Avec 37 meurtres, la Guadeloupe détient le record national d’homicide
27 septembre 2013 12:51, par michelleLe coût sanitaire
Or, la durée de vie du chlordécone dans les sols va de soixante-dix à sept cents ans (selon la qualité de la terre). Il se transmet ainsi aux cultures, contamine les élevages en pâture et, via les nappes phréatiques, pollue l’eau des rivières puis de la mer, atteignant les poissons et les crustacés. Amplifiés par l’écosystème insulaire, ses effets sanitaires sont dramatiques. En 2007, le rapport du cancérologue Dominique Belpomme [3], dans une démarche de contre-expertise initiée par l’association Pour une Martinique autrement (Puma), relevait une incidence du cancer de la prostate deux fois plus élevée en Guadeloupe et en Martinique qu’en France métropolitaine (et trois fois plus qu’en Jamaïque). Une forte progression apparaît également à partir des années 1980.
Face à cela, l’Etat a réagi avec beaucoup de lenteur, malgré les alertes des associations écologistes et de la DDASS de Guadeloupe. Dans sa chronologie de la "saga du chlordécone" [4], Pierre-Benoît Joly date le début de la prise de conscience de l’Etat en 1999, quand des filtres à charbon actif sont installés pour l’approvisionnement en eau potable. Il faudra encore attendre 2002 et la saisie à Dunkerque de patates douces polluées, en provenance de Martinique, pour qu’une analyse de sol soit rendue obligatoire avant la mise en culture des légumes-racines. Quant aux interdictions de pêche, les premières ne datent que de 2004, avant d’être renforcées en 2010 et 2013 (voir encadré). De même, il faudra attendre que Dominique Belpomme, s’empare de la question pour que le premier plan chlordécone global soit adopté en 2008.
Cette lenteur accrédite auprès des Antillais l’idée que l’empoisonnement de leurs îles est lié au mépris que leur témoignent les Français de la métropole et les békés. D’autant que l’étendue du préjudice est encore loin d’avoir été simplement établie, sans même parler de réparations. Les études épidémiologiques demeurent en effet singulièrement incomplètes. Et on ne connaît toujours pas les effets d’une exposition de longue durée au chlordécone, comme celle subie par les ouvriers agricoles des bananeraies, sachant qu’il s’agissait d’un produit qui s’épandait à la main.