Egalité et Réconciliation
https://www.egaliteetreconciliation.fr/
 

Dubaï, l’antithèse d’une nation

par Guillaume D.

AteliER
Article initialement publié dans l'atelier E&R

Élève en école d’ingénieur, je reviens d’un stage de 2 mois à Dubaï aux Émirats Arabes Unis, et ce que j’y ai vu est édifiant. Je viens ici vous faire partager mes observations et mon analyse.

Le temps joue contre l’Émirat

Commençons par une brève description de l’état actuel de Dubaï. C’est en 1971, avec la création des Émirats Arabes Unis (E.A.U), que cette région du monde est sortie du giron anglais. Dès lors, le nouvel État connait une véritable explosion économique, exploitant ses ressources pétrolières, et investissant dans de gigantesques infrastructures. Ce dynamisme attire de nombreux étrangers, qui apportent main d’œuvre et savoir-faire.

Toutefois, cette société toute jeune est déjà en crise, menacée d’effondrement. En effet, ses réserves pétrolières sont extrêmement maigres et leur exploitation s’arrêtera d’ici une dizaine d’années (Dubaï ne possède que 4% du pétrole des E.A.U). Si on peut raisonnablement fixer le début de l’histoire "émirate" par l’arrivée des iraniens au début des années 50, on peut également anticiper une fin précoce.

La famille royale l’a bien compris, et pour pallier les ressources naturelles qui feront bientôt défaut, tout est mis en œuvre pour transformer la ville en une gigantesque plaque tournante du commerce international. Il peut paraître inapproprié de penser qu’un ralentissement économique provoquerait l’extinction d’un État. Toutefois, si les richesses devaient disparaître, il s’en suivrait un exode massif des étrangers, n’ayant plus d’activité professionnelle sur place. Exode qui serait fatal à un pays dont seulement 5% de ses habitants possèdent la nationalité.

C’est un concept qu’il est très important d’intégrer. Les nationaux sont si peu nombreux que même la police et l’armée sont composées d’étrangers. Dans des conditions pareilles, on comprend mieux en quoi l’économie est fortement corrélée à l’existence même de cette région, et qu’il est impossible d’envisager un avenir à la société "émirate" sans cette prospérité économique. Le temps joue ici un rôle majeur, et menace la survie du pays.

Les groupes

Comme nous avons pu le constater, la population dubaïote est essentiellement composée d’étrangers venus travailler. La plupart sont indiens ou philippins, mais on dénombre plus d’une cinquantaine de communautés étrangères.

Avant d’aller plus loin dans l’analyse, il est important de situer le contexte politique. Les habitants (citoyens ou non) n’ont aucun pouvoir politique. Il n’y a ni suffrage, ni parlement, et encore moins d’élections. Il n’est pas étonnant alors que certaines lois du pays puissent paraître abusives. Parmi elles, il existe l’obligation pour une entreprise étrangère d’avoir un associé dubaïote. Celui-ci doit détenir plus de la moitié des parts de l’entreprise. Appelé « sponsor » ou « propriétaire », il ne s’investit nullement dans les affaires de la société. Il se contente de louer son nom afin de permettre un investissement venu de l’extérieur, et perçoit une rente mensuelle. Il n’existe évidemment aucune limite au nombre d’entreprises qu’un « sponsor » peut détenir.

De cette simple loi résulte la création d’une élite, qui détient 100% des biens du pays. En revanche, en cas de faillite d’une de leurs compagnies, aucun « sponsor » n’est inquiété. Ainsi, les entreprises se font et se défont, toujours au profit des locaux.

Alors, pourquoi les étrangers investissent t-ils à Dubaï ? Tout simplement car la législation sur le travail est très souple, les travailleurs ne sont que très faiblement protégés. De plus, il n’existe pas d’impôt pour les entreprises. Enfin, il n’est pas interdit de vendre à perte, ce qui provoque une très forte concurrence, émanant essentiellement des groupes à forts capitaux. Les PME n’ont guère d’autre choix pour résister que de pratiquer des salaires très bas.

Toutes ces mesures finissent par se payer, au frais évidement des employés. En effet, travailler à Dubaï implique de faire des journées longues (pour ma part : de 9 à 11 h par jour, 6 jours par semaine) pour un salaire très médiocre. Mais ces conditions conviennent aux plus démunis, qui obtiennent malgré tout de quoi entretenir leur famille, en Inde ou au Pakistan. Je me suis alors posé cette question : "Comment se fait-il qu’un groupe représentant 95% de la population, accepte ainsi de donner la quasi intégralité du fruit de son travail à une élite oisive ?" La réponse, qui est le ciment sur lequel la société dubaïote est conçue, est le tribalisme.

