Il est juste qu’un amateur puisse écrire sur le sujet qu’il désire, et il n’est pas question de réserver une matière aux universitaires. Il y a toutefois un avantage, qui va aux universitaires et dont ne jouissent pas tous les autres : c’est d’avoir, en plus de la connaissance d’une discipline, une certaine conscience de son historiographie. Or ce qui est un avantage pour les uns est une exigence pour les autres, et quand un amateur veut faire table rase de trois siècle d’archéologie, d’iconographie, d’épigraphie, de prosopographie (ut talpa), il doit avoir une conscience solide des points forts de ces sciences ; car il faut se souvenir, en bon classique, que la topique précède la critique. Seuls les modernes croient le contraire.
Un commentaire est bien trop court pour traiter ce sujet, voilà donc quelques remarques mêlées :
1. L’iconographie des Trois Grâces précède et Raphaël et Pompéi : elle est dans l’iconographie classique comme hellénistique, et dans l’iconographie byzantine. Quant à Raphaël, il avait pour modèle le groupe de Sienne, qui appartenait au cardinal de Colonna, mort en 1463.
2. La perspective n’a pas été inventée par Masaccio : chez lui, elle est monofocale. Elle n’est pas oubliée, mais hiérarchique, dans l’art médiéval. Elle avait été critiquée, comme chacun sait, par Platon ; mais aussi décrite chez Vitruve et Pline l’Ancien - qui la traite à propos de Zeuxis, Parrhasius, Apelle et Protogène.
4. La perspective diffère ainsi beaucoup entre les Grâces de Raphaël et l’art pariétal pompéien. Elle est monofocale chez Raphaël, mais curviligne à Pompéi, preuve, à en croire la rhétorique du dossier, que la fresque précède bien Raphaël, puisque la perspective curviligne est d’arrière-garde par rapport à la perspective monofocale italienne.
4. Si l’existence de Pompéi est attestée avant le XVIIe siècle, comme l’auteur de l’article l’admet, il n’y a rien de douteux dans la mention de l’épigraphe inscrit sous Philippe IV.
5. Quand on cite une inscription latine, il est d’usage de citer un corpus épigraphique, comme le CIL, autrement, n’importe qui peut donner la date qu’il veut à ce qu’il veut. Il y a bien un problème de rigueur et de sources dans ce dossier. En ce qui concerne la fiabilité du CIL, elle dépend des romanistes prussiens et allemands. Voyez la biographie d’Ulrich von Wilamowitz-Moellendorff. Ce Junker, seigneur de Prusse, est plus aryen que vous,
Es horcht der Verbannte,
In nächtlichen Höhlen
Der Alte die Lieder,
etc.