Egalité et Réconciliation
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Et l’identité sociale ?

Par Seb Musset

"D’ailleurs s’il en y a que ça gêne d’être en France, qu’ils ne se gênent pas pour quitter un pays qu’ils n’aiment pas."

Sur ces mots prononcés par celui qui était alors Ministre de l’Intérieur, je quittais mon pays en 2006. Comme Marie NDiaye, le Goncourt en moins

Quelques mois là-bas et je réalisais que c’était d’une France à la Machin dont je ne voulais pas.

Je revins donc dans notre beau pays fort de deux convictions :

1 / On n’émigre jamais par plaisir.

2 / Ne pas laisser à Machin (ne jurant que par l’Amérique de ses fantasmes) un boulevard pour définir ce que devaient être le devenir d’un pays (dont il n’aura de cesse de réarranger le passé) et l’idée d’une France que, de La Princesse de Clèves conspuée à son mépris ostensible des citoyens en passant par sa karchérisation des acquis sociaux entrecoupée de tours de jogging paparazzé dans son tee-shirt NYPD (oui chez lui, c’est aussi de la politique), il n’aura de cesse de piétiner l’héritage.

Début 2007, j’espérai un peu prématurément que les français y verraient clair. 30 mois plus tard, l’euphorie générale a laissé sa place aux déceptions individuelles. Du coup, faute d’arranger le pays et parce ça sent un peu les élections, Machin nous reparle Nation (le cadet de ses soucis, lui son kif c’est le pouvoir et le pognon).

Au lendemain d’une nouvelle OPA discursive sur l’identité nationale, fourre-tout cache-misère, l’INSEE publie sa réponse à la question sans fin du premier des Français (à s’en moquer) via le portrait social annuel du pays.

A défaut de carte d’identité nationale, voici une brève fiche signalétique de cette France de 2008 dont Machin ne veut pas parler. (Il faudra attendre un an de plus pour les glorieux chiffres de 2009).

Question chômage...

"Au cours du 1er semestre 2009, le recul du marché du travail s’amplifie avec plus de 270 000 destructions d’emploi. Les perspectives à court terme sont médiocres, l’ajustement à la baisse de l’emploi sur l’activité n’étant pas achevé. Le taux de chômage passe de 7,1 % au 1er trimestre 2008 à 9,1 % au 2e trimestre 2009 en France métropolitaine [...] Le nombre de chômeurs augmente donc de presque 30 % en un an et demi. Par ailleurs, de nombreuses personnes se retrouvent au chômage partiel. [NDLR : alors que c’était en baisse depuis 20 ans]. En réaction à la crise économique, et afin de limiter le nombre de licenciements économiques, les modalités d’autorisations du chômage partiel sont assouplies fin 2008. Le recours à ce dispositif s’amplifie début 2009 et 320 000 personnes sont dans une situation de chômage partiel ou technique au 2e trimestre 2009, [NDLR : principalement dans l’industrie et à 70% des hommes] soit un niveau équivalent à ce qui était observé en 1993."

Question salaires...

Ils augmentent en 2008 en moyenne de 0.2 % (+ 0.1 % pour les ouvriers, -0.1 % pour les cadres). En 2008, comme on dit, les primes sautent. Les salariés ne sont plus du tout en tout en position de force pour négocier quoi que ce soit. Les femmes gagnent toujours -20% que les hommes. Et c’est la rémunération horaire nette des plus de 55 ans qui augmente le plus (+8% en 6 ans).

Une seule catégorie tire son épingle de ce début de mauvaise conjoncture : Les 1% de très hauts salaires. Leurs rémunérations sont au top des progressions dans des secteurs ne représentant que 20% de l’emploi salarié total (finance, commerce de gros, ingénieurs).

Le rapport souligne également l’écart croissant sur onze ans entre le bas de la pyramide salariale et son sommet (touchant 6,5 fois le salaire médian en 1996, pour 8,5 en 2008).

Vous trouverez également d’intéressantes données sur les revenus (le pouvoir d’achat quoi...). dont le niveau moyen stagne (18170 euros par an, soit 1510 euros mensuels) pour remonter début 2009 (à cause de la chute des prix). En 2007, le taux de pauvreté monétaire est de 13,4 %, soit 8 millions de personnes. 9,9 % des personnes actives ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté alors que 15,3 % des inactifs sont dans cette situation. Le travail ne protège plus de la pauvreté : 1,9 million de personnes en emploi vivent en 2007 en dessous du seuil de pauvreté. Même les possesseurs d’assurances vie et les propriétaires immobiliers morflent (comprendre : Ils gagnent moins qu’avant, environ +3%).

En croisant les données, on peut conclure que si vous étiez un ouvrier, homme divorcé, de 50 ans et que vous aviez fait un placement immobilier pour compléter vos revenus (grâce aux banques et autres promesses électorales envers La France des Propriétaires, il y en a) : 2008 n’était vraiment pas votre année. (Pour peu que vous ayez voté Machin, alors là vraiment vous devez vous mordre les couilles.)

On trouvera également la confirmation via un long article que les travailleurs pauvres sont favorisés (pour une fois) par l’association de la prime pour l’emploi (nouveauté 2009) et du revenu de solidarité active. Le cumul forme un revenu bâtard les empêchant de boite le bouillon mais avec ces fâcheuses conséquences de ne pas les sortir de cette situation et d’officier comme un vrai dumping envers les emplois classiques à temps plein en bas de l’échelle des revenus. Pour peu que l’employeur ait des allègements de charges (et autres suppressions de taxe professionnelle), on ne si prendrait pas autrement pour installer un salariat de seconde classe flexible et bon marché dans lequel le patronat pioche à la carte. En gros, le travailleur pauvre d’aujourd’hui est un peu le stagiaire d’hier, sauf que lui ce n’est pas dans l’entreprise mais dans la vie confortable qu’il ne rentrera jamais.

Un rapport que je vous invite à fouiller, qui n’est que la surface comptable du climat social mais qui a le mérite d’être officiel.

Conclusion : Si Machin au service du tout-au-fric veut nous causer d’identité nationale à nous autres pov’cons :

1 / Qu’il nettoie d’abord un peu son exercice quotidien de la république à base de contrevérités, de mensonges, de discours creux et / ou clonés.

2 / Qu’il s’attaque à la précarité et contribue à la réduction des inégalités. (N.B : Autre qu’en favorisant le travail sous payé.)

Bref, que Machin arrête de se soucier de La France et qu’il s’intéresse un peu plus aux français pour changer. (N.B : Autrement que par sondages.)

Alors seulement, je l’appellerai Président.

Parce que là j’ai comme un doute sur l’identité républicaine.