Egalité et Réconciliation
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« La politique des USA et Israël est sans issues - l’époque du colonialisme est finie »

Interview avec l’ambassadeur iranien Hojjatol Islam Ali Akbar Naseri au Vatican.

Antonio Grego et le directeur Tiberio Graziani ont rencontré pour « Eurasia » Son Excellence l’Ambassadeur de la République Islamique d’Iran près le Saint Siège Hojjatol Islam Ali Akbar Naseri.

Dans cet entretien l’ambassadeur a parlé de l’imminente conférence sur le désarmement nucléaire convoquée par l’Iran et, évidemment, du dossier atomique qui concerne la République islamique, en réaffirmant les intentions pacifiques de Téhéran et en attaquant la politique des USA et d’Israël. L’ambassadeur Naseri a exprimé son appréciation pour l’entente trouvée par l’Iran avec divers pays, qui, à son avis, renforcera la paix dans le monde ; il a lancé un « appel » au Vatican pour qu’il défende les droits des peuples par rapport aux puissances néocoloniales.

Il y a quelques jours Téhéran a annoncé qu’il allait organiser les 17 et 18 avril une conférence sur le désarmement nucléaire à laquelle participeront des délégués de nombreux pays. La conférence aura comme thème « l’énergie nucléaire pour tous, l’arme nucléaire pour personne ». Pouvez-vous nous expliquer les raisons qui ont conduit l’Iran à organiser cette conférence ?

Au nom de Dieu le Clément et le Miséricordieux je vous remercie pour votre présence et je vous remercie aussi pour votre point de vue fondé sur le droit et sur la raison. En ce qui concerne votre question : l’accumulation d’armes nucléaires va à l’encontre de la paix dans le monde et crée de la préoccupation dans la communauté internationale. Malgré toute la propagande et tous les slogans faits jusqu’à présent, rien n’a été accompli de concret pour éliminer ces armes nucléaires. La République Islamique d’Iran, dans le but de gagner les défis actuels dans le monde sur ce thème et de présenter des solutions pour parvenir à un monde privé d’armes nucléaires et de destruction de masse, organise cette conférence à laquelle participeront les autorités de plus de 60 nations. Avec la conférence de Téhéran sur le désarmement nous entendons affirmer le principe selon lequel « l’énergie nucléaire pacifique est à la disposition de tous les peuples et l’arme nucléaire de personne ».

La Chine a déjà annoncé qu’elle participera à la conférence sur le nucléaire de Téhéran, et elle continue à affirmer qu’elle est opposée à de nouvelles sanctions contre l’Iran. Mais les Etats-Unis et Israël sont en train de tout faire pour que la Chine revienne sur sa décision de soutenir la cause du nucléaire iranien. Seule l’importance stratégique que l’Iran a pour la Chine, surtout du point de vue de ses approvisionnements en ressources énergétiques, a jusqu’ici fait barrage à ces requêtes. Mais quelle est a solidité des liens entre la Chine et l’Iran en ce moment ? Les atlantiques réussiront-ils à entraîner la Chine de leur côté ou bien devront-ils renoncer à cette stratégie ?

L’activité nucléaire de l’Iran est une activité totalement pacifique. L’Iran est membre de l’AIEA et signataire du Traité de non-prolifération nucléaire. Toute activité relative au nucléaire est de ce fait sous la supervision des inspecteurs de l’agence. Appliquer les sanctions contre l‘Iran n’a aucun fondement juridique et légal et, surtout, est contraire aux protocoles du Traité. Les Etats-Unis et Israël, qui possèdent des têtes nucléaires et menacent d’attaques militaires, poursuivent une politique sans débouchés. Par rapport à la Chine, je rappelle que Téhéran et Beijing ont consolidé des relations amicales qui sont anciennes. La position indépendante de la Chine dans sa défense de l’activité nucléaire pacifique de l’Iran est admirable. Nous nous attendons à ce que la Chine et la Russie ne se laissent pas influencer par les pressions politiques des Etats-Unis et conservent en cela leur positon indépendante sur cette question.

Outre la Chine, d’autres pays aussi ont exprimé leur proximité et leur amitié à l’Iran, parmi lesquels la Russie, la Turquie, le Brésil et le Venezuela. Croyez-vous qu’il soit possible pour l’Iran, ensemble avec ces autres pays, de créer un front compact d’opposition et de réaction à l’influence états-unienne dans le continent eurasiatique et dans l’Amérique indio-latine ?

