Egalité et Réconciliation
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"Même les journalistes à la télé sont en pleurs"

* Katyn, lieu maudit, par Zuzanna Studnicka

La Pologne est en pleurs. Des gens de toutes les couleurs politiques se recueillent devant la Maison Blanche, qui commence à ressembler au Palais de Buckingham après la mort de la princesse Diana. La situation pourrait presque paraître grotesque. Le président Kwasniewski a lui-même déclaré dans une interview que si jamais un auteur décrivait ce scénario - une élite polonaise meurt en se rendant a Katyn pour commémorer les 70 ans du massacre d’une autre élite polonaise - on lui dirait que son imagination va trop loin. Et pourtant, c’est ce qui s’est passé. Tout le monde reste scotché devant la télé, on essaye de comprendre. Mais personne ne se rend compte que tout cela est vrai, qu’une catastrophe comme le monde n’en a jamais vue vient de se produire en Pologne. Katyn reste un lieu maudit pour tous les Polonais.

* Les journalistes en pleurs, par Karol

On n’arrive pas à y croire. Même les journalistes à la télé n’arrivent pas à s’exprimer. Ils pleurent. Chacun de nous a des larmes dans les yeux... même ceux qui ne soutenaient pas le pouvoir... Qu’ils reposent en paix...

* Une tragédie politique, par Wawrzyn Warkocki

Il s’agit de la tragédie politique la plus terrible depuis la mort du président Gabriel Narutowicz en 1922 [assassiné après deux jours de mandat]. On a perdu plusieurs hommes politiques parmi les plus importants du pays. C’est à peine croyable. Beaucoup de gens semblent ne pas mesurer l’ampleur du drame. On parle beaucoup, les informations viennent de toutes parts, mais il n’est pas sûr que tous aient mesuré la puissance du coup qui vient d’être porté à la politique polonaise. L’ambiance est vraiment lugubre. On prépare le deuil national.

* La tête de l’Etat est tombée, par Bastien A.

Les communiqués délivrés par la radio immédiatement après l’annonce du crash de l’avion présidentiel le sont directement en russe car c’est la première source d’information. Cela créée évidemment une atmosphère particulière. Puis la liste des victimes est confirmée avec horreur : la tête de l’Etat polonais est tombée. Le tragique de la situation est que cela s’est déroulé à côté de Katyn, a l’occasion des 70 ans du massacre de l’intelligentsia polonaise. Dans les medias, les interventions religieuses se mêlent au flux d’informations avec une question : Qu’est-ce que Dieu dénonce à travers ce drame ? Les plages de musique funeste alternent, le temps de laisser aux journalistes de préparer l’annonce des informations suivantes. La liste des victimes est régulièrement annoncée, nom par nom, à la radio. Ce qui choque, c’est que presque toutes les victimes occupaient des postes clés dans l’administration polonaise. A midi, les sirènes de la ville sonnent longuement. Sur la place centrale de Wroclaw, des policiers municipaux sont en faction devant l’hôtel de ville. Les premières gerbes sont déposées devant les portraits du couple présidentiel. Dans l’une des principales rues piétonnes de la ville, une femme cout a la main deux pans de tissu noir de 100m de long. Les polonais se regardent entre eux, hébétés.

* Un voile noir sur Varsovie, par Jacques

La ville de Varsovie est comme sous un voile sombre. Les drapeaux sont en berne. Les rues désertes dans le centre ville. Un ciel gris donne une atmosphère crépusculaire à la ville. Les radios diffusent de la musique classique alors que les témoignages de polonais éplorés parviennent sur les ondes radios et télés. Les varsoviens convergent vers le palais présidentiel où des gerbes de fleurs sont déposées. Le symbole tragique de la mort du président polonais sur le sol russe augmente encore la charge émotionnelle immense d’un pays privé de 25 % de son gouvernement à la suite de ce crash.

* La bataille d’oreillers n’aura pas lieu, par Agnieszka Fielek

Samedi matin, Cracovie. Les étudiants préparent un grand événement annuel - la bataille d’oreillers. Les costumes permettant de marquer l’appartenance à l’université respective sont prêts, les oreillers aussi. Le programme de nettoyage de la place du marché est également mis en place. A ce moment là, on prie pour le beau temps, qui s’annonce pourtant défavorable. "Peu importe, on peut très bien s’amuser sous la pluie", commentent les organisateurs sur Facebook. Même le café gratuit pour les participants est prévu. Pratiquement, rien ne pourra nous empêcher... Soudain, l’information tragique nous frappe tous. Les téléphones n’arrêtent pas de sonner, soit on relate les détails déjà connus, soit on est laconique : "Allume la télé. Vite !"

