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Le français progresse en Afrique mais il décline en Europe

Par quel miracle le nombre de francophones dans le monde est-il passé de quelque 200 millions de personnes en 2007 à 220 millions de personnes en 2010, d’après le dernier rapport de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), publié mardi 12 octobre ?

Pour la première fois, répondent les dirigeants de l’OIF, leur jeune Observatoire de la langue française a pu se fonder, non plus sur des évaluations parfois sommaires, mais sur des sources statistiques, des enquêtes nationales ou internationales et, quand elles faisaient défaut, sur des études ad hoc menées par des organes de la francophonie.

De plus, outre les 70 pays membres de l’OIF (dont 14 pays dits "observateurs"), ont aussi été comptabilisés les francophones d’Algérie (évalués à 11,2 millions de personnes), ceux des Etats-Unis (2,1 millions), d’Israël (plus de 300 000 personnes) et même du Val d’Aoste (Italie, 90 000 personnes).

Dans les pays africains, seules les personnes sachant non seulement parler mais aussi lire et écrire le français ont été prises en compte. C’est l’un des facteurs qui permet aux responsables de l’OIF d’assurer que ce chiffre de 220 millions de francophones reste sous-évalué.

Le français, neuvième langue parlée au monde et deuxième langue enseignée (avec 116 millions de personnes qui l’apprennent, selon l’OIF) se développe-t-il vraiment, envers et contre l’attraction de l’anglais ? "Depuis cent cinquante ans, le français n’est plus la seule langue universelle, on a tardé à en prendre conscience, constate Frédéric Bouilleux, directeur de la langue française et de la diversité linguistique à l’OIF. Aujourd’hui, on parle le français parce qu’on en a besoin, pas seulement au niveau des élites."

D’après le rapport, le français se développe en Afrique, principalement pour des raisons démographiques, stagne en Amérique du Nord, et décline en Europe, où le Royaume-Uni, par exemple, a décidé, en 2004, que la langue de Molière n’était plus indispensable à l’examen final du cycle secondaire.

La régression est aussi patente dans toutes les organisations internationales et sur leurs sites, même quand le français y est langue officielle ou langue de travail. Ainsi, constate Alexandre Wolff, responsable de l’Observatoire de l’OIF, seulement 15% des textes de la Commission européenne de Bruxelles sont émis initialement en français et servent ainsi de base de discussion avant traduction.

Dans les instances de l’ONU, à Genève, ajoute-t-il, 90% des textes sont d’abord rédigés en anglais. A toutes ces organisations ainsi qu’à certains de ses pays membres comptant relativement peu de francophones, l’OIF tente d’imposer un "vade-mecum", rappel à la diversité culturelle timidement suivi d’effet, souvent faute de moyens.

Dans ses projections, l’OIF anticipe que l’Afrique, où vivent déjà environ la moitié des francophones du monde, en regroupera en 2050 environ 85%, sur 715 millions de locuteurs, toujours en vertu de son dynamisme démographique. Et à condition que la scolarisation continue de progresser sur ce continent et que le français y demeure une langue enseignée (le Rwanda a, lui, opté pour l’anglais).

D’où l’emphase accrue que demande Clément Duhaime, administrateur de l’OIF, dans la formation des maîtres et dans les programmes d’alphabétisation pour les pays africains, avant le 13e sommet de l’OIF prévu du 22 au 24 octobre à Montreux (Suisse).