Egalité et Réconciliation
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Analyse et enjeux du vote des fonctionnaires pour le FN

1 Un enjeu électoral décisif





Par le nombre

Selon Luc Rouban, directeur de recherche au Cevipof, le vote des fonctionnaires constitue « un enjeu de première importance » .Les fonctionnaires représentent en effet un électorat décisif au cœur de la « classe moyenne ».

L’un des plus importants si ce n’est le plus important. Si l’on prend l’ensemble des secteurs publics, il y a entre 5,1 et 6,1 millions d’agents publics en France. Soit 23 à 24% de la population active et 1/6 de l’ensemble de l’électorat.

Si l’on ajoute les conjoints et les familles, cette proportion grimpe à un tiers.

Cet ensemble regroupe plusieurs catégories d’agents publics qu’il faut distinguer. Le noyau dur des fonctionnaires titulaires de l’Etat représente 2,5 millions de personnes auxquels il faut ajouter 1,8 à 1,9 million d’agents des collectivités territoriales, 700 000 fonctionnaires des établissements publics hospitaliers, entre 350 000 et 600 000 personnes qui travaillent sous des statuts contractuels, et 300 à 400 000 personnes travaillent dans les entreprises nationalisées (EDF, SNCF, RATP, etc.).

Par les pratiques électorales

De surcroît, les agents publics participent toujours plus aux élections que les salariés du privé. Les enquêtes réalisées par le Cevipof depuis 1978 montrent ainsi que le taux de participation est en moyenne supérieur de 5 points chez les fonctionnaires par rapport aux salariés du privé.


2 Le Front national sous-représenté dans l’électorat fonctionnaire

Un score FN inférieur de moitié à sa moyenne nationale

Forces de l’ordre et militaires mis à part, les fonctionnaires ont toujours eu tendance à moins voter pour le Front national que la moyenne des Français, et notamment que la moyenne des employés du privé à revenu comparable. Ainsi, lors de l’élection présidentielle de 1988, Jean-Marie Le Pen ne recueillait que 9% des voix de la fonction publique, pour un score national légèrement inférieur à 15% (Sofres).

L’écart est encore plus significatif lors de l’élection présidentielle de 1995, quand 7% des agents publics (et même seulement 1% des enseignants) choisissent le bulletin de vote Le Pen, contre 15% des Français au niveau national (Sofres).

L’écart ne diminue pas en 2002, quand 8% des fonctionnaires et près de 17% des Français votent pour le candidat du FN (Sofres).

2007 : début de retournement de tendance ?


Les informations concernant le vote en 2007 sont encore rares. La seule enquête exploitable, une étude post-électorale réalisée par l’institut Ipsos, pourrait cependant révéler un début d’inversion de tendance, puisque Jean-Marie y est crédité parmi les « salariés du public » (le terme est assez vague) d’un score comparable à celui qu’il obtint au niveau national, près de 11%.

S’il s’avérait confirmé par d’autres enquêtes, ce score représenterait le meilleur résultat jamais obtenu par le candidat du Front national lors d’une élection présidentielle chez les fonctionnaires, sûrement séduits par un discours mettant davantage l’accent sur les dangers de la mondialisation ultralibérale et du libre-échange débridé.

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3 Une population pourtant plus rétive que la moyenne aux dérives de la mondialisation



Une forte opposition au libéralisme


Les enquêtes montrent une forte réticence des fonctionnaires à l’idéologie libérale, qui se traduit par une opposition quant à l’engagement de la France dans une économie financière mondialisée. Les cadres de la fonction publique ne sont ainsi que 49% à valoriser la notion de « libéralisme » pour 69% des cadres du privé (enquête TNS Sofres de 2006). 37% des enseignants et 50% des employés de la fonction publique partagent cette opinion. Selon Luc Rouban, chercheur au Cevipof, ces chiffres reflètent une « évolution relative à l’égard de la notion de libéralisme qui commence à pénétrer peu à peu le milieu administratif ».


Le NON à la Constitution européenne plus fort que dans le reste de la population

Si 54,7% des électeurs français ont rejeté le 29 mai 2005 le Traité établissant une Constitution pour l’Europe, l’opposition à ce texte fut plus importante encore au sein de la population fonctionnaire. Ainsi, 52% des cadres de la fonction publique ont voté NON, contre 37% des cadres du privé. Ce taux atteint 53% chez les enseignants et 73% parmi les employés du secteur public (contre 69% chez leurs homologues du privé).