Il est fascinant de contempler cette rhétorique qui se pare d’un manteau moral pour masquer la nudité de ses actes. Toujours la même mécanique : j’ai brisé ton arbre, mais ce n’est rien comparé aux enfants palestiniens morts ; j’ai craché sur ton visage, mais ce n’est rien comparé aux enfants palestiniens morts ; j’ai incendié ta demeure, mais ce n’est rien comparé aux enfants palestiniens morts.
Une hiérarchie étrange, un système d’équivalences qui déshonore l’intelligence. C’est la comptabilité du mépris : chaque offense, chaque larcin, chaque humiliation se solde d’avance, lavée dans le sang d’innocents lointains.
Voilà une pensée archaïque, primitive, presque tribale dans son mécanisme : elle ne s’élève pas, elle rabaisse. Elle ne juge pas selon la vérité de l’acte, mais selon l’artifice d’une comparaison. Ainsi naît la vulgarité morale : tout est permis, car ailleurs, pire encore se déroule. Voilà le frère jumeau du sionisme, cette autre logique qui justifie le vol, l’occupation et la profanation par le refrain obsessionnel de sa propre blessure.
C’est toujours le même refrain : je peux voler, car ma cause est plus grande ; je peux humilier, car ma douleur est plus sacrée ; je peux tout profaner, car d’autres enfants meurent, là-bas. Mais dans cette logique tordue, la dignité s’éteint. L’homme qui pense ainsi ne se libère pas : il s’enchaîne à sa propre excuse. Il vole, il crache, il brûle, et croit qu’il est intouchable parce qu’un drame ailleurs lui sert d’alibi.
Ce n’est pas grandeur, mais lâcheté. Ce n’est pas sagesse, mais barbarie polie d’arguments. Et c’est précisément pour cela qu’un tel homme reste voleur, insolent et sans respect : parce qu’il s’abrite derrière la souffrance des innocents qu’il n’a pas même la décence de défendre autrement qu’en s’en servant comme paravent de ses propres ignominies.