Je suis révéillée par la conversation ravivée de mes collocateurs. Je file devant la télé et j’apprends la nouvelle. Longtemps, je n’arrive pas à y croire, mais les noms connus défilent devant mes yeux, inexorablement. Les médias étrangers annoncent déjà la mort du président, les Polonais semblent plus réticents, comme s’ils attendaient toujours une révélation salvatrice. Mais elle ne vient pas.

Je regarde le site de la bataille d’oreillers où la discussion se ranime. Les uns veulent juste une minute de silence, pour les autres pas de question de se battre. Le deuil est annoncé. Cette année, la bataille n’aura pas lieu. Cette année, on va à la messe, dans la cathédrale du château de Wawel. C’est tout ce qu’on peut faire pour eux...

* A la radio, Chopin... par Nadia Bouacid

La Pologne s’effondre et n’arrive toujours pas a croire que 96 personnes viennent de disparaître a tout jamais. Des personnes qui faisaient partie du quotidien. Des gens avec qui nous étions souvent pas d’accord mais qui nous étaient si familiers. A la radio, on entend du Chopin, l’année de Chopin. Sur le petit écran, on entend les interviews d’hommes politiques, qui pour une fois, paressent si humains, si proches de nous.

Les cloches de l’église de Cracovie de Zygmunt sonnent a la mi-journée, comme chaque fois qu’un événement joyeux ou triste a lieu. Dans les rues, des drapeaux en berne. Encore une fois, comme pour la mort du Pape, les gens se solidarisent en se mois d’avril. Et Chopin passe toujours a la radio….

* Une nouveau Katyn ? par Guillaume Charroux

Pour les Polonais, il s’agit d’un véritable choc ; Un deuil national d’une semaine a été instauré. La délégation se rendait en avion à Katyn pour commémorer le massacre de l’élite polonaise (près de 22 000 prisonniers de guerre - des officiers, mais aussi des enseignants d’université, des prêtres... arrêtés sans statut de prisonnier de guerre) par les Soviétiques au début de la 2nde Guerre Mondiale. Pour la première fois, la Russie envoyait une personnalité de premier rang (le premier ministre Poutine) à ces célébrations, un geste très positif envers la Pologne après des années de querelles politico-historiques acharnées.

Aujourd’hui, on parle d’un nouveau Katyn (toutes proportions gardées) puisque le Président de la République, de nombreux députés et sénateurs, la majorité des chefs des différents corps d’armées, ont disparu. Pour l’instant les gens sont sous le choc. Je pense que dimanche dans les églises et lundi au travail on pourra voir l’ampleur du traumatisme. Les médias parlent en boucle de cette tragédie, les journalistes s’inquiètent des conséquences pour le fonctionnement de l’état.

* Un mauvais rêve ? par Marta Pietruczuk

Je suis une jeune Polonaise. Je suis les événements d’aujourd’hui avec le coeur lourd. Je n’en crois pas ni mes yeux ni mes oreilles... Ce jour sombre restera à jamais gravé dans la memoire de tous. Tout le monde est choqué, la plupart de personnes veulent croire encore que le crash de cet avion n’est qu’un mauvais rêve...

Le president Kaczynski et d’autres personnes présentes a bord de l’avion sont morts au moment ou les gouvernements russes et polonais se sont reconcilliés et ils parlent enfin le même langage.... Ils se sont rendus en Russie pour la commemoration du 70e anniversaire du massacre de Katyn... Leur mort revêt donc une dimension toute symbolique...

* Dans les rues règne un grand silence, par Joanna Brozek

Dans les rues, les magasins, les trains et les bus règne un grand silence. Tout le monde se regarde, sans commentaires, comme s’ils se comprenaient sans paroles. L’ambiance est étrange... comme si nous avions perdu de la famille. Meme si le president Kaczy ski n’etait pas aimé de tous, même si la Pologne était toujours divisée, toutes les polémiques semblent avoir disparu. A Cracovie, a Katowice (la capitale de la Silésie,) les gens prient devant les églises, allument les petits feux. Des étudiantes defilent dans les rue de Cracovie avec des drapeaux.

Le pourquoi de cette catastrophe hante nos pensées. Mais la réponse ne vient pas facilement. Que faire, quel futur pour notre pays ? Il y a une semaine nous avons commémorés le 5e anniversaire de la mort de Jean Paul II, aujourd’hui c’est la commémoration de Katy , lieu aujourd’hui chargé d’un double drame. La Pologne y a perdu la fleure de son inteligencia pendant la Seconde guerre mondiale, et aujourd’hui les personnages les plus importants de notre pays. Quel paradoxe de l’histoire.

* Un choc pour toute la Pologne, par Julia

C’est un choc pour tous les Polonais. Nous avons encore du mal à y croire. Certains d’entre nous n’aimaient pas le President Kaczynski, certains ne partageaient pas ses opinions - j’ai voté pour quelqu’un d’autre - mais nous allons tous deposer des fleurs devant le Palais presidentiel a Varsovie, et prier pour les victimes ce soir dans les églises dans toute la Pologne. J’espère que les hommes politiques sauront se comporter avec dignité. Tous, de droite ou de gauche, nous sommes aujourd’hui en deuil.