Heureusement aujourd’hui l’époque de la domination colonialiste des puissances coloniales est finie. Les pays libres collaborent pour leurs intérêts bilatéraux. Avec cette unité et une plus grande collaboration, l’ordre colonialiste des Etats-Unis n’atteindra pas ses buts. Nous voyons de bon augure ce front d’opposition qui obtiendra des résultats concrets pour la paix dans le monde, soit en Amérique Latine, soit en Afrique, en Asie, et même dans certains pays européens. Les pays nommés sont en train de construire une politique juste sur cette voie. Les Etats-Unis d’Amérique, avec un arsenal rempli d’armes nucléaires et de destruction de masse, et avec un passé très noir en ce qui concerne l’utilisation d’armes nucléaires, ont dernièrement menacé même d’une attaque nucléaire. Les USA qui soutiennent le régime illégitime d’Israël – qui est doté de bombes atomiques - n’ont aucune autorité pour porter des jugements sur l’activité nucléaire civile de l’Iran. Nous souhaitons que cette même agence pour l’énergie nucléaire atomique ne subisse pas de pressions de la part des Puissances, et que dans le cadre de ses règlements et de l’ordre juridique, elle contrôle les activités pacifiques nucléaires de tous les pays, et mette fin, de ce fait, à la production d’armes nucléaires et de destruction de masse. Nous souhaitons que l’AIEA joue son rôle dans ce sens.

Ces jours-ci justement Obama, en vue du congrès de Washington sur la sécurité nucléaire, a annoncé un changement radical de la stratégie sur l’utilisation des armes nucléaires. Les Etats-Unis annoncent vouloir utiliser les armes nucléaires seulement dans des cas extrêmes et jamais contre ces Etats qui respectent le Traité sur la non-prolifération nucléaire. Obama cependant a ajouté que ces nouvelles règles ne s’appliquent pas à la Corée du Nord et à l’Iran, lesquels resteront ainsi sous la menace d’une attaque, y compris avec des bombes nucléaires, bien que l’Iran soit signataire du traité. Quelle réponse l’Iran entend-il donner à cette décision d‘Obama ?

On peut s’étonner que l’Iran soit sous la menace de l’attaque nucléaire des Etats-Unis pour son activité relative au nucléaire exclusivement civil, comme d’ailleurs confirmé plusieurs fois par les inspections de l’AIEA. Les USA ont une attitude ambiguë : en fait ils menacent l’Iran pour son nucléaire pacifique, tandis qu’ils soutiennent le régime sioniste d’Israël – qui n’est pas signataire du Tnp et possède des têtes nucléaires - économiquement, politiquement et militairement. Sur cette question l’Iran n’a pas besoin de faire de la propagande en sa propre faveur. La Communauté internationale, qui est consciente de tout cela, et les opérateurs des médias indépendants et libres jugeront la question et tireront leurs propres conclusions de ce que font les Etats-Unis. L’Iran en tous cas continuera sur sa voie jusqu’à satisfaction de son droit au nucléaire pacifique. L’Iran considère que le nucléaire pacifique et la technologie nucléaire sont un droit pour tous les pays et tous les peuples du monde. Les sanctions et les menaces n’auront absolument pas d’incidence sur notre volonté, fondée sur les droits de l’Iran. Cela n’aura absolument pas d’incidence sur le peuple iranien souverain.

Vous avez parlé de Communauté internationale : que pourrait faire l’Union européenne pour faciliter les relations entre l’Iran et les Etats-Unis, considérant le fait que l’UE est une partie substantiellement constitutive du front atlantique ?

Concernant l’amélioration des relations entre les Etats-Unis et l’Iran je pense qu’il n’y a pas besoin de médiateurs. Si les Etats-Unis réduisent leur position colonialiste et mettent de côté leurs positions hostiles à l’égard des peuples et aussi à l’égard de l’Iran, s’ils s’acheminent sur la voie du respect réciproque entre les pays, automatiquement les rapports entre les pays deviendront bons. Si Washington tend la main et s’il est sincère à ce sujet, les problèmes seront résolus ; mais comme dit le Guide Suprême, Obama "nous tend la main avec un gant de velours qui pourrait cacher un poing de fer ». A cause des actions hostiles et des menaces continues des Etats-Unis (qu’on voie en particulier le dernier discours d’Obama concernant la menace d’attaque nucléaire) nous sommes certains que les Etats-Unis ne veulent pas améliorer les relations. Cependant nous attendons que l’Union européenne – en tant que pole économique puissant – prenne une position indépendante sur les différents thèmes d’intérêt international, et qu’elle ne suive pas servilement les politiques états-uniennes.

Le Saint Siège peut-il faciliter, en tant qu’autorité morale et religieuse, les rapports entre l’Iran et l’Union européenne et l’Iran et les Etats-Unis ?

Du Saint Siège, pour sa mission religieuse et en tant que porteur du message du Jésus Christ, nous attendons beaucoup plus que les seules suggestions morales et religieuses. Nous souhaitons qu’il assume une position ferme, déterminée, emblématique, face aux menaces des puissances fauteuses de guerre et agressives. Avec ces prises de position contre les vexations que subissent les peuples de la part des puissances colonialistes, le Saint Siège pourrait rendre les relations plus aisées. Le Saint Siège pourrait pousser les puissances occidentales à revoir leur action dans la politique internationale.