On a eu les Bonnets rouges, les Gilets jaunes, les anti-masques et les antivax. Voici venu le temps des occupants des ARS, enfin, de l’ARS de Quimper. Jeudi 14 septembre 2023, un détachement de citoyens a investi son Agence régionale de santé et retenu ses responsables pendant 4 heures. On sent que la colère contre la destruction de la santé publique est en train de remonter, et par la voie hiérarchique, s’il vous plaît. Le mot d’ordre de ces activistes nouvelle formule, qui devraient faire des petits :
« On ne partira pas tant que l’on n’aura pas l’assurance de l’État que les urgences resteront ouvertes 24 h sur 24 ! »
Parmi les 8 personnes de l'ARS retenues dans une salle à Quimper, Élise Noguera, la directrice générale de l’ARS Bretagne. La cinquantaine de manifestants est déterminée et veut bloquer jusqu'à ce qu'ils "obtiennent de l'État que les Urgences de Carhaix restent ouverts 24h/24h pic.twitter.com/QsHJj646Da
— France 3 Bretagne (@france3Bretagne) September 14, 2023
Un « comité » de salut public
L’objet de la colère populaire ? La fameuse régulation des urgences, traduire fermeture partielle. Celles de Carhaix, par exemple, sont fermées le soir et la nuit. Autant dire qu’il vaut mieux, comme l’écrit Mathieu Guillemot, le porte-parole du comité de vigilance de l’hosto de Carhaix (ça sonne un peu comme un comité de salut public), attendre le petit matin pour se casser le bras :
« Vous vous cassez le bras à Carhaix, vous pouvez aller aux urgences entre 9h30 et 15h, alors choisissez bien l’heure pour vous casser le bras. »
Pour info, l’ARS avait promis que les urgences rouvriraient normalement le 1er septembre, mais c’était des conneries. Une semaine plus tard, un rendez-vous est pris entre cette organisation parasitaire, qu’on a vue à l’œuvre pendant le covidisme (ils transmettaient toutes les salades et les interdits absurdes de la Direction de la santé et du conseil scientifique bidon), et le comité populaire. Devant l’inaction des pouvoirs publics, le comité passe à l’action une semaine plus tard.
La directrice de l’ARS, Élise Noiguerra, a défendu son steak, arguant que « l’accès aux urgences la nuit se fait par un appel au 15 et la régulation. L’organisation retenue garantit la prise en charge de toutes les urgences vitales. Le fonctionnement courant a repris en journée » (Source : France 3 Régions).
C’est bien ça l’arnaque (quand le 15 répond, déjà) : si vous n’êtes pas mourant, vous pouvez crever !
De manière plus générale, les services publics en France souffrent, et les Français en conséquence. Ces derniers, qui sont contents de payer globalement moins d’impôts depuis Sarkozy, devraient comprendre que
un, cela signifie moins de services publics, donc moins d’effectifs dans la santé et la sécurité publiques,
deux, ça signifie aussi plus d’argent ponctionné ailleurs, par exemple via les dépenses inévitables (carburant, électricité, gaz) et l’alimentation (via la TVA qui frappe 10 fois plus fort les pauvres que les riches).
Justement, un rapport vient de tomber qui corrobore toute cette arnaque. Comme l’écrit France Info, « le collectif Nos services publics a analysé deux décennies de politiques publiques et les a comparées à l’évolution des besoins, dans l’éducation, la santé, la justice, la sécurité ou encore les transports ».
Arnaud Bontemps, magistrat à la Cour des comptes et porte-parole du collectif, dit comme nous :
« Depuis quinze ans, on a une contrainte croissante sur les moyens, sur les dépenses des services publics, moins de fonctionnaires, moins d’impôts, qui créent un décalage croissant, un fossé ». Le secteur privé en profite donc pour se développer, en proposant une réponse à ces besoins non assouvis. « C’est dans cet écart que s’ouvre un espace pour le secteur privé. Et en retour, ce développement du secteur privé vient déstabiliser le service public. »
Sauf que ce développement du secteur privé est bien l’objectif caché du détricotage du service public ! C’est, à notre avis, un développement pas du tout hasardeux. Globalement, pour ce qui concerne l’hôpital, les cliniques se taillent la part du lion avec les opérations juteuses (la chirurgie), tandis que les CHU se tapent la sociale : la réanimation (on a vu le résultat avec la fonte des lits sous le covidisme) et les urgences, qui ploient sous la demande. Car beaucoup de Français n’appellent plus le médecin et courent aux urgences, pour ne pas payer, ou pas trop, bref, la France est malade de son néolibéralisme.
Tout est dégradé, le service public devient un service public minimum, désaffecté au vrai sens du terme par les professionnels – quand ils ne sont pas encouragés à partir – et assailli par les pauvres, une vraie ligne de front, celle de la guerre du haut contre le bas.
Même constat pour l’école, avec un service public de l’instruction qui s’effondre sur lui-même, des effectifs pléthoriques pour les élèves (étudiants compris) et en réduction chez les enseignants, un effet de ciseaux désastreux. Ceux qui en ont les moyens se sauvent dans le privé qui, paradoxalement, est devenu l’école publique d’avant.
Sur E&R, on sait déjà tout ça depuis des lustres. Au grand public de comprendre qu’il est under attack.
Pour finir sur une note ironique, ce sujet de France Info sur la dégradation du service public, notamment dans la santé et l’école, ne parle curieusement pas de l’information. Pourtant, là aussi, c’est l’effondrement programmé !