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BHL parle de son rôle dans l’offensive française contre Kadhafi

Traduction libre par un sympathisant E&R. Se réferer au texte originel en anglais.

Le philosophe BHL parle de son rôle dans l’engagement de la France contre Kadhafi. L’intellectuel public BHL est crédité d’un rôle clé dans la conviction du président français Sarkozy de prendre la tête du chemin vers l’intervention armée en Lybie. Il a invoqué le drapeau.

Par Devorah Lauter, LAT. De Paris.

Le président français Nicolas Sarkozy a choqué le monde en menant les pressions pour que les Nations Unies adopte une résolution pour utiliser la force contre Mouamar Kadhafi dans sa bataille contre les rebelles, et puis en ordonnant aux avions de chasse français de lancer les premières attaques contre les forces du leader libyen. Peut-être de manière encore plus choquante, c’est un célèbre philosophe français que l’on crédite d’avoir déclencher la chaîne des événements. Un regard de dandy façon Hemingway, dans son audacieux activisme, prolixe littéraire et habitué à dévoiler son torse hâlé derrière sa chemise blanche déboutonné, BHL ne passe jamais inaperçu. Lévy (universellement connu sous le nom de BHL) est connu pour son activisme solitaire, sur lequel il écrit férocement. Mais l’incroyable histoire de lui parcourant les villes libyenne bombardée (en costar) pour rencontrer les leader rebelle et, un peu quand même, faisant l’histoire au nom du gouvernement français (sans en avoir informé le ministre des affaires étrangères) a beaucoup fasciné et énervé ici. Dans un hôtel huppé de Paris, il s’est assis pour parler de son rôle. Mais d’abord il a du prendre un appel sur son portable. « C’est Sarkozy » a-t-il dit avant de s’excuser. Après avoir raccroché de sa conversation avec le président de la France, un BHL apparemment épuisé s’est assis pour répondre à nos questions.

Quelle est votre relation avec Sarkozy en ce moment, vous êtes une sorte de conseiller ?

Bien sur que non ! Je suis un opposant politique. Je n’ai pas voté pour lui et je ne voterai par pour lui. Mais je pense que l’intervention en Libye est une date très importante pour la France, et pour le monde libre en général. Donc en ce sens, je soutiens la position française à 100 %

Avec son leadership militaire, le rôle de la France a-t-il changé dans les affaires du monde ?

Je ne sais pas, mais il est très important de saisir l’importance historique de l’affaire. C’est la première fois que nous faisons cesser un bain de sang rapidement…C’est la première mise en pratique de ce fameux devoir de protection, ou devoir d’ingérence... Et c’est important, au-delà même du sort des libyens.

Par rapport aux USA, est-ce que la France a agi avec plus de responsabilité, et n’y a-t-il pas là une leçon ?

Je ne sais pas si la France peut donner des leçons mais il est clair qu’elle a mené le premier rôle. Je pense que sans la France, les USA ne serait certainement pas allés si loin. Ils supportent déjà le pour des guerres d’Irak et d’Afghanistan.

Je pense que sans la France, les USA ne se seraient pas mêlés de cette histoire. Je pense que la France l’a aidé ; ce n’est pas une leçon. La France aide l’Amérique à être vraiment elle-même, parce que l’on ne peut pas faire le discours du Caire de Barack Obama et ne pas apparaître au carrefour libyen.

L’affaire libyenne est un de ces moments - peut-être le plus important de tous - où l’on voit vraiment les lignes de fractures dans le monde musulman, entre totalitarisme et aspiration à la démocratie. Ca n’a jamais été aussi clair qu’aujourd’hui. Et ça a été le thème du discours du Caire d’Obama.

Est-ce que l’OTAN a besoin de plus de soutien américain en Libye ?

On ne peut rien faire sans les forces américaines. Cela dit, je pense que les attaques américaines vont reprendre, nécessairement, contre Kadhafi.

Qu’est-ce qui vous rend si sur ?

Je reviens tout juste de Libye, et c’est mon sentiment… La coalition va gagner. La guerre ne va pas s’embourber. Ce n’est pas vrai. Et j’ai du mal à imaginer les américains rester en dehors de la victoire, parce qu’il y aura une victoire.

Pouvez-vous être plus précis sur la manière dont vous arrivez à cette conclusion ?

Ce que j’ai vu, c’est que les libyens libres vont gagner, et assez rapidement.

Par exemple ?

Par exemple, j’étais à Ajdabiya avant-hier et à Brega il y a un mois. J’ai vu les Shebabs [les jeunes civils de l’armée rebelle] à un mois d’intervalle. Cette armée s’est déjà métamorphosé. Elle n’est plus une folle et courageuse improvisation. L’armée de volontaires a un nouveau sens tactique et un commandement stratégique.

Si cette armée est si avancée, pourquoi est-ce necessaire que les USA intensifient leurs frappes ?

Parce qu’il y a tout de même un déséquilibre militaire entre les types d’armes qu’ils ont. L’armée de la Libye libre n’a pas de tank ni d’avions… et son artillerie est bien plus faible que celle de Kadhafi. Donc ils ne gagneront qu’avec les alliés… Ils ne peuvent gagner que si chaque colonne de chars découverte est bombardée.

