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Les sympathisants du FN s’éloignent de N. Sarkozy

Le désamour enregistré par les instituts de sondage chez les Français à l’égard de Nicolas Sarkozy frappe de plein fouet les sympathisants du Front national qui s’étaient laissés séduire. Entre mai 2007 - arrivée à l’Elysée de M. Sarkozy - et janvier 2008, sa cote de confiance auprès de cette catégorie d’électeurs est passée de 88 % à 43 % pour l’IFOP et 86 % à 48 % pour la Sofres.

"L’état de grâce s’est dégradé dès l’été 2007", explique Jérôme Fourquet, directeur des études à l’IFOP, en soulignant, qu’après s’être déclarés confiants à 88 % en mai (soit 23 points de plus que la moyenne nationale), ces sympathisants frontistes ne le faisaient plus qu’à 65 % en juillet-août (2 points de moins que la moyenne). Il semble que cet électorat, en grande partie populaire, n’ait pas apprécié la soirée au Fouquet’s, le soir de l’élection, et "que Nicolas Sarkozy se balade sur des yachts pendant ses vacances alors qu’eux ont du mal à remplir leur chariot", commente M. Fourquet. Un second décrochage a eu lieu en novembre. A cette date le pourcentage d’opinions favorables était encore de 62 %, avant de s’effondrer à 43 % en janvier.

Les entretiens recueillis par l’institut LH2 ou par la Sofres, montrent bien l’état d’esprit de ces Français affichant une proximité partisane avec le FN : "Il n’est pas un bon président il se fait trop voir", déclare une mère de famille ; "il n’a pas tenu se promesses électorales. Il s’est servi des ouvriers", explique une autre ; "je tiens un bar-tabac et je ne suis pas satisfait de la loi anti tabac", se plaint un commerçant. D’autres évoquent "les petites retraites", "la hausse du prix du fuel" et, plus généralement, "du coût de la vie, alors que les salaires n’augmentent pas" et Carla Bruni, la nouvelle épouse du président "avec qui il s’affiche trop", ainsi que "l’entrée de la Turquie dans l’Europe" ou la visite du président libyen en France.

"On constate une conjonction de deux phénomènes : un sentiment d’atteinte à la fonction présidentielle avec l’exposition de la vie privée de Nicolas Sarkozy et une impression que le pouvoir d’achat, coeur du projet présidentiel, n’est pas traité", commente Stéphane Rozès, directeur d’études à CSA. "Les sympathisants de l’extrême droite ont été séduits par les discours de Nicolas Sarkozy sur le travail, la France qui se lève tôt, le respect de l’autorité. Ses vacances à Petra, son mode de vie, ses amitiés, ont fait renaître ce sentiment des puissants contre les pauvres", explique Jérôme Fourquet. "Il s’est banalisé. Avec son côté bling-bling et ostentatoire, il a montré qu’il était du côté de l’establishment et n’était pas le tribun populiste et populaire qu’ils souhaitaient", continue-t-il, en soulignant que le rapport Attali, qui propose de relancer l’immigration de travail, n’a pu qu’indisposer cet électorat.

Un désamour n’implique cependant pas toujours une désaffection. Rien d’ailleurs ne permet de dire que les frustrations ressenties par les sympathisants frontistes à l’encontre de l’action du président se traduiront par un retour dans le giron du FN. " Les sondages sur les municipales prédisent des scores nettement inférieurs à ceux de 2001", affirme Brice Teinturier de la Sofres. "Le FN, qui fait face à des problèmes financiers, ne se présentera que dans un nombre réduit de villes, et ne semble pas prêt à récupérer cet électorat disponible. Cela n’exclut tout de même pas des scores non anecdotiques ici ou là", pense M. Fourquet.

Au Front national, on joue la prudence. "La déception est encore trop fraîche pour se concrétiser par un transfert de l’électorat de Nicolas Sarkozy vers la gauche ou le FN", estime Carl Lang, membre du bureau politique. "Nous risquons plutôt de voir une augmentation de l’abstention. Il faut que l’on aille vers les électeurs qui ont voté Jean-Marie Le Pen au premier tour de la présidentielle et qui ne se sont pas déplacés pour les législatives soit plus de 2 millions de personnes." "Il n’y a pas d’effet automatique entre la déception ressentie par nos sympathisants et leur retour à un vote frontiste", renchérit Marine Le Pen, vice-présidente du FN, qui espère que son parti sera "suffisamment attractif pour que les municipales soient la première marche vers son redressement."

Christiane Chombeau

Source : http://www.lemonde.fr