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Génocide du Rwanda : un matraquage médiatique ne fait pas une vérité historique

par Bernard Lugan

Chaque année à l’approche du 6 avril, date anniversaire du début du génocide du Rwanda (6 avril 1994), les médias répètent les mêmes poncifs tout en se faisant, volontairement ou non, la caisse de résonance des thèses de Kigali.

Nous aurons ainsi droit à des émissions de télévision annonçant des « révélations embarrassantes » pour la France, à une campagne de promotion à la limite de la complaisance pour un livre qui n’apporte rien de nouveau et à une avalanche de déclarations aussi creuses qu’orientées. Tout ceci n’est qu’enfumage.

Le fond du problème est que la thèse fondant la « légitimité » du régime de Kigali, à savoir celle du génocide « programmé » et « planifié » par les « extrémistes » hutu, a volé en éclats devant le TPIR (Tribunal pénal international pour le Rwanda).

Ce tribunal créé par le Conseil de sécurité de l’ONU et siégeant à Arusha depuis 1995 a en effet, dans tous ses jugements concernant les « principaux responsables du génocide », que ce soit en première instance ou en appel, clairement établi qu’il n’y avait pas eu « entente » pour le commettre [1]. Si ce génocide n’était pas programmé c’est donc qu’il fut spontané et ce qui le provoqua fut l’assassinat du président Habyarimana.

Voilà pourquoi la question de savoir qui a ourdi cet attentat est primordiale. Or, il n’y a jamais eu d’enquête internationale menée sur ce crime qui coûta la vie à deux présidents en exercice légitimement élus, celui du Rwanda et celui du Burundi qui avaient pris place dans le même avion.

Par les énormes pressions qu’ils exercèrent sur le Conseil de sécurité de l’ONU, les États-Unis et la Grande-Bretagne, alliés indéfectibles du régime de Kigali, réussirent à interdire au TPIR de mener cette enquête. Comme ce tribunal spécial vient de terminer ses travaux, les auteurs de ce crime ne seront donc ni identifiés, ni poursuivis [2].

Saisie par les familles de l’équipage français de l’avion, la justice française s’est risquée sur cette affaire. Au terme de son enquête, le juge Bruguière a accusé le général Kagamé et lancé neuf mandats d’arrêt contre des membres importants de son premier cercle. Après le départ à la retraite de ce magistrat, l’enquête fut reprise par le juge Trévidic qui ajouta de nouvelles pièces au dossier et qui devra, tôt ou tard, faire la balance entre les documents contradictoires le constituant.

En attendant, Kigali est à la manœuvre car c’est l’existence même du régime qui est en jeu. Tout est donc fait pour influencer médiatiquement la justice française, l’objectif visé étant la levée des mandats d’arrêt délivrés par le juge Bruguière avant le vingtième anniversaire du génocide et ce, afin que l’enquête soit définitivement enterrée, ce qui arrangerait la communauté internationale.

Le monde entier a en effet intérêt à ménager le régime de Kigali, lui qui détient la clé de la paix et de la guerre dans toute l’Afrique centrale, région productrice des minerais rares permettant à l’industrie de l’électronique de tourner. De plus, au moment où le Sahel s’embrase, personne ne veut voir un nouveau front s’ouvrir dans la région des Grands Lacs.

Le dossier de l’attentat du 6 avril 1994 cessera-t-il donc d’être l’affaire de la Justice seule pour devenir celle de la diplomatie [3] ? Dans notre « république irréprochable », rien n’est impossible en ce domaine…

Notes

[1] À l’exception du jugement de Jean Kambanda, ancien Premier ministre condamné en 1998, après qu’il eut plaidé coupable contre la promesse d’une peine réduite, procédure qui de facto lui avait fait accepter l’acte d’accusation du procureur. Depuis, il est revenu sur cette reconnaissance.

[2] Depuis le 1° avril, le Rwanda assume pour un mois la présidence tournante du Conseil de sécurité

[3] Le numéro 41 (mai 2013) de l’Afrique réelle fera le point sur ce dossier.

