Trump, Netanyahou et la guerre contre l’Iran
Un article de Youssef Hindi en exclusivité pour le site E&R !
Sommaire
– Bras de fer israélo-américain
• Trump et les juifs libéraux contre Netanyahou ?
– Guerre Israël-Iran et sabotage des négociations
• Qui veut la guerre contre l’Iran ?
• L’obsession iranienne des Israéliens et des néoconservateurs américains
• Trump et Netanyahou en désaccord sur l’Iran
– La défaite militaire d’Israël et ses conséquences politiques
• « Rising Lion » : l’opération israélienne contre l’Iran
• Contre-attaque iranienne
• Le rapport de force militaire entre Israël et l’Iran
• L’engagement militaire théâtral des USA
• Les Israéliens en position de faiblesse
• Les conséquences négatives du théâtre trumpien
*
Depuis l’investiture de Donald Trump en janvier dernier, de nombreux événements se sont produit, en coulisse à Washington comme sur le terrain géopolitique au Proche-Orient, dans une séquence très courte. Les revirements incessants de Trump sur les dossiers palestinien et iranien témoignent d’une influence gigantesque du lobby pro-israélien et d’une relation entre l’administration Trump et le gouvernement Netanyahou pour le moins complexe et conflictuelle.
C’est ce que nous allons analyser dans les lignes qui vont suivre afin de permettre au lecteur de sortir du commentaire manichéen, tantôt trumpolâtre tantôt anti-trumpiste sans nuance. La réalité du politique se situe toujours dans une vaste et nuancée zone grise.
Bras de fer israélo-américain
Trump et les juifs libéraux contre Netanyahou ?
Durant sa tournée proche-orientale en mai dernier, le président Trump ne s’est pas rendu en Israël, et le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, a annulé son voyage prévu à Tel-Aviv [1].
La cause immédiate est que « Trump avait apparemment espéré une désescalade majeure et même un cessez-le-feu à Gaza [2] comme point fort de son voyage, dont il se serait attribué le mérite, mais Netanyahou a au contraire appelé les réservistes de l’armée et a ordonné une escalade majeure » [3].
Sur la question israélienne, dans son bras de fer contre Netanyahou, Donald Trump trouve des alliés de circonstances – qui sont ses ennemis par ailleurs – dans les juifs libéraux (de gauche) sionistes qui voient dans Netanyahou et son gouvernement messianiste des ennemis mortels, en ce qu’ils mettent en danger le projet sioniste et la diaspora juive.
Thomas L. Friedman, écrivain et journaliste juif américain, spécialiste du Moyen-Orient, a publié un article dans The New York Times le 9 mai dernier, dans lequel il applaudit Trump quant à sa politique vis-à-vis d’Israël. L’article a pour titre « This Israeli Government Is Not Our Ally » (Ce gouvernement israélien n’est pas notre allié). Son article vaut la peine d’être cité longuement, car il indique très clairement la position actuelle des élites juives libérales-sionistes, et le virage des États-Unis par rapport au gouvernement Netanyahou :
« Cher président Trump,
Il y a très peu d’initiatives que vous avez prises depuis votre entrée en fonction avec lesquelles je suis d’accord – sauf au Moyen-Orient. Le fait que vous vous y rendiez la semaine prochaine et que vous rencontriez les dirigeants de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis et du Qatar – et que vous n’ayez pas prévu de voir le Premier ministre Benyamin Netanyahou en Israël – me laisse penser que vous commencez à comprendre une vérité vitale : ce gouvernement israélien se comporte d’une manière qui menace les intérêts américains les plus fondamentaux dans la région. M. Netanyahou n’est pas notre ami.
Mais il pensait pouvoir faire de vous son pigeon. C’est pourquoi je suis impressionné par la façon dont vous lui avez signalé, par vos négociations indépendantes avec le Hamas, l’Iran et les Houthis, qu’il n’a pas d’emprise sur vous, que vous ne serez pas son pigeon. Il est clair qu’il est paniqué.
Je ne doute pas que, d’une manière générale, le peuple israélien continue à se considérer comme un allié indéfectible du peuple américain – et vice versa. Mais ce gouvernement israélien ultranationaliste et messianique n’est pas l’allié de l’Amérique. En effet, il s’agit du premier gouvernement de l’histoire d’Israël dont la priorité n’est pas la paix avec un plus grand nombre de ses voisins arabes et les avantages qu’une sécurité et une coexistence accrues apporteraient. Sa priorité est l’annexion de la Cisjordanie, l’expulsion des Palestiniens de Gaza et le rétablissement des colonies israéliennes.
L’idée qu’Israël a un gouvernement qui ne se comporte plus comme un allié américain et qui ne devrait pas être considéré comme tel est une pilule choquante et amère à avaler pour les amis d’Israël à Washington – mais ils doivent l’avaler.
Parce qu’en poursuivant son programme extrémiste, le gouvernement Netanyahou sape nos intérêts. Le fait que vous ne vous laissiez pas écraser par Netanyahou comme il l’a fait avec d’autres présidents américains est tout à votre honneur. Il est également essentiel de défendre l’architecture de sécurité américaine que vos prédécesseurs ont mise en place dans la région.
