Les nouveaux métiers bankable : femme, homo, juif et trans
31 mai 17:01, par KoussikoussaL’homme moderne s’agite, parade, achète. Deux mille euros la place pour un match, ce n’est pas du luxe, c’est de la peur capitalisée. Un prix élevé pour fuir l’odeur des autres, pour respirer un peu d’illusion climatisée loin du peuple — cette masse instable, imprévisible, vaguement menaçante.
Car malgré les discours rassurants, l’insécurité n’est pas un fantasme : c’est une obsession. Elle s’insinue partout. Dans les rétroviseurs, dans les sacs verrouillés, dans le métro qu’on ne prend plus. Elle n’est ni invention médiatique ni complot social. Elle est un reflet fidèle d’un monde morcelé, déréglé, où chacun sent confusément que la surface craque.
En face, les “French-Arabics”, réduits à une figure composite : un peu voyou, un peu musulman, un peu sauvage — suffisamment flous pour effrayer sans qu’on ait à les nommer vraiment. Ils ne sont ni les monstres qu’on décrit, ni les héros qu’on défend. Ils sont le symptôme : enfants d’un pays qui les tolère sans les accueillir, qu’on parque dans des blocs de béton et qu’on filme comme du gibier. Beaucoup aboient, certains mordent, tous dérangent.
Mais les bourgeois ne sont pas plus glorieux. Ils achètent leur tranquillité comme on achète une assurance-vie. Ils prétendent aimer la République, mais n’aiment que ses serrures. Ils militent contre la violence à condition qu’elle reste hors de leur vue, comme on chasse les rats sans jamais remettre en cause les ordures. Ils pensent qu’un billet à 2000 euros les distingue, les sauve, les élève. Il les emprisonne dans un confort toxique.
Et pour tenir ce théâtre debout, il faut des golems. Casqués, armés, déshumanisés. CRS, vigiles, surveillants : corps sans visage qui frappent sans haine, obéissent sans foi. On les méprise, mais on les appelle. Ils servent de tampon entre ceux qui tremblent et ceux qui grondent. Machines à gazer, à parquer, à rassurer.
Tous jouent leur rôle : les riches s’achètent des murs, les pauvres rêvent de les briser, et les intermédiaires tiennent les verrous en espérant ne pas finir dessous. Personne n’est innocent. Personne n’est digne. L’ordre tient par l’usure, la peur, l’habitude. Il tiendra encore, un temps.