre une domination, si c’est pour crever sous la ma main d’une autre ? Au nom du combat contre l’Empire, il faut accepter les mini Empires d’ici et là ? Les Sud-Soudanais ont bien fait ! Initialement, les Sud Soudanais n’ont jamais voulu l’indépendance, c’est le comportement des nordistes qui les a poussé dans les bras des sionistes.

       
    • #126503
      Le Mars 2012 à 18:02 par andreas
      Soudan du Sud : la réalité et la fiction

      @clem Je suis né à Khartoum et j’ai passé mes 8 premières années à Nyala (Darfour, Nord Soudan, également sécessionniste) avant de venir en Europe. Certes j’étais gamin et je ne comprenais rien à tous les enjeux mais mes parents (certes partis pris), eux avaient plus de moyen pour les comprendre. Il ne faut pas confondre les causes et les conséquences, et pas non plus nier la main étrangère (USA-Israël). L’empire joue sur des conflits existants pour en tirer profit, en jetant souvent de l’huile sur le feu, mais ne les invente pas toujours. Les populations du Sud Soudan ont toujours été sécessionnistes (après l’indépendance, et ceci environ 30 ans avant que l’on y découvre du pétrole ce qui coïncide étrangement avec l’intérêt américain pour la "paix" dans cette région) pour des raisons confessionnelles (droit musulman), culturelles,ethniques... Là où se situe le tragique, c’est qu’ils vont se faire baiser sur tous les contrats à venir par les compagnies américaines et là où se situe le côté holywoodien c’est lorsque les représentants américains jouent les humanistes alors qu’ils ont attendus les années 80 (découverte du pétrole vers 1978) pour s’intéresser à cette région.

       
  • #126392
    Le 29 mars 2012 à 13:45 par dédé75
    Soudan du Sud : la réalité et la fiction

    Il semble que l’Empire Britannique n’ait jamais vraiment abandonné cette région depuis Fachoda. L’Empire Français lui a bel et bien disparu depuis longtemps...

     

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  • #126455
    Le 29 mars 2012 à 16:20 par gangan
    Soudan du Sud : la réalité et la fiction

    Désolé de choquer, mais c’était le seul moyen au chrétien de survivre face aux musulmans qui les massacraient, créer un pays et prendre les armes, espérons qu’ils ne se fassent pas manipuler par une tentacule de l’Empire.

     

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