La structure de l’alliance actuelle entre les États-Unis, les pays arabes et Israël a été établie par Richard Nixon et Henry Kissinger après la guerre d’octobre 1973, afin d’évincer la Russie et de faire de l’Amérique la puissance mondiale dominante dans la région, ce qui a servi nos intérêts géopolitiques et économiques depuis lors. La diplomatie Nixon-Kissinger a forgé les accords de désengagement de 1974 entre Israël, la Syrie et l’Égypte. Ces accords ont jeté les bases du traité de paix de Camp David. Camp David a jeté les bases des accords de paix d’Oslo. Le résultat fut une région dominée par l’Amérique, ses alliés arabes et Israël.
Mais toute cette structure dépendait dans une large mesure d’un engagement américano-israélien en faveur d’une sorte de solution à deux États – un engagement que vous avez vous-même tenté de promouvoir au cours de votre premier mandat avec votre propre projet d’État palestinien à Gaza et en Cisjordanie à côté d’Israël – à condition que les Palestiniens acceptent de reconnaître Israël et que leur État soit démilitarisé.
Le gouvernement Netanyahou a toutefois fait de l’annexion de la Cisjordanie sa priorité lorsqu’il est arrivé au pouvoir à la fin de l’année 2022 – bien avant l’invasion vicieuse du Hamas le 7 octobre 2023 – plutôt que l’architecture de sécurité et de paix des États-Unis pour la région.
Pendant près d’un an, l’administration Biden a supplié M. Netanyahou de faire une chose pour l’Amérique et pour Israël : accepter d’ouvrir un dialogue avec l’Autorité palestinienne sur une solution à deux États – un jour avec une autorité réformée – en échange de la normalisation des relations de l’Arabie saoudite avec Israël. Cela ouvrirait la voie à l’adoption par le Congrès d’un traité de sécurité américano- saoudien destiné à faire contrepoids à l’Iran et à exclure la Chine.Netanyahou a refusé de le faire, parce que les suprémacistes juifs de son cabinet ont dit que s’il le faisait, ils renverseraient son gouvernement – et comme Netanyahou est jugé pour de multiples accusations de corruption, il ne pouvait pas se permettre d’abandonner la protection de son poste de Premier ministre pour faire traîner son procès et éviter une éventuelle peine de prison.
Ainsi, M. Netanyahou a fait passer ses intérêts personnels avant ceux d’Israël et de l’Amérique. La normalisation des relations entre Israël et l’Arabie saoudite, la plus grande puissance musulmane, fondée sur la recherche d’une solution à deux États avec des Palestiniens modérés, aurait ouvert l’ensemble du monde musulman aux touristes, investisseurs et innovateurs israéliens, apaisé les tensions entre juifs et musulmans dans le monde entier et consolidé les avantages américains au Moyen-Orient, mis en place par Nixon et Kissinger pour une décennie supplémentaire, voire plus.
Après avoir fait tourner en rond tout le monde pendant deux ans, les Américains et les Saoudiens auraient décidé d’abandonner la participation d’Israël à l’accord – une véritable perte pour les Israéliens et le peuple juif. Reuters a rapporté jeudi que "les États-Unis n’exigent plus que l’Arabie saoudite normalise ses liens avec Israël comme condition pour progresser dans les négociations sur la coopération nucléaire civile".
Et maintenant, la situation risque d’empirer. Netanyahou se prépare à envahir à nouveau Gaza avec un plan visant à rassembler la population palestinienne dans un coin minuscule, avec la mer Méditerranée d’un côté et la frontière égyptienne de l’autre – tout en faisant progresser l’annexion de facto à une vitesse et à une échelle toujours plus grandes en Cisjordanie. Ce faisant, il encouragera les accusations de crimes de guerre contre Israël (et en particulier contre son nouveau chef d’état-major, Eyal Zamir) contre lesquelles Bibi s’attendra à ce que votre administration le protège.
Je n’ai aucune sympathie pour le Hamas. Je pense qu’il s’agit d’une organisation malade qui a causé d’énormes dégâts à la cause palestinienne. Elle est en grande partie responsable de la tragédie humaine que représente Gaza aujourd’hui. Les dirigeants du Hamas auraient dû libérer leurs otages et quitter Gaza il y a longtemps, ce qui aurait ôté toute excuse à Israël pour reprendre les combats. Mais le plan de Netanyahou pour réinvestir Gaza n’est pas de mettre en place une alternative modérée au Hamas, dirigée par l’Autorité palestinienne. Il s’agit d’une occupation militaire israélienne permanente, dont l’objectif non avoué sera de faire pression sur tous les Palestiniens pour qu’ils partent. Il s’agit là d’une prescription pour une insurrection permanente – le Vietnam sur la Méditerranée.
