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Israël veut la guerre mais ses adversaires la lui refusent

Israël bombarde à nouveau la Syrie, Israël simplifie sa procédure d’engagement militaire, Israël accuse l’Iran de détenir l’arme atomique... Pas de doute, voyons : Israël, c’est la paix, l’amour entre les peuples et la lumière des nations. Entité métaphysique investie de prérogatives hors du commun, elle a le droit de bombarder qui elle veut quand elle veut ! Pour obtenir cette impunité, il est vrai que l’État-colon a colonisé tout le monde : Washington, Paris, Londres et même l’ONU. En attendant, ce fauteur de guerre bombarde la Syrie, quitte à provoquer une escalade dévastatrice.

 

C’est hallucinant, mais le tir de missiles du 30 avril est la centième opération israélienne contre la Syrie depuis 2013. Lorsqu’ils visent des installations militaires syriennes, pourtant, les dirigeants sionistes se doutent bien que Damas et Téhéran (également visé) finiront par répliquer. Il ne leur a pas échappé qu’un avion israélien (deux, si l’on en croit certaines sources) a été abattu en février, ni que la DCA syrienne a repoussé la majorité des missiles lancés le 14 avril par le trio néocolonial (USA, France, GB).

Mais c’est un fait : aucune action de représailles n’a été engagée contre Israël pour ces agressions, ni contre les pays occidentaux pour celle du 14 avril. Directement visés par des actes de guerre, l’Iran et la Syrie observent une retenue qui nourrit la perplexité de nombreux observateurs.

Cette patience calculée, pourtant, l’agresseur aurait tort de la prendre pour un aveu de faiblesse. En matière stratégique, faire preuve de sang-froid n’est pas un défaut, mais une qualité. Le provocateur cherche toujours à imposer son agenda. Lui répliquer sans attendre revient à accepter ses conditions. Il en va de même des provocations verbales, et on a vu avec quelle ironie Téhéran a répondu aux dernières accusations sur son prétendu programme clandestin. Ces « allégations éculées », a déclaré le ministre iranien des Affaires étrangères, ne sont que le « bluff ressassé » digne d’un « garçon qui crie au loup ». Lorsqu’un État qui détient 300 têtes nucléaires soustraites à tout contrôle international fait la leçon à un État dépourvu d’arme nucléaire et soumis à un strict contrôle de l’AIEA, en effet, on se dit que la réalité dépasse la fiction.

Mais si l’Iran et la Syrie ne renvoient pas à l’agresseur la monnaie de sa pièce (du moins pas tout de suite) et se contentent d’une attitude défensive, c’est pour la simple raison qu’ils ne veulent pas d’une confrontation militaire avec un adversaire dont ils connaissent la folie meurtrière.

Fruit d’une guerre coloniale, l’entité sioniste ne prospère qu’en rendant cette guerre perpétuelle, car elle justifie la violence structurelle exercée sur les Palestiniens – qu’Israël a spoliés – et sur tous ceux qui lui résistent dans la région. À l’opposé, l’Iran et la Syrie n’exercent aucune domination coloniale et n’agressent aucun État étranger. Loin de souhaiter la guerre, ces deux pays redoutent au contraire un embrasement général qui s’abattrait comme un fléau sur les peuples de la région. Victimes de la guerre et de l’embargo, la Syrie et l’Iran n’aspirent qu’à la reconstruction et au développement. S’ils s’abstiennent de répliquer aux agressions étrangères, c’est parce qu’ils ont d’autres priorités, et que le jeu, pour l’instant, n’en vaut pas la chandelle.

L’avenir dira s’ils ont eu raison, mais ces deux États privilégient à l’heure actuelle une stratégie défensive qui a fait ses preuves lors de l’agression tripartite du 14 avril. 70 % des missiles ennemis ont été neutralisés, et la défense antiaérienne syrienne dissuade désormais les aéronefs hostiles de s’aventurer dans l’espace aérien syrien.

