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Le Conseil constitutionnel gardien de la spécificité de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale

Le Conseil constitutionnel, dans une récente décision (8 janvier 2016), relevait que la répression du « négationnisme » n’était constitutionnelle que dans le cas des faits commis par les puissances de l’Axe durant la Seconde Guerre mondiale, et que la loi Gayssot ne visait que ces faits.

C’est pour contrer cette dernière décision que les parlementaires, outrés, avaient tenté d’élargir la répression par une nouvelle loi. L’objectif, en particulier, était de réprimer la contestation de l’existence du génocide arménien.

Mais le Conseil constitutionnel, présidé par Laurent Fabius, profite d’avoir été saisi sur d’autres choses pour, d’office (alors qu’on ne le lui demandait pas), se prononcer sur cette disposition. Et, en ce 26 janvier 2017, il l’écarte de la loi. Le droit français reste ainsi sur la ligne d’une absolue exclusivité de la répression au profit de l’histoire officielle de la Shoah.

Avant d’en faire un éventuel commentaire plus approfondi, voici le texte lui-même, expurgé des autres questions.

 

Damien Viguier

 


 

Décision n° 2016-745 DC du 26 janvier 2017
(Loi relative à l’égalité et à la citoyenneté)

 

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues à l’article 61, deuxième alinéa de la Constitution, de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté sous le n° 2016-745 DC, le 27 décembre 2016, par MM. (suivent les noms des sénateurs). Il a également été saisi le 27 décembre 2016, par MM. (suivent les noms des députés).

Au vu des textes suivants :
- la Constitution ;
- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- ETC. ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Les sénateurs et les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté. Ils contestent (suivent les dispositions contestées parmi lesquelles ne figure par le 2° d l’article 173 de la loi de 1881).

(…)

191. Le 2° de l’article 173 de la loi déférée modifie l’article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881. En application du dernier alinéa de ce 2°, la négation, la minoration ou la banalisation de façon outrancière d’un crime de génocide, d’un crime contre l’humanité, d’un crime de réduction en esclavage ou d’un crime de guerre sont punies d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende lorsque cette négation, cette minoration ou cette banalisation constituent une incitation à la violence ou à la haine par référence à la prétendue race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale.

192. Aux termes de l’article 11 de la Déclaration de 1789 : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». L’article 34 de la Constitution dispose : « La loi fixe les règles concernant... les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ». Sur ce fondement, il est loisible au législateur d’édicter des règles concernant l’exercice du droit de libre communication et de la liberté de parler, d’écrire et d’imprimer. Il lui est également loisible, à ce titre, d’instituer des incriminations réprimant les abus de l’exercice de la liberté d’expression et de communication qui portent atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers. Cependant, la liberté d’expression et de communication est d’autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés. Il s’ensuit que les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi.

193. Le dernier alinéa du 2° de l’article 173 permet de réprimer la négation de certains crimes, lorsque cette négation constitue une incitation à la violence ou à la haine par référence à la prétendue race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale, y compris si ces crimes n’ont pas fait l’objet d’une condamnation judiciaire.

194. En premier lieu, si la négation, la minoration ou la banalisation de façon outrancière de certains crimes de génocide, crimes contre l’humanité, crimes de réduction en esclavage ou crimes de guerre peuvent constituer une incitation à la haine ou à la violence à caractère raciste ou religieux, elles ne revêtent pas, par elles-mêmes et en toute hypothèse, ce caractère. De tels actes ou propos ne constituent pas non plus, en eux-mêmes, une apologie de comportements réprimés par la loi pénale. Dès lors, la négation, la minoration ou la banalisation de façon outrancière de ces crimes ne peuvent, de manière générale, être réputées constituer par elles-mêmes un abus de l’exercice de la liberté d’expression et de communication portant atteinte à l’ordre public et aux droits des tiers.

195. En deuxième lieu, aux termes du septième alinéa de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 actuellement en vigueur, est puni d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait de provoquer à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Dès lors, les dispositions introduites par le dernier alinéa du 2° de l’article 173, qui répriment des mêmes peines des propos présentant les mêmes caractéristiques, ne sont pas nécessaires à la répression de telles incitations à la haine ou à la violence.

196. En troisième lieu, et compte tenu de ce qui est rappelé au paragraphe précédent, le seul effet des dispositions du dernier alinéa du 2° de l’article 173 est d’imposer au juge, pour établir les éléments constitutifs de l’infraction, de se prononcer sur l’existence d’un crime dont la négation, la minoration ou la banalisation est alléguée, alors même qu’il n’est pas saisi au fond de ce crime et qu’aucune juridiction ne s’est prononcée sur les faits dénoncés comme criminels. Des actes ou des propos peuvent ainsi donner lieu à des poursuites au motif qu’ils nieraient, minoreraient ou banaliseraient des faits sans pourtant que ceux-ci n’aient encore reçu la qualification de l’un des crimes visés par les dispositions du dernier alinéa du 2° de l’article 173. Dès lors, ces dispositions font peser une incertitude sur la licéité d’actes ou de propos portant sur des faits susceptibles de faire l’objet de débats historiques qui ne satisfait pas à l’exigence de 41 proportionnalité qui s’impose s’agissant de l’exercice de la liberté d’expression.

197. Il résulte de ce qui précède que le législateur, en réprimant la négation, la minoration et la banalisation de certains crimes n’ayant fait l’objet d’aucune condamnation judiciaire préalable, a porté une atteinte à l’exercice de la liberté d’expression qui n’est ni nécessaire ni proportionnée. Le dernier alinéa du 2° de l’article 173 est donc contraire à la Constitution.

(…)

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er.

– Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté : – (…) le dernier alinéa du 2° de l’article 173 ;

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 26 janvier 2017 où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. JeanJacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.

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