Egalité et Réconciliation
https://www.egaliteetreconciliation.fr/
 

Ligue arabe : un plan de paix « médiatique » et mort-né

Les autorités syriennes ont annoncé la libération, samedi 5 novembre, de 553 personnes arrêtées lors des troubles. Selon Sana, ces élargissements s’ajoutent à 119 autres intervenus récemment. Le gouvernement avait annoncé des mesures qui ne concernaient toutefois que les personnes n’ayant pas été impliquées dans les meurtres.

Par ailleurs on rappellera que ces mêmes autorités ont invité, le 4, les personnes détentrices d’armes – et n’ayant pas, elle non plus, été impliquées dans des violences meurtrières – à rendre leurs armes dans les commissariats et postes de police, ce entre le samedi 5 et le samedi 12 novembre.

Le « jeu de rôle » de Nabil al-Arabi

Les violences meurtrières, elles continuaient samedi, l’OSDH ajoutant une dizaine de victimes « civiles » à son comptage. Ces « civils » auraient presque tous été tués à Homs, ville où se déroulent le gros ces affrontements entre les forces de l’ordre et les activistes et supposés déserteurs. Il y a donc fort à parier que tout ou partie de ces victimes ont péri les armes à la main.

Prétextant de la poursuite de ces violences, la Ligue arabe fait la grosse voix : samedi 5 novembre, son secrétaire général Nabil al-Arabi a exigé de Damas « des mesures immédiates » pour « protéger la population civile » et mettre en œuvre le plan de paix intérieure accepté par la Syrie mercredi 2 novembre au Caire. Nabil al-Arabi s’est même fait menaçant : « Un échec d’une solution arabe aura des conséquences désastreuses en Syrie et dans la région » a-t-il déclaré.

Les Syriens n’ont pas tardé à réagir, à ce ton et à ces mots : Youssef Ahmed, délégué permanent syrien auprès de la Ligue arabe, s’est officiellement étonné, lundi 7 novembre à la télévision syrienne, de ces déclarations de Nabil al-Arabi, l’accusant en gros d’endosser un habit de procureur au lieu d’assumer sa mission de dialogue et de coordination entre la Ligue et Damas.

« Par ces déclarations, le secrétaire général de la Ligue arabe crée une confusion, en porte à faux avec le plan d’action arabe, et par là même joue un rôle dépassant ses prérogatives, stipulées par la charte de la Ligue » a notamment déclaré Youssef Ahmed, qui a précisé que les propos de M. al-Arabi étaient d’autant plus déplacés que celui-ci est régulièrement renseigné par le gouvernement syrien sur les actes de violences commis contre les militaires, policiers et civils par les groupes armés.

Voilà pour la réaction officielle syrienne. Quant à nous (Infosyrie), on rétorquera à M. al-Arabi que c’est justement pour « protéger la population civile » que l’armée et la police continuent d’intervenir, notamment à Homs où, selon des témoignages concordants, les activistes ont engagé depuis plusieurs jours une guérilla urbaine d’ampleur et tentent d’imposer leur ordre dans plusieurs quartiers, commettant au passage des meurtres de civils, des vrais ceux-là.

Quant à l’« échec » de la « solution arabe », il était, on l’a dit ici dès le début, programmé, l’Etat syrien ne pouvant faire moins que de défendre sa population et sa légitimité face à des terroristes qui n’observeront jamais aucune trêve. Mais les diplomates de la Ligue à direction qataro-saoudienne croyaient-ils vraiment au succès de leur plan ? Nous parions que non. Et nous pensons que la bruyante promotion médiatique dudit plan n’avait d’autre finalité que de dédouaner les dirigeants arabes vis-à-vis des Américains. Et, les violences continuant, d’accuser le régime syrien de duplicité. Certains diront que nous voyons le mal partout, et notamment du côté du Golfe…

Dans ces conditions très prévisibles, Bachar et son gouvernement devaient-ils accepter le « plan » de la Ligue ? Il y avait, compte tenu de la pression internationale, un geste « de bonne volonté » à envoyer au monde, amis comme ennemis. On l’a vu, le pouvoir syrien s’efforce de séparer le gros des mécontents et opposants « raisonnables » des extrémistes et maximalistes, qu’il s’agisse du CNS ou des bandes armées (voir notre article « 

Après Le Caire… le pouvoir fait un geste envers certains radicaux », mis en ligne le 4 novembre). Il souhaite isoler la petite minorité radicale du gros d’une population peu tentée par un chaos à l’irakienne et un projet de société à la saoudienne. Tout va dépendre, en fait, de la capacité du régime à mettre rapidement hors d’état de nuire plusieurs milliers d’activistes assez bien armés.

La Russie s’en prend expressément aux « éléments destructeurs et radicaux »

Maintenant, doit-on prendre au tragique la mise en garde solennelle d’un al-Arabi ? La Ligue arabe ne pourra pas faire beaucoup plus que des communiqués vertueusement réprobateurs. Et, de surcroît, on a enregistré une confirmation importante ces derniers jours : la Russie, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, a réaffirmé, le 1er novembre, son opposition inflexible à toute intervention militaire otanesque contre la Syrie, et a incité – pour la première fois aussi nettement – l’opposition à « ne pas rejeter les appels au dialogue » et « à ne pas s’associer aux éléments destructeurs, radicaux et extrémistes, et aux groupes armés qui reçoivent des armes de l’étranger ». C’est clair : l’OSDH et les humanistes à la sauce Facebook peuvent continuer de désinformer les médias et politiciens occidentaux – victimes consentantes de cette désinformation – en faisant pleurer sur les manifestants démocrates et pacifiques, en Russie – et ailleurs – ça ne prend plus !

Cette nouvelle déclaration du patron de la diplomatie russe met selon nous un terme définitif aux velléités de mise au ban onusienne de la Syrie par l’axe euro-américain. Moscou fait sienne, pour l’essentiel, la grille de lecture de Damas sur la nature des troubles qui ensanglantent le pays. « Les faits sont têtus » disait naguère Lénine, et dans toute cette histoire syrienne, la désinformation pourrait bien finir par se casser les dents sur la réalité, comme elle ne devrait pas tarder à le faire aussi en Libye.