Lors d’une conférence organisée le 5 mai par le journal sioniste religieux B’Sheva, Bezalel Smotrich, ministre israélien des Finances d’extrême droite, s’est exprimé comme un homme qui se fiche éperdument de ce que vous pensez : "Nous occupons Gaza pour y rester", a-t-il déclaré. "Il n’y aura plus d’entrées et de sorties. La population locale sera comprimée dans moins d’un quart de la bande de Gaza."Comme l’a noté l’expert militaire de Haaretz, Amos Harel : "Comme l’armée essaiera de minimiser les pertes, les analystes s’attendent à ce qu’elle utilise une force particulièrement agressive qui causera des dommages considérables aux infrastructures civiles restantes de la bande de Gaza. Le déplacement de la population vers les zones des camps humanitaires, combiné à la pénurie actuelle de nourriture et de médicaments, pourrait entraîner d’autres décès massifs de civils. D’autres dirigeants et officiers israéliens pourraient faire l’objet de poursuites judiciaires personnelles.
En effet, cette stratégie, si elle est mise en œuvre, risque non seulement de déclencher de nouvelles accusations de crimes de guerre contre Israël, mais aussi de menacer inévitablement la stabilité de la Jordanie et de l’Égypte. Ces deux piliers de la structure de l’alliance américaine au Moyen-Orient craignent tous deux que Netanyahou ne cherche à chasser les Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie vers leurs pays, ce qui ne manquerait pas de provoquer une instabilité qui déborderait de leurs frontières, même si les Palestiniens eux-mêmes ne le font pas.
Cela nous nuit d’une autre manière. Comme me l’a dit Hans Wechsel, ancien conseiller politique principal du Commandement central des États-Unis : "Plus les aspirations palestiniennes semblent désespérées, moins la région sera disposée à étendre l’intégration sécuritaire américano-arabo-israélienne qui aurait pu lui conférer des avantages à long terme par rapport à l’Iran et à la Chine" – et sans nécessiter autant de ressources militaires américaines dans la région pour être maintenue.
En ce qui concerne le Moyen-Orient, vous avez de bons instincts indépendants, Monsieur le Président. Suivez-les. Sinon, vous devez vous préparer à cette réalité imminente : vos petits-enfants juifs seront la première génération d’enfants juifs à grandir dans un monde où l’État juif sera un État paria. » [4]
Selon deux sources proches du président Trump, lors de conversations à huis clos, Trump a déclaré qu’il allait progresser dans la réalisation de ses objectifs au Moyen- Orient sans attendre Israël.
Trump était déjà en colère – avant l’agression israélienne contre l’Iran – contre Netanyahou et son entourage pour ce qu’il considérait comme une tentative de pousser la Maison-Blanche à une action militaire contre le programme nucléaire iranien, selon les deux sources proche de Trump.
Les responsables israéliens ont été pris au dépourvu par l’annonce de Trump selon laquelle les États-Unis avaient conclu un cessez-le-feu avec Ansar Allah au Yémen en mai dernier, et par le début des négociations nucléaires entre les États-Unis et l’Iran en avril.
Après l’annonce du cessez-le-feu avec Ansar Allah, Netanyahou et ses principaux ministres ont souligné dans leurs récentes déclarations qu’Israël « peut se défendre seul » [5].
C’est dans ce contexte que les Israéliens ont décidé d’attaquer l’Iran afin de saboter les négociations irano-américaines.
Guerre Israël-Iran et sabotage des négociations
Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a lancé une attaque militaire contre l’Iran dans la nuit du 12 au 13 juin 2025 pour saboter les négociations entre Washington et Téhéran, entraîner les États-Unis dans une guerre contre l’Iran, et maintenir Israël dans la guerre permanente afin de se maintenir au pouvoir et échapper à la prison.
Netanyahou a mis Trump devant le fait accompli et a tenté d’embourber les États-Unis dans la guerre contre l’Iran qui est ainsi poussé à frapper les bases américaines en Irak. Une escalade qui aurait pu provoquer (mais ils finiront par y parvenir) une guerre mondiale.
Au-delà des circonstances géopolitiques actuelles, cette guerre est voulue par Israël depuis plusieurs décennies pour des raisons plus profondes.
Qui veut la guerre contre l’Iran ?
Jusqu’en 1993, les États-Unis n’étaient pas partisans d’une politique agressive envers l’Iran. C’est principalement sous l’influence de l’État hébreu que les États-Unis ont pris ce tournant anti-iranien.
Au début de l’année 1993, alors que Clinton arrive au pouvoir, le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin et son ministre des Affaires étrangères Shimon Peres commencent à défendre l’idée que l’Iran constitue une menace pour Israël et les États-Unis.
Le 13 mars 1993, le Washington Post rapportait :
« Quelle que soit leur sensibilité politique, les responsables israéliens estiment qu’il est nécessaire de convaincre l’opinion et les dirigeants américains de l’urgence de mesures visant à contenir l’Iran, et que les États-Unis sont la seule puissance mondiale capable de prendre de telles mesures. » [6]
Les États-Unis se plièrent aux exigences israéliennes en pratiquant une politique d’endiguement (contention) de l’Iran, en cernant militairement l’Iran par des bases militaires.
Robert Pelletreau, qui était secrétaire d’État adjoint en charge du Proche-Orient, déclara que cette politique était pour l’essentiel la copie conforme d’une proposition israélienne [7].
