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18 octobre 614, le roi Clotaire II promulgue l’édit de Paris

Le 18 octobre 614, le roi Clotaire II (portrait ci-contre) promulguait l’édit de Paris, mettant notamment fin à la guerre civile qui faisait rage entre francs.

Pour comprendre le contexte dans lequel intervient cet événement, il faut remonter au règne de Clovis. Ce dernier était parvenu à donner une certaine unification politique à la Gaule sans remettre en cause son fonds civilisationnel gallo-romain et chrétien. Cependant, lors de sa mort en 511, la coutume franque est appliquée : les terres de Clovis sont partagées entre ses quatre fils. L’Austrasie (l’Est de la Gaulle et une partie de la Germanie) est accordée à l’aîné, tandis que la Neustrie (l’Ouest de la Gaulle) est partagée entre les trois autres héritiers.

Héritant du royaume de Soisson, Clotaire, le frère cadet, parvient peu à peu à réunifier le domaine royal de son père. Lors de son règne il étend même son contrôle à la Burgondie (la Bourgogne). Mais à sa mort en 561, la coutume franque est scrupuleusement appliquée et les fils de Clotaire se partagent à nouveau le royaume. Cette division évolue ensuite vers des guerres entre clans luttant pour la suprématie sur ces territoires.

C’est à ces luttes fratricides que va mettre un terme Clotaire II, petit fils de Clotaire. Élevé en secret dans un contexte d’assassinats généralisés commis entre les différentes branches de la famille royale, Clotaire II s’impose par la force à la tête des territoires francs au début des années 610. Les divers royaumes (l’Austrasie, la Neustrie et la Burgondie) restent cependant largement sous influence des noblesses locales.

Le 18 octobre 614, Clotaire II convoque à Paris cette noblesse terrienne des trois royaumes, mais également de nombreux évêques qui se réunissent en concile. Cet appui du pouvoir politique sur le pouvoir religieux s’inscrit dans la tradition de Clovis. Après sa conversion en 496, ce dernier avait en effet largement collaboré avec les représentants religieux afin de réaliser une heureuse fusion entre le peuple gallo-romain christianisé et la minorité franque conquérante et détentrice du pouvoir.

Ainsi c’est l’Église, indépendante vis à vis du politique, qui définit les conditions d’exercice du pouvoir royal. Ces assemblées de 614 convoquées par Clotaire II sont certes l’occasion pour les ecclésiastiques de trancher des questions purement religieuses, mais elles permettent surtout au roi d’apaiser les tensions politiques et d’affirmer son pouvoir sur les trois royaumes francs. En contrepartie, des concessions importantes sont accordées à l’aristocratie. L’édit consacre ainsi le principe selon lequel les agents administratifs ne peuvent plus être nommés hors de leur province d’origine. La fonction de maire du palais est également renforcée. Ces intendants du roi sont au nombre de trois, soit un par royaume. Leur inamovibilité est consacrée (ils sont nommés à vie) ce qui permettra par la suite de rendre leur fonction héréditaire. C’est d’ailleurs au sein des maires du palais d’Austrasie que naîtra la future dynastie carolingienne.

S’il a un effet pacificateur et permet à Clotaire II d’asseoir sa légitimité, l’édit de Paris renforce donc paradoxalement les pouvoirs locaux ainsi que le pouvoir de l’Église. L’édit contient également des règles de bonne administration du domaine royal ainsi que des réformes de justice, par exemple en punissant très sévèrement l’enlèvement de femmes ayant décidé de vouer leur vie à Dieu. Les rapts de ces femmes retirées du marché matrimonial s’étaient en effet multipliés à cette époque.

Voir aussi, sur E&R :

Découvrir l’histoire de France avec Jacques Bainville
et les éditions Kontre Kulture :

 






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17 Commentaires

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  • #1003422
    Le 18 octobre 2014 à 18:42 par machin
    18 octobre 614, le roi Clotaire II promulgue l’édit de Paris

    Comme il est souligné dans l’article, c’est Clotaire II qui va permettre de rendre les charges de la noblesse héréditaire, ce que va accentuer Charlemagne par la suite.
    Sous les mérovingiens, les nobles étaient désignés par les rois et se faisaient retirer leur charge quand les rois n’avaient plus besoin d’eux, la noblesse n’était pas héréditaire.
    Si Clotaire II leur a accordé cela, c’est parce qu’il leur devait son trône à la suite de la guerre civile, un peu comme de nos jours où nos hommes politiques accordent des avantages aux milieux d’affaires parce qu’ils leur doivent leurs élections.

    http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89...

    A ce sujet, il faut lire La reine Brunehaut de Bruno Dumézil, Chilpéric Ier, le roi assassiné deux fois de Frédéric Armand et Dagobert, roi des Francs de Maurice Bouvier-Ajam.

