Le Royaume fédéral britannique ou le Royaume des Länder
21 septembre 2014 03:56, par blobloTout ceci, par ailleurs, n’a rien de secret ou de dissimulé :
L’Allemagne a aussi aujourd’hui une véritable vision du futur de l’Europe, et pas la France. Pourquoi ?
Dans ses mémoires, le général de Gaulle notait que le régime fédéral imposé à l’Allemagne vaincue, afin de l’empêcher de bander à nouveau ses forces au point de menacer ses voisins, pourrait devenir un jour la matrice de l’Europe à venir. La remarque était pour le moins visionnaire, et nous sommes aujourd’hui placés devant le choix crucial qu’elle annonçait. En effet, l’Europe ne pourra ressembler à la France, car elle formerait alors un Etat unitaire supranational, dont les composantes ne seraient, à l’instar des départements ou des régions françaises, que des sous-ensembles dépendant d’un pouvoir central. Ce que récusent, à bon droit, les nations engagées dans la construction européenne, à commencer par la France elle-même. En revanche, le modèle allemand, celui d’une fédération qui préserve, selon des modalités à définir, l’autonomie de ses membres, est beaucoup plus facilement acceptable par tous. Mais la France s’interdit d’admettre que la seule voie praticable puisse être tracée par l’Allemagne, et se trouve de ce fait dans une impasse politique. Elle n’a rien à proposer et mène surtout des combats d’arrière-garde pour préserver des avantages acquis, dont la PAC.
La définition même du fédéralisme est différente, les Français insistant sur la délégation de souveraineté, les Allemands plutôt sur la protection. Est-ce aussi une source de malentendus ?
Quelle que soit sa définition, le fédéralisme implique à la fois un partage de souveraineté et la protection des entités constitutives. L’Allemagne, concevant l’Europe à son image, estime que la solidarité entre les Etats européens, faite de droits et de devoirs, doit peu ou prou ressembler à celle qui existe entre ses Länder. Mais plusieurs de ses partenaires, Paris en tête, n’acceptent pas les contraintes qu’implique une telle réciprocité. Les Allemands, faute de pouvoir (ni même de vouloir) imposer leur conception, multiplient les propositions, car ils ont le sentiment d’avoir accompli leur mue, et que les autres doivent s’y employer à leur tour. Cela dit, la donne se complique du fait de la tendance allemande à ramener le débat politique à des questions de droit.