Au sein de l’appareil d’État américain, des voix, comme celle de Zbigniew Brzezinski, s’élevèrent en conséquence en faveur d’un dialogue avec l’Iran [8].
Israël et son lobby aux États-Unis, se sont aussi attaqués aux lois permettant aux entreprises américaines de commercer avec l’Iran.
L’analyste politique Tritta Parsi rapporte que dans les années 1990 « à la demande du gouvernement israélien, l’AIPAC rédigea et fit circuler à Washington un mémorandum de 74 pages soutenant que l’Iran était une menace non seulement pour Israël, mais aussi pour les États-Unis et l’Occident tout entier » [9].
En avril 1995, l’AIPAC publia un rapport intitulé : Pour un ensemble de sanctions contre l’Iran : un plan d’action [10].
Dans la même année, la société pétrolière américaine Conoco, qui était alors sur le point de signer un accord avec l’Iran pour l’exploitation des gisements pétrolifères, s’est vue empêchée de conclure : le président Clinton avait mis son veto en personne à cet accord le 14 mars 1995 et prit un décret le lendemain même pour interdire aux entreprises américaines de participer à l’exploitation des réserves pétrolières iraniennes.
Bill Clinton révéla plus tard ceci : « Un des opposants les plus efficaces au contrat avec Conoco était Edgar Bronfman Sr. », soit le très influent ancien dirigeant du Congrès juif mondial. L’AIPAC contribua aussi à torpiller l’accord [11].
Après avoir poussé les États-Unis à mener une politique de blocus et de sanctions économiques à l’encontre de l’Iran, les boutefeux israéliens sont passés à l’étape suivante : ils ont encouragé Washington à mener des frappes contre les installations nucléaires iraniennes et même à livrer la guerre à Téhéran ; en parallèle ils défendaient l’idée d’un changement de régime en Iran.
En 1990 déjà, les dirigeants israéliens désignaient l’Iran comme leur ennemi le plus redoutable, car il aurait été capable de développer un armement nucléaire.
L’obsession iranienne des Israéliens et des néoconservateurs américains
Dans une tribune que Netanyahou fit paraître dans le Chicago Sun Times le 7 janvier 2002, on voit très clairement apparaître le fait que le 11 Septembre n’est qu’un prétexte à la reconfiguration du Proche-Orient :
« Que l’Amérique renverse le régime des talibans en Afghanistan, et le réseau Al-Qaïda se désagrégera de lui-même. Les États-Unis doivent à présent agir de la même façon avec les autres régimes de terreur – l’Iran, l’Irak, la dictature de Yasser Arafat, la Syrie et quelques autres. » [12]
Dans une tribune du Times (13 septembre 2001) Ehud Barak écrit :
« Les gouvernements de ce monde savent exactement qui sont les terroristes et quels sont les États voyous qui les soutiennent. Il existe des preuves que des pays comme l’Iran, l’Irak, la Libye, le Soudan et la Corée du Nord ont soutenu le terrorisme, alors que personne n’a besoin qu’on lui rappelle le carnage provoqué par les terroristes du Hamas, du Hezbollah, du Jihad islamique et même de l’OLP de Yasser Arafat. » [13]
En 2002, à la conférence annuelle du puissant lobby pro-israélien AIPAC, dont le thème était « L’Amérique et Israël contre le terrorisme », les discours tournaient autour de la « menace » commune aux États-Unis et à Israël représentées par Yasser Arafat, Oussama ben Laden (l’ancien employé de la CIA), les talibans (armés et soutenus par la même CIA via les Services spéciaux pakistanais), le Hamas, le Hezbollah, l’Iran et la Syrie [14].
En avril 2002, le think tank néoconservateur américain PNAC (Project for the New American Century) a publié une lettre ouverte signée par plusieurs personnalités néocons – William Kristol, Richard Perle, Daniel Pipes, Eliot Cohen, Norman Podhoretz, William Bennet, R. James Woolsey ainsi que de vingt-huit autres néoconservateurs de premier plan –, destinée au président Bush :
« Personne ne devrait douter que les États-Unis et Israël ont un ennemi en commun. Nos deux pays sont la cible de ce que vous [GW Bush] avez à juste titre appelé "l’Axe du mal". Comme l’a souligné le secrétaire d’État à la Défense Donald Rumsfeld, l’Iran, l’Irak et la Syrie "encouragent et financent une culture d’assassinats politiques et d’attentats à la bombe contre Israël, tout comme ils ont soutenu des campagnes de terrorisme contre les États-Unis". Monsieur le président, vous avez déclaré la guerre au terrorisme international. Israël est engagé dans la même guerre. » [15]
Dans un article du 16 février 2003 du journal Haaretz, nous lisons sous la plume de Aluf Benn : « Des officiers supérieurs de Tsahal et des dirigeants proches du Premier ministre Ariel Sharon, comme le conseiller à la sécurité nationale Ephraim Halevy, dressent un tableau extrêmement optimiste de l’avenir radieux qui attend Israël une fois la guerre terminée. Ils envisagent un effet domino dans lequel la chute de Saddam Hussein serait suivie par celle d’autres ennemis d’Israël : Arafat, Hassan Nasrallah, Bachar el-Assad, les Ayatollahs en Iran et peut-être même Muahammar Kadhafi. » [16]
Stephen Walt et Johen Mearsheimer expliquent ainsi dans leur livre paru en 2007 que :
« De nombreuses décisions prises au nom d’Israël compromettent aujourd’hui la sécurité nationale des États-Unis. Le soutien sans bornes à l’État hébreu ainsi que l’occupation israélienne prolongée des territoires palestiniens alimentent l’anti-américanisme dans le monde arabo-musulman, renforçant la menace du terrorisme international et compliquent la tâche de Washington lorsqu’il s’agit de traiter d’autres problèmes, tels que le programme nucléaire iranien. Étant donné l’impopularité des États-Unis au Proche-Orient aujourd’hui, les dirigeants arabes qui, en temps normal, auraient partagé les objectifs américains ne sont pas pressés de nous apporter ouvertement leur soutien, une situation qui réduit nos marges de manœuvre dans la région.