     

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    • #1003554
      Le Octobre 2014 à 21:39 par listener
      18 octobre 614, le roi Clotaire II promulgue l’édit de Paris

      Je souhaiterais, à propos de ces fameux mérovingiens, avoir des précisions documentées et scientifiques sur cette fameuse histoire de "culotte à l’envers". J’ai entendu dire qu’il s’agissait d’une allusion à un rite extrêmement ancien (peut-être d’origine pré-celtique, c’est dire !) qui consistait pour le "preux" élu dans une certaine confusion - excusable en ces temps peu démocratiques ou le "code électoral" était encore dans les limbes - par ses pairs, d’enfiler des "braies" (sorte de pantalons avec beaucoup de réserves) "à la gauloise" dans les sous-sols mystérieux de la cathédrale de Reims ou de ceux de Soissons, rite très secret qui aurait été d’ailleurs respecté jusqu’au dix-huitième siècle. Ce serait au cours de ce rite initiatique singulier propre au sacre du "roy" de France (chapeau bas ! Messieurs !) que Dagobert aurait effectivement enfilé lesdites "braies" à l’envers, ce qui aurait provoqué l’hilarité générale et irrépressible des preux, comtes et barons, admis au rituel secret. On se perd en conjectures donc ! Mais qu’en est-il exactement ? Je ne sais. Je souhaite avoir des précisions là dessus, sans trop d’espoir.

       
    • #1003690

      @listener
      Dans la culture populaire française, Dagobert est surtout connu au travers de la chanson du Bon Roi Dagobert. Celle-ci semble dater de la Révolution française. Selon la légende, Dagobert était tellement distrait qu’il avait l’habitude de mettre ses culottes (ses braies, pantalons) à l’envers. Myope, Dagobert avait l’habitude, selon Wulfram de Strasbourg (VIIIe siècle), de se prendre les pieds dans les tapis et de chuter, sous les regards médusés des témoins. Bon vivant et populaire, il riait bien souvent de sa propre personne. Le respect dû au roi a fait passer sa légendaire distraction pour une simple légende.

      Cette chanson, écrite sur un air de danse dit Fanfare du Cerf, n’a pas pour but de transcrire une vérité historique mais plutôt de se moquer du roi Louis XVI, connu entre autres pour sa personnalité distraite, et de la reine Marie-Antoinette, à travers ce roi ancien et mal connu.
      http://fr.wikipedia.org/wiki/Dagobe...

       
    • #1004054
      Le Octobre 2014 à 14:04 par listener
      18 octobre 614, le roi Clotaire II promulgue l’édit de Paris

      Réponse à Machin. Mille merci pour cet éclaircissement complet et documenté. La légende du "sacre secret" des rois de France était donc trop belle pour être vraie. C’est un peu ce que je pressentais. Mais le mot "légende" vient bien du latin legere (lire) dans son gérondif "legenda" ce qui signifie "chose qui doit (tout de même) être lue" et donc, pas à jeter à la rivière. Je cherche l’origine de cette "légende" qui m’intrigue beaucoup..

       
    • #1006674
      Le Octobre 2014 à 21:35 par listener
      18 octobre 614, le roi Clotaire II promulgue l’édit de Paris

      Recherches faites, je ne trouve rien sur "Wulfrand de Strasbourg". Il y a bien un saint Wulfrand (connu par un ancien manuscrit de Stenay) qui est à peu près contemporain de Dagobert mais il semble n’avoir rien écrit et n’a réalisé que des miracles merveilleux et drolatiques, comme beaucoup de saints de cette délicieuse époque. Le mystère s’épaissit.

       
  • #1003495
    Le 18 octobre 2014 à 20:38 par anonyme
    18 octobre 614, le roi Clotaire II promulgue l’édit de Paris

    France porte le nom des envahisseurs :Francia ,du peuple franc(ripuaire,chamave,salien),ce sont des peuples barbares de l’est qui ont conquis la Gaule, ils ont soumis les peuples qui y étaient installés depuis des siècles,les gallo-romains.

    La minorité franque qui a soumis la majorité (les gallo-romains) ,ces même gaulois qui eux même ont été soumis par les romains,éternelle soumission aux minorités.
    Si on veut être cohérent au sens historique c’est pas le nom de France mais celui de Gaule que devrait porter notre pays

     

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    • #1003610

      La Gaule (ou les Gaules), en latin Gallia, est le nom donné par les Romains à un territoire occupé par des populations celtes (gaulois, belges) et aquitaines.

      Donc Gaule est le nom donné par l’envahisseur etranger, en l’occurence romain.

      Il faudrait connaitre le nom que les celtes donnaient a leur pays, sachant que la tribu avait plus de signification que l’idee de nation celte ou plus precisement gauloise.

      Les gaulois n’etaient pas une nation car ils n’avaient pas de nom pour celle-ci, ils etaient avant tout eduens, arvernes, pariisis...

      enfin semble t il

      par ailleurs je conseille l’emission radiophonique : L’imaginaire gaulois : rites, religion et croyances : Paroles de Gaulois

      http://www.franceculture.fr/l%E2%80...