Ce que je veux dire c’est que si nous faisons ça, dans les semaines qui suivront la libye libre sera capable de reprendre les villes martyres et même d’atteindre Tripoli. Ils sont capable de le faire.

Et sur le plan politique, pour Sarkozy, qu’a-t-il à gagner de son rôle en Libye ?

Aucun président français n’a jamais pris la décision qu’il a prise ici. On a mis trois ans à intervenir en Bosnie. Au Rwanda, nous ne sommes intervenus que pour éliminer les assassins qui étaient dans le coin. Là, quelques semaines après, nous nous engageons dans une opération pour faire cesser un bain de sang. C’est la première fois. Personne ne l’a fait avant, ni Mitterrand, ni Chirac, ni Giscard.

C’est très important. Pas politiquement, Sarkozy va surement être battu l’année prochaine et c’est ce que j’espère, soit dit en passant, mais je vous dit que pour lui c’est un événement politique majeur.

Ne craignez-vous pas que l’OTAN ne fasse pas ce que vous pensez nécessaire ?

Je pense que l’OTAN va intensifier ses frappes, non les réduire. Et je pense que le processus qui guide les attaques de l’OTAN vont amplifier dans les jours prochains.

Aujourd’hui ce sont des ajustements qui sont faits et une meilleure coordination. Pas juste du point de vue de l’OTAN mais aussi des libyens….C’est un problème de trop nombreuses sources d’information et de délais de réponse trop long. Je crois que ces deux problèmes sont résolus aujourd’hui.

Pouvez-vous nous parler du CNT, qui sont-ils ?

La plupart sont avocats, et des hommes qui ont travaillé dans le domaine du droit : anciens juges, avocats ou des juristes. Ce sont des gens orientés vers l’ouest. Certains ont vécu aux USA, ont fréquenté des universités anglaises. La plupart parlent anglais. Et ce sont des amis du monde libre.

Certains étaient des dignitaires du régime de Kadhafi, c’est bien sûr vrai. Mais un nombre plus important étaient des opposants qui ont payé cher leur opposition… Mais pas un seul n’avait une quelconque sympathie pour l’Islam radical. Je ne parlerais même pas d’Al Qaïda, ce serait ridicule. Sur les 13 ou 14 membre du CNT, aucun n’avait de sympathie pour l’Islam radical. Toute autre allégation est un mensonge.

Quelle est aujourd’hui la capacité des intellectuels pour influencer les Nation ? Elle est bien sur rare ?

Vous avez la preuve du contraire.

Quelles sont leurs chances d’être écouté par les leaders politiques ?

Elles sont faibles, bien sûr, mais parfois il y a un miracle.

Est-ce que ce que vous avez pu faire pour la Libye est un miracle ?

Oui, c’est un miracle, c’est du domaine du miracle. Bon, plus vraisemblablement, je dirais que c’est une combinaison de circonstances heureuses et d’une certaine persévérance.

Quand on vous l’a demandé, vous avez dit que Sarkozy s’est persuadé d’engager une action militaire en Libye, mais vous lui avez parlé du risque de sang sur le drapeau français s’il ne combattait pas Kadhafi. Etait-ce une conversation intense sur ce qu’il fallait faire ?

Oui oui, il y a eu une réelle conversation quand je suis revenu de Libye… au moins de mon coté ce fut intense.

Que lui avez-vous dit ?

J’ai parlé du drapeau français, comme vous le savez, et de la necessité de ne pas attendre trois ans comme en Bosnie, de ne pas manquer le carrefour historique, comme au Rwanda. Que la démocratie se trahit elle-même quand elle agit trop tard.

La poésie et la métaphore que vous avez utilisé, en parlant du drapeau français, ça ressemble presque à de la propagande ?

Oui.

Et ça marche ?

Je ne sais pas si ça marche, mais c’est comme ça. Cette phrase, je ne suis pas celui qui l’a ébruité. Je l’ai dit, mais sans calcul. Je l’ai dit parce que l’image m’a vraiment frappé quand j’ai vu le drapeau français flottant sur Banghazi, quand j’ai entendu ces gens vivant dans la peur d’un bain de sang… Et il arrive que ce fût probablement un mot (le drapeau) qui ne pouvait pas ne pas toucher le président de la république française.

Est-ce qu’être un écrivain et un philosophe, etc… vous donne une valeur ajoutée dans vos efforts en diplomatie ?

Je ne fais pas de diplomatie. Par exemple, avant-hier, j’ai fait un discours sur une place de Banghazi (la place forte des rebelles), devant dix mille personnes. Et j’ai parlé de la manière dont le monde les voyait, et j’ai aussi parlé de ce que le monde attendait d’eux. J’ai parlé de ma vision de la démocratie, de la gratitude qu’ils devraient avoir pour les faveurs que leur ont faites les nations quand ils auraient gagné. Et je suis très fier d’avoir fait cela.

Par exemple, je leur ai dit que j’étais juif. Très clairement.

Ne craignez vous pas que les français ne soutiennent plus une guerre qui s’éternise ?

Oui, c’est un risque. Mais je pense que ce sera résolu vite. Je pense que Kadhafi va partir. Cela dit, autant je suis contre son maintient, autant je suis pour un départ négocié. Je ne suis pas pour tuer qui que ce soit.

 






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