Cette situation, qui n’a pas d ’équivalent dans l’histoire américaine, est principalement due aux activités du lobby pro-israélien. Même si d’autres groupes d’intérêts particuliers – des lobbies représentant les Américains d’origine cubaine, irlandaise, arménienne ou indienne – ont réussi à orienter la politique étrangère américaine selon leurs vœux, aucun lobby n’a détourné cette politique aussi loin de l’intérêt national des États-Unis. Le lobby pro-israélien est notamment parvenu à convaincre de nombreux Américains que les États-Unis et Israël avaient les mêmes intérêts. Or, rien n’est plus faux. » [17]
Trump et Netanyahou en désaccord sur l’Iran
Le cas iranien a été abordé longuement le 4 février 2025 par Donald Trump durant la conférence de presse commune avec Netanyahou et durant l’interview dans le Bureau oval. Il y a eu une opposition de fond entre Netanyahou qui veut pousser les États-Unis dans une guerre contre l’Iran, et Donald Trump qui a affirmé à plusieurs reprises qu’il voulait parvenir à un accord avec l’Iran.
Donald Trump veut revenir en arrière, c’est-à-dire conclure un accord sur le nucléaire iranien, alors qu’il s’était retiré de l’accord signé par l’Iran et l’administration Obama.
Lorsque Trump déclare que l’Iran ne doit pas obtenir la bombe atomique, et que pour ce faire il veut un accord et éviter une guerre contre l’Iran, Netanyahou ne peut s’empêcher de pouffer durant la conférence de presse. Trump a également exclu le bombardement des centrales nucléaires iraniennes, ce qu’a fait finalement Israël dans ses frappes de juin dernier.
« Les Iraniens sont devenus très puissants, très rapidement. Ils ont vendu d’énormes quantités de pétrole à la Chine et à beaucoup d’autres qui n’achetaient pas de pétroles à l’Iran quand j’étais président. Ils sont devenus très riches très rapidement. Mais ils ne sont pas faibles. Mais vous savez quoi ? Nous voulons seulement qu’ils n’aient pas de bombe atomique. »
Un journaliste lui répond alors : « Désolé Monsieur le Président, mais le Premier ministre [israélien] veut que vous frappiez l’Iran. C’est ce qu’il veut. »
Trump répond alors devant un Netanyahou silencieux : « Vous ne savez pas ce qu’il veut. » [18]
C’est le même Donald Trump qui a publié dans son média Truth Social, la veille de son investiture, une vidéo de Jeffrey Sachs disant que ce sont les Israéliens et ce « sombre fils de chienne » (deep dark son of a bitch) de Netanyahou qui ont entraîné les États-Unis dans les guerres contre l’Irak et la Syrie et qui tentent de les conduire dans une guerre contre l’Iran depuis des années.
Sachant bien tout cela, Donald Trump a dit durant la conférence de presse que « les États-Unis n’auraient jamais dû déclencher toutes ces guerres destructrices au Moyen-Orient qui ont coûté des trillions de dollars ». Des guerres pour le compte d’Israël.
Le président américain sait bien qu’une guerre contre l’Iran, avec ses conséquences économiques désastreuses, mettra un coup d’arrêt à son projet MAGA (Make America Great Again) qui repose essentiellement sur un programme économique de relance.
La défaite militaire d’Israël et ses conséquences politiques
« Rising Lion » : l’opération israélienne contre l’Iran
Dans la nuit du 12 au 13 juin 2025, Israël a lancé une série de frappes d’envergure contre l’Iran, baptisée « Rising Lion » (Lion se levant). Cette offensive est lancée alors que des négociations sur le programme nucléaire iranien étaient sur le point de reprendre (le 15 juin).
Selon l’état-major israélien, près de 200 avions de chasse ont été mobilisés pour frapper plus d’une centaine de cibles, allant des installations nucléaires – notamment le complexe d’enrichissement de Natanz – à plusieurs bases militaires, entre Téhéran et Ispahan.
