Une révolte de riches et de puissants, ce n’est pas banal. C’est pourtant ce qui arrive dans le très chic et très « culturel » VIe arrondissement parisien, visé par une frappe commerciale terroriste : l’implantation d’un Carrefour City.
La marque Carrefour, rendue célèbre en France et dans le monde (Brésil, Russie), pour ses hypermarchés (et son boycott pour cause de soutien à Israël), devant la baisse de la fréquentation généralisée, a éclaté ses magasins géants en petites unités, plus adaptées aux nouveaux modes de consommation. C’est la fin du gigantisme, de l’abondance, comme l’a prévu notre président bien-aimé.
C’est pourquoi on voit pousser des Carrefour City un peu partout. Quand c’est chez les pauvres, ça ne dérange personne ; quand ça arrive chez les riches, ça grince. Pourtant, comme le dit un collègue pauvre, il y a pas mal de radins parmi les riches, qui iront – ou qui enverront leur bonne philippine – faire leurs courses, en douce... Le compte X Brèves de presse résume le drame :
La mendicité, les ouvriers, « la racaille » et les livraisons à 6h du mat…. Panique dans le 6ème arrondissement de Paris, où l’élite s’inquiète de l’ouverture d’un Carrefour City ! Parmi les guérilleros de ce coin huppé : le chanteur Alain Souchon, le comédien Pierre Richard, l’actrice Catherine Frot, l’éditorialiste Ruth Elkrief, l’essayiste Alain Finkielkraut, le patron de presse Denis Olivennes ou encore l’ancien ministre Jacques Toubon…
Le Monde est à l’origine de tout ce barouf avec un article, mi-confraternel mi-ironique. Le journal des lobbies et des marchés qualifie en effet les insurgés de « guérilleros » :
C’est une jolie placette ombragée, où les élèves de l’École alsacienne, de Stanislas ou du lycée Montaigne ont l’habitude de se poser en grappes après les cours. Un coin prisé et préservé du 6e arrondissement, au croisement des rues Vavin et Bréa, en face du Luxembourg. Une scène d’Emily in Paris a été tournée à deux pas de la fontaine, sous la verrière du toit-terrasse qui surplombe le 19 de la rue Vavin… C’est là que, depuis des mois, un pittoresque conflit de voisinage oppose les riverains à l’enseigne Carrefour. Les guérilleros de ce coin huppé protestent contre l’ouverture sur la place d’un Carrefour City, le 21 août.
La liste des pétitionnaires contre l’implantation d’une ambassade de la pauvreté au cœur de cet entre-soi rive gauche donne le tournis :
Parmi eux, comme l’a révélé le site d’informations stratégiques La Lettre, des banquiers, des éditeurs, des avocats d’affaires et une brochette de célébrités : l’ancien ministre Jacques Toubon et la famille Toubon-Deniau, le chanteur Alain Souchon, son épouse et ses deux fils, ralliés après avoir croisé Bruno Segré dans une réunion de copropriétaires, l’essayiste Alain Finkielkraut et sa femme, l’avocate Sylvie Topaloff, l’actrice Catherine Frot. Ou l’homme d’affaires Denis Olivennes, enrôlé à la volée, un matin de brocante, et opposé à la fermeture d’Oxybul, le magasin de jeux et jouets qui occupait l’adresse jusqu’alors, et qui nous confesse « un certain conservatisme urbain »…
Que du lourd, n’est-ce pas ? Enfin, du vieux lourd... Encore un dernier paragraphe et après on arrête les emprunts, Le Monde a le bras long, et le RAID est si vite arrivé (enfin, plus vite qu’au Bataclan).
« Les livraisons de Carrefour, à 6 heures du matin, ça va être insupportable. C’est un quartier résidentiel, pas un quartier ouvrier. Il faut tenir compte du biotope, c’est de la sociologie ! », s’emporte une ex-communicante de la télé qui souhaite rester anonyme. L’installation d’O’Tacos, qui fait de la livraison à emporter jusqu’à 2 heures du matin, rend déjà fous les voisins de la rue Vavin. « C’est notre prochain combat ! », menace Bruno Segré. Pour lui, « un sujet de société se joue ici. Notre quartier est en permanence sous la menace de gens qui veulent changer notre écosystème ».
Houla, ça sent le mépris de classe à plein nez. L’irruption du social (ou du réel) dans cet « écosystème » de nantis semble être de l’ordre de la comète qui a frappé la Terre et éliminé les dinosaures il y a 65 millions d’années. On décernera la palme du mépris classieux au coiffeur pour enfants Simon Benbaruk, qui est devenu la star du jour sur les réseaux sociaux en une déclaration :
« C’est très protégé ici, et c’est normal. La police vient dès qu’on l’appelle. Quand on est à plus de 20 000 € le m2, on n’a pas envie d’avoir de la racaille en bas de chez soi ! »
Carrefour Téci
La police vient aussi dans les quartiers, mais quand on ne l’appelle pas. Ce n’est pas exactement le même traitement dans les cités qui commencent à flamber près des villes moyennes, par exemple Limoges. Mais ça se passe aussi à Béziers, Nîmes, Vendôme, Auch...
On ne comprend pas, on a Retailleau à l’Intérieur, la terreur des Algériens, et il semble que son autorité ne s’exerce pas au-delà de quelques arrondissements parisiens... Au-delà, c’est « djou-djou bwana ».
Suite à cet article incendiaire, Le Monde a été accusé par Pierre Richard d’avoir inclus son nom à tort dans la pseudo-révolte locale.
On n’ira pas jusqu’à dire qu’il y aura une jonction entre la révolte d’en haut et celles d’en bas, mais on sent comme un frémissement, dans la population. Tenez, les Gilets jaunes semblent revenir, mais cachés. Ils tiennent à leurs mains et à leurs yeux.
10 SEPTEMBRE 2025
On arrête tout en n'allant ps travailler, en ne consommant + que le minimum. Ls suceurs politiques de notre vie doivent se trouver devant notre INERTIE TOTALE & ENTIÈRE ! Ils nous ont fait ns confiner ss prétextes fallacieux À ns de le faire PR DE VRAIES RAISONS pic.twitter.com/6tNK1v6abb— Vicky Dehaene (@womandream) July 20, 2025