À propos de l’attaque israélienne du 30 avril, certaines sources évoquent l’emploi de missiles de moyenne portée dernier cri lancés depuis l’espace aérien jordanien. Ces missiles seraient capables, dans les conditions actuelles, de déjouer les radars de la DCA. Si cette information est exacte, c’est un nouveau défi lancé à l’armée syrienne et à ses alliés, notamment russes, qui ont déclaré qu’ils livreraient prochainement des S-300 à la Syrie. Quoi qu’il en soit, Moscou ne tient pas plus que Damas et Téhéran à ce que la confrontation actuelle dégénère en guerre ouverte. Son intervention militaire en Syrie a fait la preuve de son efficacité depuis octobre 2015. Mais il est clair que la Russie ne se laissera pas entraîner dans un conflit majeur sur un théâtre d’opérations éloigné du sol national.

On lit parfois que Moscou aurait passé un accord avec Israël l’autorisant à frapper le Hezbollah et l’Iran en échange de sa neutralité dans le conflit syrien. Aucune preuve n’a jamais été fournie d’un tel accord, et il est invraisemblable. La coordination opérationnelle entre les forces syriennes et alliées sur le terrain, de facto, interdirait ce double jeu.

La Russie s’est engagée dans un conflit qui oppose l’État syrien et un terrorisme d’importation. Dans ce domaine, on ne peut pas dire qu’elle ait fait défaut à ses alliés : Daech est quasiment éradiqué, et ses multiples avatars sont mal en point. Mais Moscou évite soigneusement toute escalade avec les États de la région. La Turquie approuve les bombardements occidentaux sur la Syrie, mais cela n’empêche pas la Russie d’associer la Turquie aux négociations d’Astana.

L’enchevêtrement des conflits dans la région brouille les pistes, c’est vrai. Mais nous sommes dans le monde réel. La force des choses conduit les uns et les autres à faire des compromis, et seul le résultat compte. Qu’auraient à gagner la Syrie et l’Iran à une guerre totale avec Israël et les USA ? C’est bien parce qu’ils n’en veulent pas qu’ils ne répondent pas aux provocations. Ils se réservent le droit de le faire à leur manière et au bon moment, celui qu’ils auront choisi.

La victoire est une longue patience.

Bruno Guigue

Bruno Guigue, sur E&R :

À lire chez Kontre Kulture :

 
 






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30 Commentaires

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  • #1956846
    Le 2 mai 2018 à 12:21 par rapportdetaille
    Israël veut la guerre mais ses adversaires la lui refusent

    Erreur, la Syrie et l’Irak sont quasi inexistantes sur la carte, à peine visibles quoi...

     

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  • #1956864
    Le 2 mai 2018 à 12:45 par Elliott Smith
    Israël veut la guerre mais ses adversaires la lui refusent

    Excellent article d’un auteur que j’affectionne particulièrement et relayé à juste titre sur E&R et médias arabes.

     

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  • #1956889

    Bibi va sûrement être de la partie pour l départ du Giro car i part d’Israël sûrement en direction de Téhéran

     

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  • #1956948
    Le 2 mai 2018 à 14:09 par Antoine
    Israël veut la guerre mais ses adversaires la lui refusent

    Bruno Guigue tout comme Thierry Meyssan sont d’excellents analystes du Moyen-Orient, cependant l’un comme l’autre me donnent parfois l’impression de pêcher par surcroit d’optimisme.

    La méthode Coué c’est bien pour surmonter certaines maladies mais je ne suis pas sur que cela soit suffisant pour gagner une guerre contre des psychopathes avérés.

    Malgré toute mon admiration pour Poutine, le fait qu’il n’ait pas encore livré ses S300 ajouté au fait qu’il ne s’oppose jamais frontalement à un Israël qui bombarde régulièrement son allié syrien me laisse quand même pas mal d’amertume dans la bouche.

     

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    • #1958765
      Le Mai 2018 à 03:23 par Francois Desvignes
      Israël veut la guerre mais ses adversaires la lui refusent

      Le vide est une stratégie militaire russe depuis Koutouzov devant les armées napoléoniennes : utiliser le temps et l’espace comme armes défensives.

      Ne pas répondre
      Toujours reculer
      Laisser l’adversaire s’éparpiller et s’épuiser dans ses agressions.

      Dans ce qu’il est maintenant convenu d’appeler la guerre de Syrie (différente de la guerre contre l’E.I), cette stratégie a eu cet effet inattendu de disloquer l’entente des alliés, la position de Trump n’étant pas celle de Tel Aviv encore différente de celle l’Etat profond elle même soupçonnée différente de celle de Paris ou de Londres d’ailleurs différentes entre elles.

