Les presses italienne et suisse ont annoncé la mort de Thomas Mazzone. Selon les premières informations relayées par Il Secolo XIX et Blick, Thomas a été retrouvé sans vie en mer, au large de Celle Ligure, près de Gênes, le mardi 3 juin 2025.
C’est un passant qui, vers 17 h 20, a donné l’alerte. Les pompiers plongeurs, les gardes-côtes, les services médicaux et un hélicoptère de secours ont été mobilisés. Malgré les tentatives de réanimation, il était trop tard. Une enquête est en cours pour déterminer les circonstances précises de sa mort.
Thomas Mazzone, Italo-Suisse âgé de 41 ans, était le frère de Lisa Mazzone, figure politique de premier plan en Suisse. Présidente des Vert-e-s suisses, Lisa s’est illustrée ces dernières années par son engagement en faveur de l’écologie, de l’inclusion sociale et de l’ouverture des frontières – comme en témoigne son plaidoyer pour une migration « qui enrichit la Suisse » dans cet entretien accordé à 24 Heures.
Mais Thomas, lui, se tenait à bien des égards aux antipodes de ces idées. Plus réservé, plus sceptique, il portait un regard critique et lucide sur les grands mouvements idéologiques contemporains, notamment la question migratoire. Son analyse, souvent ancrée dans une volonté de comprendre les dynamiques de pouvoir et les transformations sociales, transparaît clairement dans cette intervention, où il aborde les enjeux de l’immigration et de l’identité avec une rigueur rare.
Mon premier contact avec lui remonte à 2013, sur Égalité & Réconciliation. Il avait commenté un article avec une critique à la fois vive et d’une étonnante justesse. Intrigué par sa plume, j’ai pris contact avec lui. J’ai découvert un homme à la pensée fine, structurée, toujours en mouvement intellectuel. Un autodidacte érudit. Rapidement, il est devenu un intervenant régulier de mes vidéos, où il prenait part à des débats avec des personnalités de tous horizons.
Sa capacité à écouter, argumenter sans jamais sombrer dans la provocation gratuite, faisait de lui un interlocuteur rare. Il ne cherchait pas l’approbation, mais la cohérence et l’exactitude. Sa vidéo la plus marquante, selon moi, figure dans une compilation aux côtés d’Alain Soral et Gilad Atzmon. Intitulée « Qu’est-ce qu’être antisémite ? » – une réponse en clin d’œil à la série d’Esti –, cette intervention révélait tout son talent pour clarifier les enjeux idéologiques avec calme, humour et acuité. Elle résonne aujourd’hui plus que jamais à la lumière de la tragédie en cours à Gaza.
Il faut aussi rappeler l’un de ses entretiens les plus brillants : celui réalisé en 2014 pour Égalité & Réconciliation, dans lequel il commentait avec finesse et profondeur la politique française et suisse. Ce dialogue, loin de toute caricature, témoigne du haut niveau de conscience politique qui l’animait.
Thomas était un esprit complexe, entier, souvent incompris. Il refusait les étiquettes, les lignes toutes tracées. Ses idées, parfois tranchées, étaient toujours le fruit d’un travail de réflexion personnelle. Ce caractère indépendant, et souvent dérangeant pour les esprits conformes, l’a progressivement éloigné de la sphère publique. Ces dernières années, il avait choisi de vivre en marge, en Italie, dans une forme de retrait assumé, loin du tumulte médiatique, mais jamais éloigné du monde des idées.
Il laisse derrière lui un vide dans le paysage intellectuel critique, un silence étrange, comme une voix qu’on aurait voulu entendre encore une fois.
Adieu camarade.