 






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8 Commentaires

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  • #380489

    Si le génocide n’a pas été planifié c’est qu’il n’a pas eu lieu. En effet il faut réellement être déconnecté du réel pour croire qu’il est possible d’éradiquer une dizaine de pour cent d’une population en quelques semaines/mois sans préparation préalable. On n’a jamais vu ça ailleurs et pourtant les régions du monde où coexistent des ethnies éprouvant une antipathie historique réciproque ne manquent pas ! Comment au Rwanda fut possible de manière spontanée ce qui ne se produisit pas au Liban, en Irak, en Afrique du Sud, en Inde, au Pakistan, Kenya, Libye... ? Soyons sérieux 5 minutes ! Un coup de sang spontané désorganisé peut provoquer des émeutes et des massacres sanglants se traduisant par quelques centaines voire milliers de morts mais pas un carnage allant jusqu’à éradiquer 10% d’une population ! Pour provoquer la mort brutale et rapide de 5% et plus d’une population d’un pays il faut un conflit organisé, planifié avec des armes de guerre. Des pourcentages de populations éradiquées représentant 5% et plus de la population totale d’un pays correspondent aux statistiques rencontrés lors de conflit tels que les première et deuxième guerres mondiales, en d’autres termes cela veut dire qu’il faut une guerre totale à l’arme lourde pour pouvoir obtenir de telles coupes franches dans les populations. Et précisons qu’il a fallu plusieurs années pour exterminer 10 à 20% de la population de certains pays européens. Or on voudrait nous faire gober que des miliciens dégénérés furent capables d’atteindre un niveau d’efficacité dans le massacre identique à ce que l’on rencontre lors de conflits majeurs planifiés à l’arme lourde juste avec des coupe-coupe, gourdins cloutés et des kalachnikovs ? On voudrait nous faire croire que sans aucune planification ils ont été capables d’anéantir 10% de la population en 100 jours alors que durant la seconde guerre mondiale il fallu plusieurs années de bombardements, de gazages, de mitraillages, de famines...pour obtenir des pourcentages d’éradication similaires.
    Conclusion : soit il n’y a jamais eu entre 800000 et 1 millions de morts, les chiffres furent gonflés, soit il y a eu génocide et de ce fait cela fut forcément planifié minutieusement.

     

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    • C’est pertinent mais à partir du moment ou tu t’en prends à une population directement qui n’a pas de moyen de partir ou de se cacher, peu de moyen de défense peu ou pas de moyen de communication, cela peut aller vite.

       
    • Il dit que la thése à "volé en éclat".
      C’est pas pour rien quand même.....

       
    • Pour mieux comprendre il faut remonter ds les années 1959 pour voir ce qui s’est appelé une révolution, il ne s’agissait pas d’une révolte de la population rwandaise contre les colonisateurs belges mais une révolution des hutus contre la monarchie tutsi, pour quoi les hutus ce sont -ils révoltes ? pour quoi une partie de tutsis a été obligé de prendre la fuite ? la haine entre hutus et tutsis ne date pas de 1994, mais bien avant l’ère coloniale.
      Revenons en 1994 où on a une population composé de 90% de hutus au pouvoir sous la menace d’une milice tutsi FPR qui reculte et se cache ds ces 10% et d’autres hutus qui n’étaient pas satisfait du pouvoir en place ( je dis pas que ça justifie le massacre qui a eu lieu , je veux juste dire combien la tension était trop élevé). les gens ne ce sont pas fait massacrés pas une milice qui venait de loin mais leurs voisins qui les prenaient pour leurs ennemis et la plus part des gens ont été tué à l’arme branche ou traditionnel (machette, lance, gourdin ....) tandis que le pouvoir en place encourageait ce massacre et armait la population en prétendant que c’est pour se défendre contre le FPR ce qui était d’ailleurs ridicule. Alors je dirais que il y avait trop de haine envers les tutsis et que la tension a atteint son comble avec attentant contre l’avion du Président Juvénal Habyarimana mais la planification j’en doute fort ! Par contre les massacres dans les camps de réfugiers au Congo RDC a était planifié car ça a été fait par une armée et pas par une partie de la population fou de rage. Mais après tous c’est mon opinion !