Il peut paraître absurde, que deux employés qui partagent les mêmes conditions déplorables de travail, puissent ne pas se sentir solidaires, sous prétexte que l’un est indien et l’autre ougandais. Mais force était de constater que toute action, tout échange passe par une considération tribale. Un client indien refusera d’adresser la parole à un vendeur noir, ce même vendeur ne pourra se loger que dans des appartements réservés aux personnes qui partagent sa couleur de peau. Les philippins refusent de travailler avec les indiens, un indien hindou ne logera pas dans un immeuble où vivent déjà des indiens musulmans ou chrétiens. Il en va de même pour les communautés tunisienne, libyenne, libanaise, chinoise etc.

Ce déchirement de la classe ouvrière fait avorter d’avance toute idée de revendication sociale. Aux divisions tribales, qui profitent largement aux puissants, il convient d’ajouter un autre facteur de morcellement, qu’est la loi islamique.

Le fait religieux

Les Émirats Arabes Unis forment un pays très jeune. Tellement, que l’on ne peut pas parler d’une identité propre à la nation. S’il existe, bien sûr, un aspect culturel, il s’agit en réalité de cultures importées. Même les nationaux, hormis certaines vieilles familles dont la famille royale, sont en réalité de « récents » immigrés iraniens.

Il en résulte un manque évident de repères, de consistance, parfaitement normal pour un État d’environ 40 ans. Afin de pallier à l’absence d’histoire, les émirs ont alors pioché allègrement dans les traditions arabes musulmanes. Le tout réadapté dans un univers extraordinairement moderne. Là où l’on peut émettre une réserve, c’est lorsque la religion se met à remplir le code pénal.

En effet, sous prétexte d’Islam, le pays croule sous les lois liberticides. On notera l’interdiction d’habiter en colocation, de consommer du porc ou de l’alcool, de diffuser de la musique dans les lieux publics pendant le ramadan… J’insiste pour dire que le fait religieux n’est qu’un prétexte, et qu’il n’est pas à imputer directement à la religion la façon dont les lois sont établies. Cela constitue en réalité un moyen très pratique de gérer les personnes sans avoir à rendre de comptes sur les démarches adoptées.

En réalité, toutes les transgressions aux interdictions issues de l’Islam sont très largement tolérées. Vous trouverez facilement de l’alcool dans des bars spécialisés, le porc est rebaptisé « viande pour non-musulmans » dans les supermarchés et plus de 80% de la population vit en colocation, seule solution face aux loyers exorbitants.

Alors à quoi bon toutes ces mesures ? C’est simple, il est ainsi possible de renvoyer n’importe quelle personne dans son pays d’origine. Ainsi, si quelqu’un devient gênant, pour une raison ou pour une autre, il est expulsable dans l’heure. La population, et en particulier le travailleur pauvre, se voit en permanence sous la menace d’un retour forcé. On constate que dans tous les Émirats, la criminalité avoisine le zéro absolu. Mais c’est également vrai pour tous les mouvements de contestation, comme les grèves par exemple. Sans devenir satirique, la devise du salarié moyen pourrait être de ne surtout jamais faire de vagues.

Conclusion

Des trois aspects détaillés ici, on peut en tirer une conclusion commune : la construction de Dubaï repose sur la certitude que sa population restera dans sa condition de servitude. Il est nécessaire en effet, pour soutenir l’économie florissante de l’Émirat ainsi que les rentes des dubaïotes, qu’une main d’œuvre bon marché soit en permanence disponible.

Comme nous l’avons vu, les deux piliers qui soutiennent cet édifice, bâti sur l’assujettissement de sa population, sont le tribalisme et la loi irrationnelle. Ce tour de force, que constitue l’organisation de cette société, devrait être un signal important sur les dangers d’une mondialisation toujours au service d’une petite minorité, prédatrice et cruelle.

 






Alerter

60 Commentaires

AVERTISSEMENT !

Eu égard au climat délétère actuel, nous ne validerons plus aucun commentaire ne respectant pas de manière stricte la charte E&R :

- Aucun message à caractère raciste ou contrevenant à la loi
- Aucun appel à la violence ou à la haine, ni d'insultes
- Commentaire rédigé en bon français et sans fautes d'orthographe

Quoi qu'il advienne, les modérateurs n'auront en aucune manière à justifier leurs décisions.

Tous les commentaires appartiennent à leurs auteurs respectifs et ne sauraient engager la responsabilité de l'association Egalité & Réconciliation ou ses représentants.

Suivre les commentaires sur cet article

Afficher les commentaires précédents
  • #231106
    Le 29 septembre 2012 à 10:34 par Nop
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    Quand je vois des gens avec des "T-shirts" "I Love Dubai" ça m’agace au plus haut point.

     

    Répondre à ce message

  • #231110
    Le 29 septembre 2012 à 10:46 par kilian
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    Le Tribalisme, c’est l’organisation sous forme de Tribu. Plusieurs "Familles" forment un "Clan", plusieurs "Clans" forment une "Tribu", plusieurs "Tribus" forment une "Nation". C’est la base de toutes sociétés Matri-centrées. Le Vrai problème c’est l’immigration et le communautarisme qui en résulte.

