Dans un article du 17 Octobre 2016, Richard Labévière (proche-orient.ch./alep-trois-batailles-dans-la-bataille) illustre le conflit actuel entre le monde unipolaire et multipolaire :
« Au-delà des percées et des replis de la rébellion syrienne, l’enjeu géopolitique le plus large de la bataille d’Alep met en confrontation deux cartographies incompatibles : celle d’un nouveau Sykes-Picot, autrement dit le « Grand-Moyen-Orient » de George W. Bush et Condoleezza Rice – que les deux administrations Obama ont recyclé avec quelques nuances – et celle d’une réaffirmation des Etats-nations arabo-persiques issus du démantèlement de l’empire ottoman.
La première cherche à démanteler les Etats-nations pour les fragmenter en micro-Etats (type Kosovo ou Soudan du Sud), voire pour les re-tribaliser en autant de petits émirats sunnites, chi’ites, druzes, kurdes, etc. selon la bonne vieille recette des imperium (de Rome à l’Hyper-puissance américaine). A l’image ce de qui a été fait en Irak et en Libye, Washington, ses satellites européens, les pétromonarchies du Golfe, Ankara et Tel-Aviv exigent toujours le départ de Bachar al-Assad pour démanteler la Syrie en deux émirats sunnites (Alep et Damas), un micro-Etat druze sur le Golan et un réduit alaouite dans les montagnes qui dominent Lattaquié et Tartous.
La deuxième refuse cette logique de fragmentation, estimant que des Etats nationaux souverains constituent les « monades » essentielles pour résister à l’instauration de cette cartographie d’une mondialisation d’inspiration anglo-saxonne néo-libérale. En effet, les prédateurs de Wall-Street, de la City et de Bruxelles cultivent la même sainte horreur de souverainetés nationales empêcheuses d’exploiter en rond… Moscou (dans une moindre mesure Pékin), Téhéran, Damas, le Hezbollah libanais et plusieurs organisations palestiniennes misent toujours sur la défense et l’affirmation du fait national afin de garantir un monde multipolaire, ultime riposte à la World-company que Washington veut imposer à toute la planète, sous prétexte de « droits de l’homme » et de liberté du commerce. »