Chroniques de la paix universelle – Épisode 2
3 novembre 2017 22:09, par Eric« Mais qui pouvait arrêter la guerre ? C’était la question capitale. Le gouvernement provisoire n’osait pas. Et la décision, bien entendu, ne pouvait pas venir des cercles militaires. Cependant le pouvoir devait obligatoirement passer à ceux qui seraient les premiers à prononcer le mot : paix. Et comme il arrive souvent en de tels cas, le mot juste vint du côté faux. Les bolcheviks prononcèrent le mot paix. D’abord, parce que tout ce qu’ils disaient ne présentait à leurs yeux aucune importance. Ils n’avaient pas la moindre intention de tenir leurs promesses, ils pouvaient donc dire tout ce qu’ils voulaient. C’était leur principal avantage et leur plus grande force. A côté de cela, il y avait encore autre chose. La destruction est toujours beaucoup plus facile que la construction. Combien il est plus facile de brûler une maison que d’en édifier une. Les bolcheviks étaient les agents de la destruction. Ni alors ni depuis, ils ne pouvaient et ne peuvent être autre chose, en dépit de toutes leurs vantardises et de l’appui de leurs amis déclarés ou cachés. Mais ils pouvaient alors et ils peuvent fort bien détruire, non pas tant par leur activité que par leur existence même, qui corrompt et désintègre tout autour d’eux. Cette qualité spéciale qui leur est propre expliquait leur succès grandissant et tout ce qui devait arriver beaucoup plus tard. Nous qui regardions les choses du point de vue de l’enseignement, nous pouvions voir non seulement le fait que chaque chose arrive, mais même comment elle arrive, c’est-à-dire combien aisément chaque chose, dès qu’elle a reçu la plus petite impulsion, descend la pente et s’en va en morceaux. »
Ouspensky, Fragments d’un enseignement inconnu (1949).