Cette vaste opération avait aussi une face clandestine. Des agents du Mossad ont mené des opérations de sabotage ciblées dans les jours précédents, désactivant systèmes radar et plateformes de lancement de missiles. Des cyberattaques contre les réseaux électriques iraniens ont paralysé temporairement certaines défenses. Le général Hossein Salami, chef des Gardiens de la révolution, a été tué, tout comme le général Mohammad Bagheri, chef d’état-major iranien. Des scientifiques du programme nucléaire ont également été tués.
Les Israéliens ont cru neutraliser les défenses aériennes et les systèmes de missiles pour longtemps, mais les Iraniens ont rétabli leurs capacités et ont contre-attaqué dès le lendemain.
Contre-attaque iranienne
L’Iran a riposté à partir du 13 juin en frappant des sites militaires et stratégiques israéliens, notamment :
La base militaire de Nevatim : plateforme d’avions de chasse F-35 à capacité nucléaire. Elle est depuis paralysée.
La raffinerie de Baza. Les frappes iraniennes ont causé la rupture de la plus grande réserve de carburant d’Israël (200 000 barils de pétrole par jour). En conséquence, 60 % de l’approvisionnement en carburant d’Israël est hors service.
La centrale électrique de Haïfa. Le réseau électrique est effondré.
La base militaire de Galilée : plateforme logistique militaire clé endommagée.
Le 17 juin, l’armée iranienne a bombardé un centre du Mossad.
Le même jour, de puissantes explosions ont secoué Tel-Aviv et Herzliya. La frappe a été menée contre le centre logistique d’AMAN, la direction du renseignement militaire de l’état-major général des forces de défense israéliennes. Il a été complètement détruit.
L’important centre de recherche scientifique et militaire Weizmann.
Le taux de réussite du Dôme de fer face aux frappes iraniennes est de 10 à 15 %. Le bouclier anti-missiles aurait été brouillé ou piraté électroniquement par les Iraniens. Des vidéos diffusées sur les réseaux montrent des batteries du système israélien Dôme de fer lancer des missiles contre elles-mêmes ou dans des directions erratiques, retombant sur le sol israélien.
Le colonel américain Douglas Macgregor – ancien conseiller principal auprès du secrétaire d’État à la Défense des États-Unis – a fait le bilan de cette guerre :
« Ne vous y trompez pas, Israël est dans un état plus grave qu’on ne le pense. Environ un tiers de Tel-Aviv a été endommagé ou détruit. En ce qui concerne ses installations militaires, on m’a dit que de nombreux avions israéliens étaient envoyés vers Chypre pour éviter d’être frappés. Israël n’était pas préparé à la réponse de l’Iran. » [19]
Le rapport de force militaire entre Israël et l’Iran
D’après le saint-cyrien, ancien militaire et spécialiste de l’armement, Xavier Moreau :
« Sur le temps long, c’est l’Iran qui est bien parti. Parce qu’il produit des armes nombreuses, pas chères, pas forcément de haute technologie, sauf dans le domaine de l’hypersonique où là, visiblement, il a franchi un palier qui lui permet, régulièrement, tous les jours, de bombarder Israël, et notamment, aujourd’hui, dans le centre économique [à Tel-Aviv]. Je rappelle que ce qu’a fait Netanyahou en attaquant Gaza, en attaquant le Liban, et maintenant en attaquant l’Iran, c’est qu’il a détruit le rêve israélien. Le rêve israélien était de devenir la Silicon Valley [du Proche-Orient]. Eh bien, là, les derniers missiles de l’Iran qui sont tombés ont tapé précisément dans ce qui est le symbole de ce développement, de cette tech qui devait permettre à Israël d’être un pôle au Proche-Orient. Netanyahou en a décidé autrement, et le résultat est catastrophique.
Si on entre dans une guerre d’usure, sur le long terme, je pense que, même si, Israël dispose du soutien américain, du soutien européen, cela coûtera très, très cher, parce que nous les Occidentaux sommes incapables de produire beaucoup d’armes pas cher. Les stocks ont été vidée par la guerre par proxy, par l’Ukraine contre la Russie. » [20]
L’argent est le nerf de la guerre. Et comme le rappelle Xavier Moreau, l’année dernière, la riposte aux frappes iraniennes a coûté entre 700 millions et 1 milliard de dollars à Israël et ses alliés en une nuit.
Les 17 et 18 juin dernier, le Washington Post [21] et le Wall Street Journal [22] ont publié des articles indiquant qu’Israël ne disposerait que de 10 à 12 jours d’autonomie en matière de munitions pour sa défense aérienne.
