Egalité et Réconciliation
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"Liberté pour l’Histoire", ou la défense exclusive de la loi Gayssot

Lors de l’émission de Frédéric Taddéi, Ce soir (ou jamais !), consacrée aux lois mémorielles (20 octobre 2008, France 3), Pierre Nora, président de Liberté pour l’Histoire (LPH) - association qui prétend « lutter contre les lois mémorielles »- a déclaré qu’il n’appelait pas à abroger la loi Gayssot, mais au contraire à la conserver.

Voici la retranscription de ses propos :

« Non, on ne réclame pas l’abrogation de la loi Gayssot, car abroger aujourd’hui la loi Gayssot ce serait donner un encouragement, littéralement, à ce contre quoi luttait la loi Gayssot. »

Peu de téléspectateurs ont entendu cette déclaration. Parmi ceux qui ont prêté l’oreille, en revanche, certains ont été surpris. Ils pensaient benoîtement que LPH militait pour la renaissance de la liberté historique. Ils croyaient que l’un de ses objectifs était de faire sauter les verrous interdisant de remettre en cause certains épisodes troubles de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale.

Ils se trompaient. 

Sachant cela, voici maintenant (ci-dessous) le document que LPH invite ses adhérents à signer. Son auteur, Pierre Nora, n’y parle jamais de la loi Gayssot, pas davantage qu’il ne la critique. Il s’en prend, en revanche, aux autres lois mémorielles, celles qui s’en inspirent et s’apprêtent à lui faire concurrence, la mettant en péril du fait de leur accumulation.

La lecture patiente et critique de cet Appel démontre que la seule préoccupation de Pierre Nora est de mettre un frein aux nouvelles lois mémorielles dans le but exclusif de sauver la loi Gayssot.

Pour Pierre Nora et LPH, la loi Gayssot doit demeurer une exception, comme la Mémoire dont elle se fait fort de défendre l’unicité.


APPEL DE BLOIS

Inquiets des risques d’une moralisation rétrospective de l’histoire et d’une censure intellectuelle (1), nous en appelons à la mobilisation des historiens européens et à la sagesse des politiques (2).

L’histoire ne doit pas être l’esclave de l’actualité ni s’écrire sous la dictée de mémoires concurrentes (3). Dans un État libre, il n’appartient à aucune autorité politique de définir la vérité historique et de restreindre la liberté de l’historien sous la menace de sanctions pénales.

Aux historiens, nous demandons de rassembler leurs forces à l’intérieur de leur propre pays en y créant des structures similaires à la nôtre et, dans l’immédiat, de signer individuellement cet appel pour mettre un coup d’arrêt à la dérive des lois mémorielles (4).

Aux responsables politiques, nous demandons de prendre conscience que, s’il leur appartient d’entretenir la mémoire collective, ils ne doivent pas instituer, par la loi et pour le passé, des vérités d’État dont l’application judiciaire peut entraîner (5) des conséquences graves pour le métier d’historien et la liberté intellectuelle en général.

En démocratie, la liberté pour l’histoire est la liberté de tous."

Pierre Nora
Président de Liberté pour l’Histoire


Commentaires :

1. Si cet Appel était destiné à « libérer l’Histoire » des lois scélérates qui l’entravent, Pierre Nora n’évoquerait pas seulement les « risques » planant au-dessus de son libre exercice. Il ne considérerait pas davantage qu’il convient d’éviter qu’à l’avenir de tels risques contaminent l’activité historienne. Cet Appel s’élèverait au contraire, avec force, contre la réalité judiciaire implacable qu’est la loi Gayssot, qui frappe systématiquement les chercheurs ne se soumettant pas à son diktat. Au lieu d’évoquer d’hypothétiques risques contre lesquels il conviendrait de se mobiliser, cet Appel aurait dû demander l’abrogation immédiate de cette loi scélérate, qui, depuis 1990, condamne lourdement, ici et maintenant, tous ceux qui remettent en cause le jugement du tribunal de Nuremberg. La loi Gayssot n’est pas un « risque » de « moralisation » ni de « censure » : elle est une censure, et sa « morale » n’est autre que celles des vainqueurs de 1945, Staline et atomiseurs d’Hiroshima compris.

2. La « sagesse » en question consiste à ne pas multiplier les lois mémorielles suivant le schéma de la loi Gayssot, afin que cette dernière demeure la seule et unique Mémoire judiciarisée possible.

3. « L’actualité », dont l’Appel nous incite à ne pas être « l’esclave », ainsi que « les mémoires concurrentes », dont il faudrait se défier, clarifient le point n°1. L’Appel de Blois ne revient pas sur les lois scélérates existantes, il ne s’intéresse qu’à celles qui « risquent » d’advenir. Il s’inquiète de leur prolifération, qui, par contre-coup, rend possible la critique de la loi Gayssot et, partant, permettrait de relativiser la pensée unique au sujet de la Seconde Guerre mondiale.

4. Pour LPH, mettre un « coup d’arrêt » à la « dérive » des lois mémorielles ne revient pas à demander l’abrogation des lois scélérates précédentes - c’est-à-dire existantes. Au contraire : le coup d’arrêt souhaité par Nora signifie de facto la conservation des lois en vigueur. Pour Nora, il est souhaitable que la loi Gayssot reste appliquée, afin que la censure poursuive son oeuvre à l’encontre des chercheurs qui s’opposent à son emprise totalitaire. 

5. « Ils ne doivent pas instituer... des vérités d’État ». Or la « vérité d’État » existe (la loi Gayssot) et « entraîne » déjà de telles applications. L’Appel de Blois le dissimule avec culot, cachant le fait qu’aujourd’hui, en France, ainsi que dans un grand nombre de pays d’Europe, des chercheurs sont condamnés au nom de lois d’État qui ont institué une pensée unique à propos de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale. Le but de Pierre Nora est de défendre la liberté en apparence pour conserver et renforcer la loi Gayssot dans les faits.


Conclusion : En signant l’Appel de Blois, vous soutenez la loi Gayssot !