       
    • #1003668
      Le Octobre 2014 à 23:37 par Gotfried
      18 octobre 614, le roi Clotaire II promulgue l’édit de Paris

      Les "Gaulois" n’existent pas non plus vraiment : le terme était utilisé par les romains pour qualifier des peuples celtiques plus ou moins "compatibles" avec eux (Gaule Cisalapine, la plus "civilisée", la Narbonnaise, colonie romaine, et la Transalpine, comprenant l’Aquitaine, la Lyonnaise et la Belgique, mais il y avait aussi l’opposition "Gaule en toge"/"Gaule en braies"/"Gaule chevelue"). En réalité, c’était un patchwork de peuples aux frontières ethniques et culturelles difficiles à tracer, et dont certains avaient sacrément la bougeotte.

      Ces peuples celtes tardifs ont eux-même supplanté des populations "proto-celtes" (ou peut-être que la "celtitude" s’est développé/répandu au sein de ces populations sans migrations significatives ni changements ethniques), et avant eux encore il y avait les dresseurs de mégalithes, dont on ne sait quasiment rien. Bref, il est impossible de dire qui sont les véritables autochtones de ce pays. Et à la limite, on s’en fout un peu. On est les dépositaires d’une histoire qu’on ne peut pas changer et qu’on a pas choisi, et chaque décennie voit naître de nouveaux autochtones aux origines multiples et de plus en plus lointaines. Ce qui compte, c’est de faire nation, pour le présent et pour le futur.

      Pas la peine de fantasmer le passé, en récupérant des vieux trips du style "Clovis roi très-chrétien, père de la France". Au contraire il me semble qu’une historiographie critique et dépassionnée, dont on n’exclurait pas les nouveaux français comme de l’histoire d’une famille qui n’est pas la leur, serait un bon moyen de réasseoir une certaine identité française qui ne soit pas dans la crispation, dans la droite ligne de la doctrine E&R.

       
    • #1003678

      Gaule (Gallus) rappelons que ça viens de Caesar qui fut surpris par l’abondance de volailles pendant qu’il envahissait le pays.
      Bref ces gaulois étaient organisé en fédération de large tribus, on peu comme les amérindiens.
      On dirait de nos jours en réseau de Base Autonome Durable, la volaille étant la pour en témoigner.
      Les intellectuels latins utilisaient gaulois pour les Celtes de Gaule et de Galatie, on peut penser que les turcs à peau clairs sont des cousins des français de souche. Rappelons l’Épitre aux Galates, ou les nouveaux chrétiens se posent la question d’appliquer des trucs de l’ancienne alliance...

      Mais comment ce nommaient-ils entre eux ? ben, les celtes ? donc la France devrait s’appeller la Celtie ? (enfin je crois avoir lu un terme plus joli ... dans les Astérix ?)

       
    • #1003685

      Les "envahisseurs" donnent souvent les noms, l’Algérie ne s’appelle pas la Berbérie, sauf à un moment ou la région était plus ou moins libre, c’était la côte des Barbaresques.

       
    • #1003712

      Dès cette époque il y avait des collabos, des peuples qui collaboraient en secret avec les Romains contre d’autres Gaulois, toute l’histoire de ce pays..
      Les Gaulois, ils n’étaient pas une nation, mais parlaient une langue similaire et croyaient aux mêmes Dieux.
      Sinon, @anonyme, les Gaulois aussi ont étés envahisseurs d’autres peuples minoritaires, mais si on parle de France, c’est parce qu’il s’agit d’une nation crée par les Francs, sur la monarchie, le christianisme etc..

       
    • #1003768

      Il suffit pas non d’en appeler au grand mix, à la diversité « présente depuis les origines des peuples » (puisque tu vas la trouver) pour justifier n’importe quel domination. Le truc de la domination (flux/conquête) c’est qu’elle peut mener à un brassage comme la lutte contre la domination à un refus. C’est valable historiquement pour tous : il y a pas un choix arbitraire à suivre. Sans oublier tous les entre-deux.
      Je suis absolument d’accord sur le fait de dépassionner mais si c’est pour faire de l’idéologie dans une interprétation autant faire ce qui sert nos intérêts (donc pas les mêmes pour tous). Et fort à parier que beaucoup ne veulent pas leur civilisation périr ethniquement à défaut de préserver un héritage.

       
    • #1004437

      Soulignons aussi le fait qu’en latin, la Nation française se dit « Gallorum Gens » !

       
    • #1013912

      @david

      Gergovie ? la Gergovie ce serait sympa.

      Gergovie, c’est la-bas que les romains se sont pris une rouste, comme quoi les discplinés romains pouvaient pliés face aux valeurs mais anarchiques gaulois.

       
  • #1003508
    Le 18 octobre 2014 à 20:49 par denil
    18 octobre 614, le roi Clotaire II promulgue l’édit de Paris

    Merci ! Très interessant.

     

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  • #1004030
    Le 19 octobre 2014 à 13:42 par Simone Choule
    18 octobre 614, le roi Clotaire II promulgue l’édit de Paris

    Et après il y en a pour dire que cette période n’a pas existé (ou sous une autre forme dans le Récentisme) mais alors qui a rédigé cet Edit ? Le Bas Moyen Age (mérovingiens + début carolingiens) est une période passionnante (et des Châteaux vachement street crédible).

     

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