« À l’inverse, selon les services de renseignement américains, l’Iran possède le plus important arsenal de missiles balistiques de tous les pays du Moyen-Orient. En effet, avant le début des frappes entre les deux pays, Téhéran détenait un stock initial de 3 000 missiles balistiques, selon les estimations du général américain Kenneth McKenzie en 2022… En outre, les capacités de production iraniennes s’élèveraient à 300 unités par mois. Parmi ce stock, l’Iran posséderait "plusieurs centaines" de missiles Fattah-1. Le tout dernier modèle de l’armée iranienne, dévoilé en 2023, est issu d’un échange de technologie avec la Chine. Il est reconnu pour sa rapidité (une vitesse de déplacement de 15 fois la vitesse du son) et son extrême manœuvrabilité grâce à sa tête dotée d’intelligence artificielle. Téhéran a également en réserve d’autres munitions dans son arsenal, comme le Kheibar Shekan, un missile de 10 mètres de long capable d’atteindre une cible éloignée de 1 450 kilomètres, ou encore le missile "Khorramshahr". Celui-ci est capable d’emporter une ogive de 1 800 kg, jusqu’à 2 000 kilomètres, et une technologie capable de toucher de manière très précise une cible et d’éviter d’être intercepté. » [23]
Israël est totalement dépendant du soutien des États-Unis et étant donné qu’ils ne paient pas, c’est Washington qui passe à la caisse sur des armements très coûteux compliqués à produire. Notamment tout ce qui est anti-aérien, explique Xavier Moreau.
La seule supériorité israélienne est l’espionnage et le ciblage d’individus mais on l’a vu, cela n’a pas suffi. Cela rappelle, nous dit encore Xavier Moreau, la stratégie américaine contre la Russie, quand en avril 2022 ils ont empêché Kiev de signer un accord de paix et de le soutenir militairement en espérant que les sanctions économiques pousseraient les Russes dans la rue et que cela ferait tomber Poutine. Les Israéliens ont fait le mauvais pari sur des manifestations en Iran qui feraient tomber le pouvoir.
Les Américains, rappelle Xavier Moreau, « n’ont plus les capacités militaires de l’époque irakienne. En 2003 ils pouvaient encore envoyer 250 000 hommes dans une opération outre-mer avec un appui considérable. Et à côté il y avait les alliés Anglais, Polonais qui ont fourni quasiment 70 000 hommes. Tout cela est aujourd’hui impossible à reproduire. Tout ce qu’ils pourraient faire aujourd’hui c’est un support aérien, des livraisons d’armes.
Mais l’Iran, c’est géographiquement trois fois la France. La masse iranienne, sera supérieure à la qualité israélo-américaine, d’autant plus que cette qualité n’est pas toujours au rendez-vous ».
Scott Ritter, ancien officier américain du renseignement militaire, va plus loin. Il explique que l’Iran est préparé pour une guerre de plusieurs mois, tandis que les Israéliens ont cru que cette affaire serait réglée en deux semaines, comptant sur l’intervention américaine et la chute du régime iranien. Il rapporte que les Israéliens ont subit 500 milliards de dollars de perte en terme de dommages d’infrastructures.
« Même si la guerre s’arrête aujourd’hui, Israël sera incapable de se relever économiquement de ce conflit. Si ce conflit se poursuit durant une semaine, deux semaines, trois semaines, vous verrez la destruction physique d’Israël, littéralement, la destruction physique d’Israël ! Ce qui rend la survie d’Israël en tant qu’État-nation impossible. » [24]
L’engagement militaire théâtral des USA
Dans un article du 24 juin 2025, le New York Times rapporte que :
« Selon un rapport préliminaire classifié des États-Unis, le bombardement américain de trois sites nucléaires en Iran n’a retardé le programme nucléaire du pays que de quelques mois, d’après des fonctionnaires connaissant bien les conclusions. Les frappes ont scellé les entrées de deux des installations, mais n’ont pas fait s’effondrer leurs bâtiments souterrains, ont indiqué ces responsables dans leurs conclusions préliminaires. Avant l’attaque, les services de renseignement américains avaient déclaré que si l’Iran tentait de fabriquer rapidement une bombe, cela prendrait environ trois mois. Après les bombardements américains et les jours d’attaques de l’armée de l’air israélienne, le rapport de la Defense Intelligence Agency (DIA) a estimé que le programme avait été retardé, mais de moins de six mois.
Le rapport indique également qu’une grande partie du stock d’uranium enrichi de l’Iran a été déplacée avant les frappes, qui n’ont détruit qu’une petite partie du matériel nucléaire. L’Iran pourrait en avoir déplacé une partie dans des lieux secrets. Certains responsables israéliens ont déclaré qu’ils pensaient également que le gouvernement iranien avait maintenu de petites installations d’enrichissement secrètes afin de pouvoir poursuivre son programme nucléaire en cas d’attaque sur les installations plus importantes.D’autres responsables ont noté que le rapport indiquait que les trois sites nucléaires – Fordo, Natanz et Ispahan – avaient subi des dommages modérés à graves, l’installation de Natanz étant la plus endommagée. On ne sait pas si les Iraniens tenteront de reconstruire les programmes…
Des responsables militaires, à la retraite et en service, avaient prévenu avant l’attaque que tout effort visant à détruire les installations de Fordo, qui sont enfouies à plus de 75 mètres sous une montagne, nécessiterait probablement des vagues de frappes aériennes, avec des jours, voire des semaines, de pilonnage aux mêmes endroits. » [25]
Nous venons de le voir, aucun objectif n’a été atteint. Donald Trump a fait beaucoup de bruit autour d’un résultat proche de zéro. Il a d’ailleurs annoncé après ces frappes qu’il n’y en aurait pas d’autre. Alors pourquoi a-t-il mené ces frappes ?