      C’est du à l’élection.

      La Russie oppose une stratégie stable et constante à des pays qui ont l’instabilité stratégique et diplomatique de leurs majorités électorales.

      C’est le camp occidental qui ne peut pas soutenir une guerre totale faute de volonté politique stable auX sommetS de leurS hiérarchieS.

       
  • #1956982
    Le 2 mai 2018 à 14:45 par Aldebaran
    Israël veut la guerre mais ses adversaires la lui refusent

    Pour ceux qui se demandent pourquoi Poutine soutient Israël, Hillard le développe en long en large et en travers. Et ça reste en travers de la gorge justement. Israël est comme une femme avec 2 prétendants...

     

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  • #1957068
    Le 2 mai 2018 à 16:54 par Le king
    Israël veut la guerre mais ses adversaires la lui refusent

    Ceux qui veulent la guerre trouvent toujours un moyen de la provoquer, d’une façon ou d’une autre...ici, le maillon faible, c’est l’Irak : il suffit de couper ce pays en son milieu pour couper l’Iran de la Syrie...

     

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  • #1957116

    Marrant, sur la carte géographique que montre Netanyahou, Gaza, le Liban, la Syrie, l’Irak et l’Iran sont coloriés en noir (1) alors que "avant", l’ennemi, c’était les membres de Daech qui eux étaient tout de noir vêtu (2) et à Paris hier pour la manif du 1er mai, les 1200 "casseurs" étaient de couleur ... (3)

    1 fois c’est un hasard
    2 fois c’est une coïncidence
    3 fois c’est un complot

    Comme quoi le simple choix de la couleur est important, ça rentre direct dans le subconscient des gens : noir = mal.

     

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    • #1957801

      Tiens... votre remarque rappelle un passage du Talmud.

      Talmud Moed Kattan 17a

      Rabbi Ila’i said : Si une personne est tentée de faire le mal, elle devrait aller dans une ville où elle n’est pas connue, s’habiller de noir, se couvrir la tête en noir et faire ce que son cœur désire afin que le nom de Dieu ne soit pas profané.



      Rabbi Ila’i said : If a person is tempted to do evil he should go to a city where he is not known, dress in black clothes, cover his head in black, and do what his heart desires so that G-d’s name will not be desecrated.


       
    • #1957848

      @ Zvoncar

      Oh la vache, la correspondance est flagrante, merci pour votre commentaire car je n’ai même pas lu ce livre.

       
  • #1957301

    La guerre par la tignasse....https://www.youtube.com/watch?v=xp-.... une synthèse !

     

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  • #1957391

    Qui suis-je pour donner des conseils mais ça fait plusieurs fois que je me fais la réflexion alors bon... Il serait judicieux de la part des dirigeants des pays "non aligniés" de s’adresser aux peuples occidentaux en faisant tout bêtement des vidéos sur youtube, même des vidéos courtes. Beaucoup de gens sont dubitatifs quand aux intentions belliqueuses de nos dirigeants et pensent que financièrement nous ne sommes pas non plus en mesure d’engager des guerres aux 4 coins du monde. Le mensonge domine et c’est uniquement par sa domination qu’il peut continuer à exister. Ce mensonge fut mis en lumière en grande partie grâce à internet, je trouve que cette arme n’est pas assez utilisée, les "non alignés" peuvent s’en servir pour faire contre feu aux médias occidentaux. Je serai content de voir un Assad, un Poutine et même un Kim Jong Un s’adresser à nous sans intermédiaires et je pense que ce dernier sera le premier à le faire car il a sûrement plus d’un tour dans son sac. Le calme, la personnalité et l’assurance de ces dirigeants sont intrinsèque à la qualité du combat qu’il mène sur le plan géopolitique tout du moins et beaucoup d’occidentaux seront séduits, il ne faut pas être absent de la guerre de l’image car elle nous berce au quotidien depuis plus de 50 ans.

     

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  • #1958643
    Le 4 mai 2018 à 21:27 par Saint Paul de Damas
    Israël veut la guerre mais ses adversaires la lui refusent

    Comment croire des gens qui ne font que mentir depuis leur création ???

     

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