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Les Etats-Unis ont confisqué les biens d’opposants à leur politique en Irak et au Liban

Depuis 2007, les Etats-Unis ont procédé la confiscation des biens de personnes qui s’opposent à leur politique en Irak et au Liban. Cette mesure a été appliquée aussi bien à des nationaux qu’à des étrangers ; que leur opposition ait pris une forme violente ou non. Ces dispositions, prises par l’administration Bush, ont été prorogées par l’administration Obama. Elles violent aussi bien la Constitution des Etats-Unis que le Pacte des droits civils et politique de l’ONU, dont Washington est pourtant signataire.

Le président Bush a signé deux décrets permettant au département du Trésor des Etats-Unis de confisquer les biens de toute personne perçue comme une menace directe ou indirecte pour les opérations des Etats-Unis au Proche-Orient. Le premier, intitulé « Saisie des propriétés de certaines personnes qui menacent les efforts de stabilisation en Irak », signé par Bush le 17 juillet 2007 [1], autorise le secrétaire au Trésor à confisquer, après consultation avec le secrétaire d’Etat et le secrétaire à la Défense, les biens des citoyens ou des organisations qui, « directement ou indirectement », font courir des risques aux opérations menées par les Etats-Unis en Irak.

Les décrets de Bush

« J’ai émis un ordre de saisie des propriétés des personnes dont il est établi 1) qu’elles ont commis ou risquent de commettre un acte ou des actes de violence dont l’intention ou l’effet serait de menacer la paix et la stabilité de l’Irak ou le gouvernement de l’Irak, ou de miner les efforts de reconstruction économique et de réforme politique en Irak ; 2) qu’elles ont aidé sensiblement, ou fourni un appui financier, matériel, logistique ou technique, ou encore des biens et des services, pour soutenir de tels actes de violence ou toute autre personne dont les propriétés ou les intérêts auraient été saisis en vertu de cet ordre… »

Le Titre V de ce décret annonce qu’« en raison de l’existence de moyens permettant de transférer instantanément des fonds ou d’autres biens, tout préavis adressé à ces personnes sur les mesures à prendre contre elles en vertu de ce décret rendrait celles-ci inutiles. Je décide par conséquent (…) qu’il n’est pas nécessaire d’émettre de préavis concernant la programmation ou l’ordre (de saisie des biens)… »

Le 1er août, Bush publiait un décret similaire, intitulé « Saisie des propriétés des personnes qui minent la souveraineté du Liban ou ses processus et institutions démocratiques » [2]. Le texte de ce deuxième décret est en grande partie identique à celui du premier, avec toutefois des dispositions plus sévères :

Dans les deux cas, ces décrets ignorent l’ordre constitutionnel en conférant au département du Trésor l’autorité de confisquer les biens des personnes qui représentent un risque de violence ou qui contribuent de manière non précisée à contrer la politique des Etats-Unis. Par contre le décret du 1er août est dirigé contre toute personne ayant réalisé un acte ou représentant une menace significative d’action, violente ou non violente, conspirant contre les opérations au Liban. La loi autorise aussi à confisquer les biens « d’un conjoint ou d’un enfant dépendant » de toute personne dont les propriétés auraient été saisies. Le décret concernant le Liban interdit aussi de fournir aliments, toit, médicaments ou toute autre forme d’aide humanitaire aux personnes dont les biens ont été confisqués et à leurs « enfants dépendants ».

Les termes vagues de ce décret anticonstitutionnel, dangereusement ouverts à toute interprétation, permettent de choisir arbitrairement un citoyen états-unien et de le dépouiller de tous ses biens en le soumettant de surcroît à l’ostracisme. Bruce Fein, avocat constitutionnaliste et ex-fonctionnaire du département de Justice sous l’administration Reagan, ne cache pas son étonnement : « Le texte est si général qu’il vous plonge dans la stupéfaction. Je n’ai jamais rien vu d’aussi vague. Cela va au-delà du terrorisme, du recours à la violence ou de la menace de violence pour faire peur à la population ou l’intimider. »

Dans un éditorial pour le Washington Times, Fein signale : « La personne dont les biens sont saisis est traitée plus ou moins comme un lépreux. Les sentences de mort financière sont imposées par le département du Trésor sans préavis, ni possibilité de contestation, c’est-à-dire qu’il n’y a plus de place pour le recours en justice. Cette mesure frappe comme la foudre. Quarantaine immédiate et absolue pour toute personne dont les biens sont confisqués. La victime ne peut recevoir d’aide, ni ses bienfaiteurs lui envoyer de fonds, de marchandises, de services d’aucune sorte. Un avocat ne peut pas lui offrir ses services sans défier le décret. Un médecin ne peut pas non plus prodiguer de soins en cas d’arrêt cardiaque (…) Le département de la Justice a habituellement pour mission d’examiner les décrets émanant de l’exécutif pour vérifier qu’ils sont compatibles avec la Constitution. Le Procureur général a-t-il sombré dans le sommeil ? » [3]

Mise à jour de Matt Rothschild

Cette nouvelle a été, que je sache, pratiquement ignorée des principaux médias. Lorsque je suis parti en tournée dans le pays pour donner des conférences, l’été dernier et que j’ai évoqué la question de ces décrets émanant de l’exécutif, les gens avaient du mal à y croire et se demandaient pourquoi ils n’en avaient jamais entendu parler. Je me pose encore la même question.

Voici deux sites où trouver de l’information sur ce sujet : The American Civil Liberties Union et The Center for Constitutional Rights.

Sources • Global Research, juillet 2007 Titre : “Bush Executive Order : Criminalizing the Antiwar Movement” Auteur : Prof. Michel Chossudovsky • The Progressive, août 2007 Titre : “Bush’s Executive Order on Lebanon Even Worse Than the One on Iraq” Auteur : Matthew Rothschild • Etudiants chercheurs : Chris Navarre et Jennifer Routh • Tuteur : Amy Kittlestrom, Ph.D.

Précision du Réseau Voltaire Plusieurs collaborateurs du Réseau Voltaire ont été frappés par les décrets présidentiels 13438 et 13441 en raison de leur soutien intellectuel ou matériel aux mouvements de résistance au Proche-Orient. C’est également à ce titre que Thierry Meyssan, président du Réseau Voltaire, a perdu la possibilité d’engager un recours contre son premier éditeur qui a volé la rémunération de ses ouvrages en les transférant dans une filiale aux Etats-Unis. Et c’est toujours à ce titre que Washington a sollicité l’aide des Etats membres de l’OTAN à l’encontre de Thierry Meyssan (cf.« Si j’avais plié, je n’aurais pas eu à partir »).