S’en prendre à des gamins, c’est moralement coupable, oui. S’en prendre à des filles prépubères, ça l’est aussi. Après, quand une fille choisit de se faire dépuceler par un homme plus mûr, brillant, riche et puissant plutôt que par un boutonneux de sa classe, et d’en retirer tout le prestige possible auprès de ses amies... on aborde une autre question.
Car que l’homme plus âgé ait vingt, trente, quarante ou cinquante ans ne change rien. Les femmes sont attirées par le pouvoir, cela n’a rien d’un secret. J’observe une sorte d’inversion accusatoire. On reporte sur les hommes riches et puissants la cochonnerie du désir matérialiste des femmes... Si elles mouillent leurs culottes pour l’argent, ce serait la faute des riches... C’est toute l’imposture intellectuelle du « pervers narcissique » qui n’est jamais ni un concierge d’immeuble ni un ouvrier du bâtiment mais toujours un riche, beau, brillant, mondain, désiré par toutes les autres femmes... et qui porte la faute de l’universelle frustration féminine.
Matzneff n’aurait pas du abuser de gamins et de gamines prépubères, c’est certain, mais Vanessa Springora porte son propre fardeau de cochonnerie bourgeoise : « on a ressenti du désir », « on ne peut nier avoir été consentant » dit-elle. Elle a eu ses premiers orgasmes avec un grand écrivain parisien, aurait-elle voulu de la cochonnerie prolétaire à la Bruno Dumont ? La réponse est évidente. Et combien de femmes ont été dépucelées par des garçons plus jeunes, de lycéennes par des collégiens ?
Cela dit, Matzneff est paresseux. On trouve encore des vierges de dix-huit ans, si l’on cherche bien, qu’on peut dépuceler en toute légalité, intactes et impures, qui consentent et mieux qui veulent.
Ces remarques que je fais n’ont rien de scandaleux puisque de toute façon il est admis dans tous les commentaires qu’il est normal de coucher avant le mariage... le terrain de cette polémique est moral mais pas trop, c’est plutôt celui de l’indignation et de l’accusation, un terrain différent de celui de la morale au sens propre.