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Jeux Olympiques de Pékin : ces Éthiopiens qui veulent courir pour la Serbie

Ils ont fui leur pays, l’Ethiopie, à cause de la guerre en Somalie et des risques de mobilisation. Trois athlètes installés dans le petit village de Pambukovica, près de la ville d’Ub, pourraient rapidement obtenir la citoyenneté serbe. Dans cette hypothèse, ils porteront les couleurs de la Serbie aux prochains Jeux Olympiques, et pourraient rafler nombre de médailles. Alors que beaucoup de sportifs balkaniques mènent leur carrière en Occident, la Serbie parie sur ces précieux renforts !


L’athlétisme serbe ne doit plus être préoccupé par les résultats des courses, parce qu’il pourra compter pour la première fois de son histoire sur des champions étrangers naturalisés.

Les athlètes éthiopiens Tamrat Legese (25 ans), Gebreziber Gebresluse (28 ans) et Estefanos Eshetu (18 ans) s’entraînent régulièrement dans le village de Pambukovica, près d’Ub, et rêvent du jour où ils obtiendront le passeport serbe pour défendre les couleurs de notre pays dans les grands championnats internationaux.

« Mon plus grand désir est de devenir champion de Serbie, puis champion du monde et de remporter la médaille d’or aux Jeux olympiques », explique le jeune Estefanos, appelé Stefan par son entraîneur et ses voisins.

L’entraîneur du club athlétique Čukarički, Zoran Molović, a été le premier à aider les Éthiopiens qui ont demandé l’asile en Serbie à la fin du mois d’octobre dernier. Ils les a installés dans sa ferme de Pambukovica, il s’est arrangé avec le magasin du voisinage pour les pourvoir en vivres et il s’est occupé de leur entraînement.

« C’est mon père ! Et mon entraîneur, bien évidemment », s’exclame Gebre, le plus grand des trois coureurs éthiopiens, et il nous montre un clip musical de la vedette turbofolk serbe Seka Aleksić, enregistré sur son téléphone portable. Son collègue Tamrat nous propose de boire des jus de fruits et d’écouter les chansons de Neda Ukraden [vedette folk serbe], tandis que Stefan interdit à l’entraîneur de fumer en leur présence.

« No smoking, no ! La prochaine fois, tu nous apportera une affiche pour le mur avec l’interdiction de fumer »...

Les murs de la vieille maison sont recouverts de photographies d’athlètes célèbres, dont le Jamaïcain Asapha Powell. Le plus jeune des Éthiopiens, Estefanos Eshetu, explique que ce coureur est son idole.

« Asapha Powell a couru des courses brèves, mais il est l’homme le plus rapide du monde. On doit le respecter et l’aimer. De plus, tous les Éthiopiens aiment bien la Jamaïque à cause de Bob Marley. Sa musique est toujours la plus populaire en Éthiopie », explique Stefan.

Les trois Éthiopiens se sont vite habitués à vivre en Serbie. Ils ont fui leur pays à cause de la mobilisation militaire et de la guerre en Somalie. Ils vivent de manière modeste et retirée. Le poulet reste leur plat favori, mais ils mangent également du veau et du porc. Cependant, leur famille leur manque et ils se parlent souvent au téléphone.

« Tout est très bien ici, on ne peut pas le nier. C’est comme ça pour le moment, et nous verrons ce qui se passera plus tard. Lorsque j’ai quitté l’Éthiopie, j’y ai laissé mon épouse et notre fille qui avait cinq mois. Elle a grandi entre-temps. Je suis venu ici à cause de l’athlétisme et je souhaite fortement réussir », explique Gebresluse.

Le plus jeune membre de ce trio sympathique est aussi celui qui présente le plus grand potentiel. « Nous nous attendons à ce qu’Eshetu remporte une médaille l’année prochaine aux Jeux sportifs universitaires et au championnat européen pour les jeunes. Son record de vitesse en semi-marathon est d’une heure et deux minutes, tandis que les deux autres ont 120 secondes de retard. Eshetu a couru 10 kilomètres en 29,35 minutes, et 800 mètres en 1,51 minutes. Ils ont un avenir dans l’athlétisme européen, je crois qu’ils auront la norme nécessaire pour les Jeux olympiques à Pékin », assure Zoran Molović.

Ancien joueur du Crvena zvezda [club de football serbe de l’Étoile rouge], Zoran Molović explique ouvertement que l’assistance qu’il apporte aux Éthiopiens n’est pas seulement humanitaire.

« Je crois dans ces gars et je suis sûr qu’ils réaliseront de bons résultats. C’est pourquoi j’ai signé un contrat de manager avec eux, stipulant qu’un petit pourcentage de leurs prix emportés aux meetings et marathons me reviendra. Ils seront bientôt rejoints par Olivera Jevtić, car le village de Pambukovica offre d’excellentes conditions d’entraînement », poursuit Zoran Molović.

A. A. et T. D. - Traduit par Jasna Andjelić

Source : http://balkans.courriers.info