L’administration Trump était en pleine négociations avec l’Iran sur la question du nucléaire. Ces négociations ne se déroulaient pas trop mal, et une sixième rencontre entre les Iraniens et les Américains était prévue le dimanche 15 juin. Mais dans la nuit du 12 au 13 juin, les Israéliens ont attaqué l’Iran, mettant un terme (peut-être provisoirement) aux négociations irano-américaines que Tel-Aviv redoutait. Rappelons que c’est à la demande du lobby pro-israélien, l’AIPAC, que Donald Trump avait sorti unilatéralement en 2018 les États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien signé en 2015 avec l’administration Obama.
Les Israéliens voulaient non seulement saboté les négociations irano-américaines, comme ils avaient saboté les négociations entre l’administration Trump et le Hamas, mais aussi et surtout entraîner les États-Unis dans une guerre contre l’Iran pour laquelle les dirigeants israéliens et le lobby sioniste militent depuis plus de deux décennies [26].
Donald Trump, dont la campagne a été en partie financée par le lobby sioniste et dont l’administration est truffée de néoconservateurs, n’étaient pas en mesure de s’opposer au saboteur Netanyahou. Alors Trump a mené ces frappes exigées par les Israéliens contre les sites nucléaires iraniens, leur retirant ainsi le prétexte pour entraîner les États-Unis dans une guerre contre l’Iran pour « changer de régime ». Trump a d’ailleurs déclaré qu’il était hors de question de changer de régime en Iran, car cela entraînerait « le chaos » [27].
Les Israéliens en position de faiblesse
À court de missiles anti-aériens, ayant échoué à entraîner les États-Unis dans une guerre contre l’Iran, « Israël veut faire savoir à l’Iran qu’il souhaite mettre fin à la guerre dans les jours qui viennent » rapporte The Times of Israel le 23 juin 2025 [28].
L’attaque contre l’Iran visait à interrompre les négociations irano-américaines et à entraîner les USA dans la guerre. Par les frappes théâtrales en Iran, Trump a coupé l’herbe sous le pied des Israéliens puisque l’armée américaine a officiellement atteint les objectifs de la guerre israélienne. Même si les Israéliens savent que les sites nucléaires étaient endommagés et non pas complètement détruit comme l’affirme l’administration Trump.
En position de faiblesse, les Israéliens ont demandé et ont obtenu un cesse-le-feu. Ce qui a permis à Trump de revenir à la charge sur le cessez-le-feu qu’il avait imposé le 19 janvier 2025 et auquel Netanyahou avait mis un terme le 20 mars 2025.
Aujourd’hui, Netanyahou accepte de négocier avec le Hamas. Au moment où j’écris ces lignes, le dimanche 6 juillet 2025, Netanyahou envoie une équipe de négociateurs au Qatar en vue d’un accord de trêve de soixante jours avec le Hamas. Selon deux sources palestiniennes, « le Hamas exige des conditions sur le retrait des troupes israéliennes de la bande de Gaza, des garanties sur la poursuite de l’arrêt des combats après les soixante jours et une reprise en main de la distribution de l’aide humanitaire par l’ONU et des organisations internationales reconnues » [29].
La défaite israélienne face à l’Iran aura d’autres conséquences politiques que l’on observera dans les semaines et mois à venir.
Les conséquences négatives du théâtre trumpien
Les États-Unis n’étaient déjà plus crédibles depuis longtemps, mais désormais Trump est définitivement discrédité diplomatiquement. Plus aucun État souverain ne lui fera confiance, dans quelque négociation que ce soit. Le vice-président JD Vance parle, gêné, de reprendre les négociations avec l’Iran après avoir violé le droit international, frappant son territoire.
Quel chef d’État prendra Donald Trump au sérieux dans des négociations. Il a frappé un État avec qui il était en pleine négociation, parce que Netanyahou a décidé de le bombarder. Au lieu d’exercer son autorité et d’arrêter Israël, il a montré au monde que Netanyahou décide de l’agenda des États-Unis, ou du moins parvient à le détourner des intérêts de Washington. Trump sort de cette affaire affaibli et discrédité.
Trump est contraint de faire des manœuvres acrobatiques, mettre en place un théâtre international pour éviter de se plier complètement aux désirs de Netanyahou. Face à la pression du lobby sioniste, il y a la pression qu’exerce l’Iran sur Trump par l’éventuelle fermeture du détroit d’Ormuz qui servirait aussi de punition économique collective infligée à l’Occident collectif.
Si Trump s’engage sur la voie de la guerre, plus personne ne pourra se réclamer de lui et du trumpisme dans le futur. La carrière politique de JD Vance sera compromise.
Ces frappes théâtrales n’ont certes atteint aucun objectif stratégique, et il y aurait peu de dégâts matériels. Mais elles n’en demeurent pas moins une violation du droit international et du territoire d’un État souverain.
Quant aux États-Unis, ils sont en position de faiblesse dans le rapport de force face aux grands blocs et c’est une bonne nouvelle pour le Sud global.