       
  • #380741

    jeanmi,

    Exterminer 10% de la population totale d’un pays en 100 jours c’est à la fois rapide et long ! Rapide parce qu’en l’espace de 3 mois il fut possible d’obtenir un pourcentage d’éradication d’une population qui approxime voire dépasse ce que des conflits majeurs purent accomplir après plusieurs années de bombardements, de gazages, d’embargo, de famines...Même avec tout ce qu’a subi l’Irak on a à peine atteint 10% d’éradication de la population totale et ceci après plusieurs années de supplice. Or pour le cas Rwandais on voudrait nous faire croire que sans aucune planification préalable des dégénérés purent exterminer en 3 mois 10% de la population du pays avec juste des machettes, des houes et gourdins. La seule explication que l’on nous propose à ce "miracle" est psychologisante, c’est à dire une haine ancestrale couplée à une sorte de crise d’hystérie collective contagieuse qui a touché du jour au lendemain à travers l’ensemble du pays les gens et qui a duré durant 3 mois ! C’est long ! C’est très très long pour un coup de sang 3 mois ! La plupart des être humains connaitrait un effondrement psychologique après quelques jours de carnage. Seul des gens ayant un profil psychologique particulier, recrutés et entraînés peuvent pendant plusieurs mois d’affilés psychologiquement supporter de quotidiennement après leur petit déj’ aller débiter des femmes et enfants au coupe-coupe...quand on demande comment ils ont fait les mecs pour parvenir à exterminer autant de monde on reçoit le même type de réponse que qu’en on a l’outrecuidance de demander quelques précisions techniques sur le prétendu déroulement d’un certain point de détail de la seconde guerre mondiale : haine, racisme...et même télépathie* ! Ah la haine ! Cette émotion magique qui permet de défier les lois de la physique, de surmonter les limitations matérielles ! La haine qui rend l’impossible possible !
    Donc au Rwanda soit il y a juste eu massacres, soit il y a eu un génocide et dans ce cas seul une planification minutieuse peut expliquer le niveau d’efficacité atteint.

    * : La télépathie fut un argument utilisé lors d’un procès de Faurisson au Canada pour expliquer comment il fut possible d’entreprendre le génocide fruitier sans qu’aucun ordre verbal spécifique ne fut donné. Aucune trace historique, aucun document administratif écrit n’a pu être trouvé sur la mise en oeuvre de l’Ananas. Un expert de l’Ananas a donc le plus sérieusement avancé lors du procès la télépathie comme argument.

     

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  • On peut aussi l’expliquer par la propagande constante anti-tutsi qui a travaillé les esprits depuis l’avènement de la république au Rwanda.

    C’est la même chose en France depuis les années Mitterrand ou les français font l’objet d’une propagande haineuse vis-à-vis des populations immigrés.

    En fait, il s’agit de diviser pour régner.

     

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  • #381198

    Monsieur Lugan, comment comprenez-vous ce titre du journal Le Monde du 4 février 1964 (j’ai bien écrit mille neuf cent soixante-quatre) :
    "L’extermination des Tutsis - Les massacres du Ruanda sont la manifestation d’une haine raciale soigneusement entretenue"
    Dans l’article on parle de 8000 morts dans une seule province du Rwanda en décembre 1963. Est-ce que cela fait partie du matraquage médiatique de 2013 ? A cette époque, le FPR n’existait pas et les exilés Tutsi n’étaient pas encore organisés en Ouganda. Ils ne pouvaient pas "influencer" la communauté internationale.

    Voir sur le lien suivant une photo du titre du journal Le Monde du 4 février 1964

    Emmanuel Cattier

     

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    • La haine entre les deux ethnies ne date pas de 1994 mais bien loin de là, avant même l’ère coloniale, mais qu’est ce qui a provoque cette haine ? pour quoi ils se détestent autant ? pour quoi ils ne cessent pas de se massacrer à la moindre occasion ? on compte entre 800 000 et 1000 000 de tutsis tué en 1994 et récemment le rapport de l’ONU a publié que 4 000 000 hutus on été massacrés das les forets de l’ex Zaïre, et on dénombres beaucoup d’exactions commis pas les soldats de la FPR entre 1996 et 1999 sur la population civile hutus au sein même du pays Rwanda dans le nord du pays. Si on regarde dans les pays voisin on voit le même problème au Burundi (actuellement en état de paix par accord) et en RDC cette fois ci pas entre hutus et tutsis mais entre tutsis et le reste de la RDC , Tout en condamnant toute forme de massacre et de haine raciale, à mon avis les hutus ne sont pas des anges mais les tutsis y sont pour quelque chose.