* D’une tragédie à l’autre, par Marta

Nous sommes tous dans une situation très compliquée politiquement. On a perdu notre président, et même s’il n’était pas apprécié de tous les Polonais, il était toujours la tête du pays. C’est un drame national. Maintenant est venu le temps de la réconciliation nationale... Les gens pleurent en regardent la télé, devant les ordinateurs, tout le monde accroche des drapeaux aux murs. Nous n’avons pas seulement perdu un président, mais plusieurs hauts responsables du pays : la femme de Lech Kaczy ski, le président de la Banque Centrale, le vice-ministre de la défense, l’ancien président du gouvernement polonais en exil etc. Comme dit Lech Wa sa : "C’est le deuxième désastre après Katyn". La Pologne passe d’une tragédie à l’autre. Triste, mélancolique, je le suis sans doute. Et pourtant, je n’y crois toujours pas...

* La Pologne pleure son Président, par Paul V.

Je suis belge et vis en Pologne. Ce matin en écoutant la radio polonaise j’ai appris la nouvelle et peu après des amis polonais me téléphonaient pour m’exprimer leur chagrin. En sortant pour faire des achats, j’ai vu à plusieurs façades dans les rues de Zakopane (sud) des drapeaux rouge et blanc en bernes. Dans les magasins les gens que je croisais avait la mine triste et les courses se faisaient dans un silence presque complet. La patronne de l’épicerie avait elle les larmes aux yeux. Certaines personnes ont peur qu’il s’agisse d’un attentat, d’autres ne comprennent pas mais toutes sont tristes. Le peuple polonais souffre une fois de plus et cela se voit sur les visages de tous ceux que vous croisez dans la rue : certains s’inquiètent pour l’avenir...

* Tragiquement simple, par Jacek

La situation est tragiquement simple. L’avion devait atterrir 30 minutes avant le debut des cérémonies. Imaginez donc la situation d’un pilote qui dirait à son president qu’il est incapable d’atterrir à l’heure et que le président n’arrivera pas à temps... Surtout que l’un des pilotes du président avait déjà eu des problèmes quand il avait refusé d’atterir a Tbilisi pendant la guerre en Géorgie. Donc peu importe le brouillard, l’absence d’ILS a l’aeroport ex-militaire de Smolensk, l’âge de l’avion... Le pilote a tente d’atterir quatre fois, la dernière tentative était tragique.

* La fin... ou le debut ? par Pawel Cwilag

La Pologne est arretée. Rien ne se deroule pas. Les gens pleurent, prient... Ils ne veulent pas admettre ce qui s’est passé ! C’est une tragédie unique. La Pologne est aujourd’hui veuve. C’est un cauchemare. Pourquoi celà s’est-il passé à Katyn, lieu ou les Russes avaient déjà mordu les Polonais ? C’est la fin ? Ou le commencement de quelque chose de nouveau en Pologne ? Nous verrons...

* Stupeur, par Piguet Géraldine

Un samedi matin comme les autres à Bytom. Mes collègues arrivent au travail les uns après les autres. Sauf que la dernière arrivée nous annonce à 9 h 40, les larmes aux yeux, que le président est mort. Stupeur dans l’assemblée. Néanmoins, après un rapide tour sur internet, nous commençons notre journée. Lorsque que les enfants arrivent (je travail actuellement avec des enfants âgés de 4 à 14 ans), ils ne savent pas ce qui se passe. Ma boss nous interdit formellement de leur en parler. Mais il est dur de garder la nouvelle secrète alors que tout le monde en parle. Du chauffeur de bus aux caissières, tout le monde n’a que ça à la bouche. Ma patronne fait arrêter la radio pour ne pas que les enfants entendent. Il n’empêche que 3 heures plus tard, ils ont compris et commencent à en rire : "Kaput Kaszynski", disent-ils. Les collègues s’offusquent et expliquent les larmes aux yeux, l’ampleur du drame. Depuis, le deuil national à été décrété. Tout les concerts et évènements sont annulés. Il n’y a pratiquement personne dans les rues.

* Le choc et le silence, par Dorota Kulbaka

Des centaines de Polonais sont réunis autour du Palais présidentiel à Varsovie. Les gens prient, chantent, pleurent, déposent des fleurs. Nous sommes tous sous le choc. Les gens se répètent sans cesse : "Je n’y crois pas. C’est un mauvais rêve". Le scénario lui-même serait trop incroyable pour en faire un film. On aimerait parler, mais personne ne sait quoi dire. Les drapeaux sur les bâtiments portent un ruban noir. Tout les événements ont été annulés : théâtre, cinéma, événements sportifs, etc. La ville est étrangement calme. Les gens restent à la maison pour suivre les actualités.