L’Inde n’est pas un pays, mais un continent, constitué d’une multitude de pays intérieurs aux dialectes et aux coutumes autonomes.

 L’expansion économique et démographique du continent indien ne surprend que l’Occident ethnocentré, qui projette sur lui et lui applique sa grille de lecture à l’échelle dérisoire de l’État-nation. Nous comprendrons l’Inde le jour où nous cesserons de raisonner en terme de pays, alors que nous avons à faire à un sous-continent asiatique qui a donné naissance à la civilisation perse : l’Iran est une ramification culturelle et génétique de la matrice indienne, au même titre que le versant russo-oriental de l’Europe est une extension génétique sino-mongole.

 Cette obsession du monde blanc pour le nombre, couplée à une propension arrogante à projeter notre alphabet civilisationnel et NOS catégories mentales sur les continents chinois et indien, a été bien comprise et analysée par les hautes sphères indiennes, imprégnées d’un pragmatisme tout britannique : si le sommet politique du continent indien refuse de transmettre à l’Occident ses indices démographiques et préfère les tenir secrets, c’est parce qu’ils ont conscience que tout ce qu’ils pourraient communiquer sera utilisé contre eux, comme prétexte à remontrances paternalistes et mise à l’index sur la scène internationale.

 Pour avoir visité l’Inde, je constate que le grouillement humain fait hélas oublier que l’Indien est un être de méthode, à la méticulosité héritée de la colonisation britannique : les gars savent exactement combien ils sont (il suffit de voir le plan des grandes villes et la présence policière), c’est juste qu’ils n’ont pas confiance dans l’usage que nous en ferons (reproches féministes sur l’insuffisance du nombre d’avortements ?).

 Analogie : Une Martiniquaise m’a dit un jour qu’elle refusait systématiquement que son généraliste la pèse, car l’indice de masse corporel en vigueur en France, est obtenu à partir d’un échantillon de population caucasienne dont les mensurations ne sont pas transposables sur sa personne d’origine bantoue + bretonne + amérindienne arawak.

 Conclusion : L’Inde et la Chine essaient de nous faire comprendre que le Tiers-Monde, surendetté, malthusien, déliquescent, c’est nous. Il va falloir l’entendre, d’autant que Poutine sait exactement comment calmer nos acouphènes.