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Le droit des robots progresse

"Donner la personnalité juridique aux robots c’est accepter de déresponsabiliser les hommes"

Le Parlement européen a approuvé un rapport préconisant d’accorder une personnalité juridique aux robots. Pour Hubert Rodarie, directeur général délégué du groupe SMA, l’homme doit rester maître et responsable des machines qu’il conçoit ou possède.

 

Le Parlement Européen a approuvé il y a quelques jours un rapport présenté par la député socialiste luxembourgeoise Mady Delvaux. Celui-ci analyse les conséquences juridiques de la présence grandissante de robots dans la vie quotidienne européenne. Une mesure phare proposée dans le texte est de donner la personnalité juridique aux robots. Si plusieurs commentateurs ont réagi très négativement, ce rapport est passé plutôt inaperçu du moins en France où l’attention médiatique est concentrée sur l’élection présidentielle.

Pourtant ce vote mérite d’être relevé. Car il peut être replacé dans un débat séculaire lié à l’apparition auprès des citoyens d’un nouvel être : la « personne morale ». Rassurez-vous, il n’est pas question de faire ici une analyse juridique détaillée mais de s’appuyer sur cette expérience pour percevoir les enjeux de la proposition Delvaux.

Rappelons que, en s’appuyant sur une pure conception démocratique, par la loi Le Chapelier, la Révolution française, supprima les corporations qui avaient la capacité juridique. Ils laissèrent le citoyen seul face à l’État qui, conformément aux conceptions de Hobbes et de Rousseau, constituait de fait la seule personne morale. Pourtant, quelques années après, la personnalité morale a été réintroduite, notamment pour les sociétés commerciales. Fiction ou réalité, les juristes se divisent sur le sujet. Mais néanmoins cette personne morale est venue s’insérer en tant que telle dans la vie quotidienne des citoyens. Elle revendique des droits et lui sont imputés des responsabilités. Aux États-Unis, la Cour Suprême lui reconnaît même toutes les protections que la Constitution accorde à ses citoyens, le récent arrêt Citizens United (2010) va au bout de cette logique en reconnaissant aux entreprises le droit de participer pleinement au débat politique.

Au premier regard, il n’y a pas de difficultés car les personnes morales sont théoriquement contrôlées par des hommes qui en assument les actions et les évolutions. Il s’agit donc de reconnaître une certaine réalité collective, principalement dans les activités économiques, mais que le révolutionnaire français avait nié de façon excessive.

Pourquoi pas, car cela tombe sous le sens quand il s’agit d’entreprises familiales, locales ou agissant surtout dans le territoire d’un pays. Toutefois des difficultés surgissent lorsque la taille et la puissance des entreprises dépassent celles de nombreux pays. Et ce, d’autant plus que le rattachement des entreprises à des personnes s’affaiblit fortement entre la subordination des salariés et la responsabilité des actionnaires limitée à leur apport en capital. Il s’est donc créé progressivement des entités qui se sont détachées et autonomisées par rapport à ceux qui y participent. La nature spécifique de cette autonomie apparaît clairement notamment lorsque se pose la question de leur nationalité : celle de leurs dirigeants, de leurs actionnaires, ou celle du pays de leur siège social ? Nul ne sait trancher a priori rationnellement. Et pourtant, il a fallu le faire en Europe et aux États-Unis à l’occasion des crises bancaires à partir de 2007. Or, si les entreprises ont des pouvoirs qui dépassent ceux des simples citoyens, certaines avaient aussi des tailles bien supérieures à celles des États auxquels elles se sont rattachées par force dans la tempête. Les conséquences ont été dramatiques pour les citoyens de certains pays. Ils payent encore pour les pertes de leurs « concitoyennes » qu’ils ont dû assumer.

Cette autonomie des personnes morales impose donc de se poser les questions suivantes : comment sont définis les objectifs, comment sont exercés les pouvoirs au sein de l’entreprise ?

À ce stade, on peut analyser les modes de fonctionnement des entreprises en regardant si elles reposent sur des prises de responsabilités de dirigeants stratèges bien identifiés ou si elles se réfèrent davantage à ce que j’ai appelé dans La pente despotique de l’économie mondiale (éd. Salvator 2015) un imaginaire cybernétique. Selon cet imaginaire, l’activité des entreprises doit être organisée autour d’objectifs et d’un ensemble de procédures visant à une « auto-adaptativité » et de règles pour les créer ou les modifier et qui constituent ce que l’on appelle la gouvernance.

Lire la suite de l’article sur lefigaro.fr

Sur les rapports entre l’homme et la machine, lire chez Kontre Kulture :

Voir aussi, sur E&R :

 






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21 Commentaires

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  • #1691584
    Le 27 mars 2017 à 23:48 par Odyle
    Le droit des robots progresse

    Mady Delvaux est députée au Luxembourg connu comme centre financier. Chacun sait que les robots et algorithmes sont beaucoup utilisés dans la Finance...d’où l’intérêt pour les banquiers de refiler la responsabilité de leur gestion défectueuse aux machines.
    Si pour les voitures sans conducteurs en cas d’accident on peut voir une logique à rechercher quelle entité juridique est responsable, il est évident que dans d’autres domaines les hommes auront tendance à se dédouaner en prévision de plaintes de clients ou d’actionnaires.
    Je parie donc que c’est le système financier qui est derrière cette proposition...pas responsable, pas coupable en cas de faillites !

