Kriss, c’était une voix chaude et sucrée, celle de FIP (France Inter Paris) en 71, celle de ses portraits (sensibles) d’inconnus dans la rue en 2000-2004, mais aussi un joli sourire, qui lui ouvrira les portes de la radio. Kriss s’en servira accessoirement pour draguer avec une subtilité de diplodocusse un certain Chirac – le Chi – en 2005.
Faut pas rêver non plus, les gars : la beauté, ça facilite les choses. Ça « fait gagner deux semaines » selon Cocteau, le maigre moche qui courait après la beauté musclée, mais qui savait l’attraper par des moyens lascifs. Après, y a le travail, et le talent.
Pourquoi ressortir Kriss de sa tombe ? Le hasard des rencontres sur Google, voilà tout, et le miroir de cette radio sans prétention ni propagande avec l’horrible station d’aujourd’hui, carrément Radio Paris. Imaginez, le duo vulgaire Salamé-Demorand, incarnation de l’information biaisée et du divertissement rabaissant, c’est même pas dicible, l’effondrement.
Attention, on ne fait pas dans le c’était-mieux-avant, plutôt dans le c’est-pas-top-aujourd’hui. Les gens qui nous disent, ah, les années 60, la belle vie, Bardot, les vacances, le soleil, la consommation, le grand Charles, l’abondance... D’accord, mais guerre d’Algérie, soldats qui veulent pas retourner sur le front, CRS armés qui menacent les « rappelés » sur les quais de gare, mecs égorgés à 20 ans, razzias dans les villages, viols… Peut-être que c’est la mémoire sélective qui nous sauve tous, celle qui sait oublier pour qu’on puisse vivre en paix....
Alors, vous préférez quoi ?, une France en paix (pour l’instant) mais en galère économico-sociale comme aujourd’hui, sous le régime Macron, ou 25 000 jeunes Français morts au combat et dans les attentats, 65 000 blessés, plus 50 000 harkis éviscérés, « contre » 150 000 combattants (on n’a pas dit terroristes) FLN en face (250 000 avec les civils selon la France, 1 500 000 selon l’Algérie) ?
Les feux de chaque côté sont mal éteints, on le voit partout avec les exactions des jeunes Algériens en France et un pouvoir qui, culpabilité oblige, n’ose pas les tabasser comme il a tabassé les Gilets jaunes. Chez les pieds-noirs, on n’a pas oublié.
« On a été chassés comme des chiens en 62, moi j’ai la moitié de ma famille qui a été égorgée. »
Aujourd’hui, Tebboune fait chanter Macron avec des dossiers et paralyse la réponse française à l’invasion des jeunes Algériens qui ne rêvent que de visas français, tout en crachant un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, ou pas du tout (pour les moins cons), sur la France.
Retailleau, qui se la joue ministre d’opposition, selon l’expression du JDD, même si tout ça est cousu de fil blanc, joue au dur avec les Algériens, sur le mode Sarko. On a vu le résultat. Le Système sait gérer les oppositions contrôlées, et on peut être sûrs que la Retaille saura montrer patte blanche le jour venu, quand il aura sucé les voix du RN à Marine et qu’il dirigera la France... comme Macron ! D’ailleurs, ces deux petits lapins roses ont l’air de bien se connaître.
ARCHIVE
En 2014, un échange montrait la complicité entre Macron et Retailleau.
Toute cette polémique actuelle n'est que du théâtre, ils sont main dans la main et prennent les français pour des imbéciles.pic.twitter.com/h0T6Insgiv— Jon De Lorraine (@jon_delorraine) July 24, 2025
On est partis de la douceur de Kriss, fait un détour par l’atroce guerre d’Algérie, et on arrive dans le énième faux duel d’une France politiquement bloquée, où le parti des médias, comme l’écrit justement Acrimed, fait en sorte que les extrêmes, de plus en plus grosses de colères, soient écartées du pouvoir.
La double pression des pôles contre le centre est trop forte, le double barrage cèdera, le centre sera broyé par LFI et le RN (malgré la bardellisation du parti, seconde phase de la dédiabolisation, c’est-à-dire le recentrage néolibéral du populisme de droite). La course de vitesse entre l’insurrection sociale – la France en est le leader mondial – et la guerre – censée sauver le régime – contre la Russie, est lancée. L’histoire, chers amis, n’est pas finie.