Poutine accélère la dédollarisation de la Russie
9 août 2019 19:54, par nicolasjaisson"Ces dernières années, la banque centrale russe a commencé à se débarrasser de ses dollars à un rythme rapide."
Quand la banque centrale russe se "débarrasse" de 10 milliards de T-bonds à grandes annonces de presse, le Trésor américain place 100 milliards d’obligations sur le marché en une semaine les doigts dans le nez. Car rien ni personne ne peut contester la place des obligations américaines en tant qu’investissement liquide dédié au financement des produits dérivés dont sont tellement friandes les banques occidentales. Si quelqu’un a conforté la place du dollar comme monnaie de financement, c’est bien le camarade Poutine qui a ratiboisé toutes les chances de décollage des marchés financiers en roubles. Il a tout éradiqué : le private equity, les fonds d’investissement, l’asset management, le private banking, etc. Comme après le passage des cavaliers mongols, il ne reste RIEN du capitalisme financier russe, si bien que la Russie est entièrement dépendante du capital étranger pour ses investissements dans le homeland. Les Russes de Sibérie occidentale et de l’Oural goûtent très moyennement l’arrivée des entrepreneurs chinois ravis de profiter de statuts fiscaux privilégiés pour mettre en valeur les régions délaissées par le Kremlin faute de moyens budgétaires. Ainsi la disparition du capitalisme financier russe (en roubles !) est une véritable trahison pour des Russes livrés aux appétits voraces de investisseurs chinois auxquels s’ouvrent les horizons infinis de l’espace sibérien, véritable terre promise pour des technocrates en mal d’exportation de leur déflation. Mais ce n’est pas tout, car le gouvernement russe ambitionne aussi de privatiser les services publics non rentables dans les régions qui doivent rendre un compte scrupuleux de la bonne gestion des moyens budgétaires qui leur sont alloués. C’est notamment le cas des forestiers qui ont fait les frais des coupes budgétaires, au profit des entreprises chinoises spécialisées dans l’exploitation forestière. On a vu le résultat lors des incendies gigantesques qui ont ravagé des millions d’hectares dans la région du Baïkal et de Krasnoïarsk. Poutine fait trop confiance aux capitaux chinois pour développer la Russie. Il va s’en mordre les doigts, à l’instar de la Kirghizie qui sort paupérisée et socialement déstabilisée (cf. l’assaut récent des forces spéciales contre le domicile de l’ancien président kirghize) de plusieurs décennies d’ouverture aux investissements de la "route de la soie".