     

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    • #1691606
      Le Mars 2017 à 00:48 par goy pride
      Le droit des robots progresse

      C’est exactement cela qui se trame derrière ce genre d’absurdités ! Allez plus loin encore dans l’impunité totale !
      Ils font un forcing massif pour imposer coûte que coûte leurs voitures automatiques qui sont encore incapables d’évoluer dans des conditions réelles de circulation provoquant ainsi des accidents. Pour pouvoir imposer la présence des robots dans la société ils ont besoin de s’attaquer à deux volets : le premier concerne la circulation routière. Ils ont besoin de policer à outrance les comportements humains afin que ces derniers se comportent en quelques sortent comme des robots, c’est à dire de manière prévisible, car les voitures automatiques sont incapables d’évoluer dans un environnement naturel routiers, trop complexe et chaotique. Par contre si les hommes sont "dressés" à conduire comme des robots les véhicules automatiques pourront aisément évoluer dans cet environnement simplifié, rationalisé et prévisible. Le second volet est juridique ; vers qui se tourner quand un véhicule automatique est responsable d’un accident comme cela est déjà arrivé par le passé ? Un être humain normal répondrait avec logique vers l’entreprise propriétaire de ces machines...

       
  • #1691610
    Le 28 mars 2017 à 01:00 par goy pride
    Le droit des robots progresse

    Quand un animal domestique provoque des dégradations sur la propriété d’autrui, voire blesse ou tue un être humain la justice détermine dans un premier temps si l’action de l’animal est le résultat ou non d’une négligence de son maître, de la personne qui s’en occupe. Si la réponse est oui c’est cette dernière qui doit en assumer la responsabilité et en subir les conséquences légales, si la réponse est non le propriétaire est relaxé. Si les dommages provoqués par l’animal ont touché à l’intégrité physique d’un être humain en général la mise à mort de l’animal est préconisé car il représente un danger pour la société, mais en aucun cas on accorde une personnalité juridique autonome à ce dernier. Non ?

     

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  • #1691634
    Le 28 mars 2017 à 06:58 par alinéa bis
    Le droit des robots progresse

    L’humain se distingue de la machine par l’autonomie potentielle de ses actes et pensées mais la fusion et confusion est possible si toute lucidité devient superflue dans un monde ou tout se vaudra et tous seront alignés sur deux ou trois modèles destinés à des castes melant humains et robots.
    Un meilleur des mondes à la mécanisation et la désolation accrue par la conscience que l’histoire a pris la plus stupide des tournures.

     

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  • #1691638
    Le 28 mars 2017 à 07:34 par Mickaël
    Le droit des robots progresse

    C’est complètement débile ! Pourquoi ne pas accorder la personnalité juridique aux animaux, aux véhicules ou encore aux bâtiments tant que l’on y est ? Normalement, au regard du Droit civil, les robots sont censés être des choses, c’est à dire que ce sont des entités inertes qui n’ont pas de volonté propre. Si on leur accorde la personnalité juridique, ça voudrait dire qu’ils auraient par exemple un patrimoine propre, qu’ils pourraient conclure des contrats ou qu’ils auraient la possibilité d’aller en justice. Sans compter les incidences que cela aurait effectivement en Droit de la responsabilité. Actuellement, lorsqu’un dommage est causé par une chose, comme un robot, son gardien (qui n’est pas forcément son propriétaire selon l’arrêt "Franck" de 1941 rendu par la Cour de cassation) est civilement responsable, même s’il n’a pas commis de faute. C’est ce que l’on appelle la responsabilité du fait des choses que l’on a sous sa garde (article 1242 alinéa 1 du Code civil). Si la personnalité juridique des robots était reconnue pour les robots en Droit français, alors le régime que je viens d’expliquer ne s’appliquerait plus dans ce cas et on irait vers une irresponsabilité civile du gardien d’un robot étant à l’origine d’un fait dommageable. Si le législateur européen venait à reconnaître une telle hérésie juridique, alors nous serions contraints de l’appliquer en France, puisque le Droit européen prime sur les Droits nationaux des Etats membres (arrêt "Costa contre ENEL" rendu en 1964 par la Cour de justice des Communautés européennes).

     

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  • #1691658
    Le 28 mars 2017 à 09:28 par Nomo
    Le droit des robots progresse

    Humaniser les robots pour robotiser les hommes.

     

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  • #1691660
    Le 28 mars 2017 à 09:34 par Cyprien
    Le droit des robots progresse

    Pourquoi il faut commencer à réfléchir très rapidement à la nécessité " de taxer les robots ".
    Tout simplement pour la bonne raison suivante :

    L’appétit pour l’argent étant ce qu’il est ,et les hommes étant ce qu’ils sont , il n’y aura AUCUNE LIMITE à l’emploi massif des robots.
    Ce qui aura pour conséquence que dans 20 ,30 ou 40 ans ; 50 ou 60% du travail fait par un humain aura disparu .
    Au bénéfice de qui me direz-vous ,mais de la haute finance frelatée ,bien évidemment.

     

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  • #1691685
    Le 28 mars 2017 à 11:00 par Khem
    Le droit des robots progresse

    Les robots ne sont pas vivants. Si certains veulent leurs donner des droits c’est qu’il y à une entube qqpart.

     

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  • #1691870
    Le 28 mars 2017 à 18:25 par tatayoyo
    Le droit des robots progresse

    Quand les robots accompliront les tâches des humains dans presque tout on peut se demander ce que l’oligarchie va faire de "nous" ...

     

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  • #1691881
    Le 28 mars 2017 à 18:54 par zouzou
    Le droit des robots progresse

    Accorder la personnalité juridique à des choses ?...alors, il faudra aussi l’accorder aux animaux, qui sont des êtres doués de sensibilité. Ca tombe bien, je comptais tout laisser à mes chats.

     

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  • #1692010
    Le 28 mars 2017 à 23:00 par Chevalier Lefebvriste
    Le droit des robots progresse

    Le droit des robots progresse
    Donc mon plug anal va avoir des droits ?
    Mince alors ....

     

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