     

    Répondre à ce message

  • #231153
    Le 29 septembre 2012 à 12:40 par Mansur
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    Le monde arabe devenu totalement stérile, décadent, ultra matérialiste, copiant l’architecture de l’Occident... La honte.

     

    Répondre à ce message

    • #231581
      Le Septembre 2012 à 03:16 par Moi, Peter Sellers
      Dubaï, l’antithèse d’une nation

      Oui, c’est la honte. Mais ce qui cloche chez eux, ont la aussi chez nous... c’est un mirroir qu’on nous tend. Les nouveaux monde, les eldorados, les far-west qui réinvente tout... ne sont que des baromètre de se qui se passe chez nous aussi, sous le vernis. La mondialisation c’est l’infâme partout. Nos supermarchés jettent la nourriture... partout du gaspillage... Eux c’est l’eau précieuse sur les Greens de golf. C’est le Kali-Yuga toute les impuretés remontent comme l’écume à la surface... Le vent souffle ou Il veut disent les Chrétiens... Si il plait à Dieu/Allah en un coup de vent toutes ces impureté disparaitront de Son souffle.
      C’est pas parce qu’un dromadaire n’as qu’une bosse qu’il s’enfoncent moins qu’un chameau dans les sables mouvants.

       
  • #231183
    Le 29 septembre 2012 à 13:55 par Sami
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    Mais Dubai n’a jamais prétendu être une nation !

    C’est ridicule de comparer ce mini cité-état aux civilisations aussi anciennes que la France,la Perse,l’Egypte ou la Syrie !

    On peut au mieux faire une comparaison avec Monaco !

     

    Répondre à ce message

  • #231398
    Le 29 septembre 2012 à 21:03 par Decepticus
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    Merci pour ce compte rendu. La démesure et la richesse ostentatoire de cet état m’a toujours inspiré du dégoût et du mépris. Ton article l’explique très bien, Dubaï prend le pire des deux mondes : le capitalisme abject pratiqué en Occident conjugué au tribalisme racial encore présent en Arabie. Ce modèle de société basé sur l’injustice n’est pas fait pour durer. La chute sera rude et ça me réjouit plutôt.

     

    Répondre à ce message

  • #232017
    Le 1er octobre 2012 à 08:29 par abeilles
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    Tous ces Pays là ,ne sont que l’arbre qui cache une forêt immense ;ils ne sont pas musulmans ;ce ne sont que des Dictateurs sans âme ,que nos Chacals utilisent ,pour remplir leur coffre fort ,Mais le jour où ces larbins auront terminés leur action
    Qui possèdent les Armes ,qui dirigent enfin compte ces bédouins orgueilleux ,vaniteux ,ils n’aident pas leurs frères Africains qui meurent de famine ;ils achètent des Pays comme la France en Faillite pour faire Quoi ,alors que les richesses se trouvent en Afrique justement ,Notre France n’a plus rien ,la raison nos Vautours font venir autant de pauvres ,pour piquer nos quelques économies ,fond de tiroirs ,merci ces Emirs qui viennent se vautrer avec la jeunesse Dieu punira tous ces Rapaces

     

    Répondre à ce message

  • #232021
    Le 1er octobre 2012 à 08:51 par Ramir
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    Je souhaite revenir sur la tolérance sur l’application des lois.

    En Chine c’est le même principe qui court, mais pas uniquement pour les étrangers. Les lois sont très très librement appliquées, ce qui fait que le cas échéant on pourra toujours reprocher à n’importe quel citoyen d’en avoir enfreint une.
    Cette tolérance est donc un moyen de tenir la population, un peu comme le patron du FBI avait des fiches sur tous les présidents américains.

     

    Répondre à ce message

  • #232116
    Le 1er octobre 2012 à 13:44 par I LOVE DUBAI
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    Etats arabes unis du golfe ou Etats-Unis des arabes au golf.

     

    Répondre à ce message

  • #232174
    Le 1er octobre 2012 à 15:27 par anonyme
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    Comment peut-on prendre position sur un sujet qu’on ne maîtrise absolument pas ? J’hallucine sur le niveau des commentaires, et en même tant, j’admire l’assurance avec laquelle on peut débiter autant de contre-vérités...désolé, mais pour prétendre commenter l’actualité comme le fait AS, celà nécessite une connaissance très approfondie du sujet. Sinon, ça en devient ridicule, ou pire encore : ça en devient partisan (donc de la manipulation). Je crois que vous avez de la lecture à rattraper les gars !

     

    Répondre à ce message

  • #233179
    Le 2 octobre 2012 à 21:16 par Alpha
    Dubaï, l’antithèse d’une nation

    L expulsion dans l heure est véridique de même que tout ces travailleurs étranges achètent de l or en bijoux qu ils garde sur eux des qu ils reçoivent leur paie

     

    Répondre à ce message

Afficher les commentaires précédents