Avec 37 meurtres, la Guadeloupe détient le record national d’homicide
27 septembre 2013 12:49, par michelleUne utilisation du Chlordécone au mépris de la santé de la population
Sous la pression des lobbies bananiers, l’Etat a autorisé l’usage d’un pesticide ultratoxique en Guadeloupe et Martinique, au mépris de la santé de la population.
Chlordécone, Képone, Curione…, les noms changent mais les effets demeurent : toxique et persistant, ce produit s’infiltre dans les sols et les nappes phréatiques et contamine toute la chaîne alimentaire. Massivement utilisé dans les bananeraies entre 1981 et 1993 en Guadeloupe et en Martinique contre un champignon (le cercosporiose) et un parasite (le charançon), ce pesticide est au centre d’un scandale sanitaire méconnu. Car son usage s’est poursuivi aux Antilles alors même qu’il était interdit en métropole depuis 1990 et que ses méfaits étaient connus depuis plusieurs décennies.
Dès 1975, de graves troubles neurologiques (tremblements, nervosité, troubles de la vue…) sont constatés chez des ouvriers de l’usine Hopewell en Virginie où l’on produit le pesticide Képone. L’usine ferme et le produit est interdit aux Etats-Unis, puis classé cancérogène dès 1979 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Mais après le passage des cyclones David (1979) et Allen (1980) aux Antilles, qui augmentent la présence des parasites dans les bananeraies, son usage est autorisé en 1981 en France par le ministère de l’Agriculture. L’entreprise Laurent de Laguarigue achète alors le brevet du chlordécone à Dupont de Nemours et fait fabriquer le produit dans l’Aude par la société Calliope avant de l’importer aux Antilles [1].
Lobbies agrochimiques et députés-bananes
Après son interdiction en 1990 en métropole, le ministère de l’Agriculture accorde une dérogation aux producteurs pour écouler leurs stocks jusqu’en 1993 en Guadeloupe et en Martinique. D’après Louis Boutrin et Raphaël Confiant [2], l’industrie agrochimique et celle de la banane ont alors exercé de fortes pressions sur les autorités françaises, notamment à travers des élus liés aux grands planteurs béké (*) , surnommés aux Antilles les "députés-bananes", qui ont plaidé en faveur de cette dérogation. L’économie antillaise est en effet très dépendante de la banane, une monoculture orientée vers l’exportation (voir "En savoir plus"). Afin d’y maintenir un haut niveau de production, au moins 300 tonnes de chlordécone ont été utilisées en Guadeloupe et en Martinique de 1972 à 1993.