La dette publique : une fatalité ?
9 mai 2018 13:38, par nico31Qui porte la responsabilité de la crise financière et économique qui maintient le monde entier en haleine depuis 2008 ? Sont-ce les « banquiers cupides » ou les « États accro à l’endettement » ? D’après Ernst Lohoff et Norbert Trenkle, théoriciens allemands du groupe « Krisis », aucune de ces réponses n’est satisfaisante. La cause de la crise est en effet selon eux bien plus profonde. Ils analysent l’énorme gonflement des marchés financiers au cours des trois dernières décennies comme une conséquence de la crise structurelle fondamentale du mode de production capitaliste, dont l’origine remonte aux années 1970. La troisième révolution industrielle qui se met en place alors entraîne une éviction accélérée de la force de travail hors de la production, sapant ainsi les bases de la valorisation du capital au sein de « l’économie réelle ». La crise structurelle de la valorisation du capital n’a pu jusqu’ici être ajournée qu’en ayant massivement recours, par le biais du crédit et de la spéculation, à la capture anticipée de valeur future. Aujourd’hui, l’accumulation de « capital fictif » trouve ses limites, car les anciennes créances accumulées ne peuvent plus être « honorées ».
Le concept de « capital fictif » – telle est la thèse des deux auteurs – est fondamental pour comprendre le procès de crise actuel. Après un bref rappel historique de Norbert Trenkle sur l’évolution de l’économie dans la seconde moitié du vingtième siècle, Ernst Lohoff expose, dans la deuxième partie de l’ouvrage les bases théoriques pour la compréhension de cette sorte de capital (qu’il propose de nommer « marchandises d’ordre 2 ») et de son rôle dans le procès d’accumulation capitaliste. La troisième partie analyse l’évolution de la fonction du capital fictif dans le développement du mode de production capitaliste. S’il ne jouait qu’un rôle secondaire lors de la révolution industrielle, il prend une importance accrue à l’époque du fordisme, comme initiateur et point de départ de l’accumulation. Mais tandis que cette anticipation pouvait encore être honorée par une production de valeur réelle, cela n’est plus le cas aujourd’hui, à l’âge de la troisième révolution industrielle. Le capital fictif s’est transformé à son tour lui-même en moteur de l’accumulation, ce qui ne peut fonctionner qu’à travers une mainmise toujours plus importante sur l’avenir.
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