Plus on va creuser, et plus on va se rendre compte, hélas bien trop tard, que cette "petite guerre" de Libye, qui s’est décidé et terminé très vite, finalement, aura été une des plus violentes, injustes et nuisibles qu’on puisse mettre à l’actif de l’Empire. Elle introduit et fait accepter la "guerre humanitaire" (bientôt on verra émerger le concept de "génocide philanthropique" pour la Palestine !) contre des pays plutôt riches, civilisés, pacifiques et bien gérés, en se servant d’hommes de paille érigés en "insurgés contre l’oppression", et auxquels le soutien légitime tout bombardement, tout embargo, toute exaction, toute violation du droit international.
Ca fait que potentiellement, tout pays qui ne pourrait pas faire face géopolitiquement est susceptible de subir ce genre d’attaque. Je pense qu’au point où on en est, des pays pauvres d’Europe peuvent être visés, et que d’ici quelques années, même la France ne pourra plus être certaine d’en être prémunie.
Le principe de cette arme, si on le dépiaute fondamentalement, est pour l’Empire de se déclarer le gentil en couvrant toutes les voix discordantes (censure, contrôle, menaces, assassinats), de désigner un méchant, et de forcer la population à ne voir l’attaque que l’Empire lance sans déclarer que comme l’action naturelle du gentil sur le méchant.
Dans le cas de la Libye, ce qui fait vraiment très peur, c’est que Khadafi a été désigné méchant, et accepté comme tel par la population, sans même qu’il n’y ait eu nécessité de travail préparatoire. C’est comme si tout le monde avait oublié qu’à peine quelques années avant, sarko l’avait laissé installer sa tente sur les Champs Elysées, en violation de la plus élémentaire diplomatie. C’est comme si la population ne réclamait même plus de la cohérence du gouvernement, ou des raisons légitimes de s’impliquer dans une guerre civile qui ne menaçait manifestement pas nos intérêts.
La population a assimilé son rôle de spectateur face à la politique, en fait : de consommateur de mass-media. C’est pour ça que mercredi, alors que je passais à Saint-Etienne (mais j’étais très pressé), j’ai fais un grand sourire d’encouragement à une bande de jeunes plantés au milieu de la rue sous le cania, avec une pancarte "faite la guerre à la banque universelle, pas à la Syrie !". C’est dans l’espace de trop grande confiance de l’Empire en son pouvoir sur nous que peuvent être installés les coins qui le feront basculer.
Au peuple libyen : pardonnez-nous de n’avoir empêché ça !